Nous partageons le constat : les négociations commerciales dans le secteur des produits de grande consommation sont déséquilibrées. Toutefois, les mesures qui figurent dans la proposition de loi ne nous semblent pas vraiment adaptées pour remédier à cette difficulté. Les lois Egalim 1 et Egalim 2 ne sont pas à la hauteur, et quelques dispositifs technocratiques en plus ou en moins n'y changeront rien. Nous avons besoin non pas d'une loi Egalim 3, mais d'un changement de méthode. C'est le prix rémunérateur qui devrait être le point de départ de ces négociations. C'est pourquoi, afin de garantir la rémunération de l'ensemble des maillons de la chaîne et d'assurer des prix accessibles, nous défendons l'instauration de prix planchers sur les produits agricoles et de coefficients multiplicateurs qui bloquent les marges et les prix. L'inflation est là, et la guerre en Ukraine n'est pas seule en cause : elle est aussi le fruit de l'augmentation des profits des grands groupes.
La situation s'est-elle améliorée pour les agriculteurs ? Non. En dix ans, le nombre d'agriculteurs a diminué de 100 000, et cela continue : chaque jour, de nombreuses fermes disparaissent, exposées à la volatilité des prix de marché et à l'insuffisance de la régulation des prix. En réponse, cette proposition de loi prolonge l'expérimentation du relèvement de 10 % du SRP, véritable cadeau à la grande distribution. Ces 10 % n'ont jamais ruisselé jusqu'aux producteurs ou aux travailleurs. Quant aux citoyens, je l'ai dit, ils sont sévèrement frappés par l'inflation, qui a atteint 12 % en moyenne sur un an pour les produits alimentaires.
Nous sommes donc favorables à un rééquilibrage des négociations commerciales, mais qui bénéficie à l'ensemble des maillons de la chaîne, du producteur au consommateur.
Si la proposition de loi ne nous paraît pas à la hauteur des enjeux, certaines de ses dispositions paraissent aller dans le bon sens, comme le dispositif de l'article 1er, qui confirme la jurisprudence visant à éviter tout phénomène d'évasion juridique.
J'ai déjà développé notre position sur l'article 2. La grande distribution et les grands groupes ont été les seuls à bénéficier du relèvement de 10 % du SRP. Vous l'avez reconnu vous-même, Monsieur le rapporteur, rien ne justifie la prolongation de cette expérimentation hasardeuse.
Nous espérons que l'article 3 évitera aux producteurs et aux industriels d'être piégés par une date butoir de fin de négociation. C'est capital dans la période de forte inflation que nous connaissons. Si l'intention est intéressante, la rédaction de l'article doit encore évoluer ; nous serons attentifs sur ce point.
Le dispositif prévu à l'article 4 permettra peut-être d'améliorer la transparence sur la formation des prix et sur la rémunération des agriculteurs, mais c'est un détail : si vous vouliez vraiment garantir une transparence et une juste rémunération des producteurs, vous proposeriez que l'État agisse véritablement en qualité d'arbitre des relations commerciales, plutôt que de rester le spectateur d'un match joué d'avance, se contentant de quelques indicateurs.
Nous espérons donc que ce texte évoluera dans le bon sens afin de bénéficier à toutes et à tous. À ce stade, il ne nous semble pas prendre pleinement la mesure des transformations urgentes et nécessaires dans cette période d'inflation.