L'indisponibilité du parc nucléaire a commencé en réalité depuis 2015. En tant que directeur général adjoint chargé des réseaux et des clients de RTE depuis octobre 2015, quelles alertes avez-vous fait remonter, et auprès de qui, au sujet de la baisse régulière et continue de la disponibilité du parc nucléaire?
Je m'intéresse davantage aux prévisions de RTE qu'à celles que l'Ademe a tenté de réaliser, et qui paraissaient plus fantaisistes. Cependant, les différences entre les bilans prévisionnels de RTE de 2015, 2017 et 2021 sont assez stupéfiantes. Le rapport de 2017 titrait « consommation électrique : des perspectives orientées à la baisse » et trois de ses quatre scénarios étaient orientés à la baisse. Celui qui faisait l'hypothèse de la plus forte consommation évaluait cette dernière 480 TWh, soit une forme de stabilité, tandis que les autres se situaient autour de 395 TWh pour 2035. Votre bilan prévisionnel de 2021 donne à voir une consommation moyenne de 645 TWh. Comment le scénario peut-il évoluer à ce point ?
Il me semble que les perspectives ont été tordues pour coller à une volonté politique : puisqu'il ne fallait plus développer le nucléaire, mais plutôt les énergies renouvelables, les rapports donnaient de la crédibilité à ces politiques publiques. Or, le Président de la République a opéré un virage à 180 degrés lors du discours de Belfort, en décidant de relancer des réacteurs et non plus d'en fermer.
Vous avez répondu à la question de l'allongement de la durée de vie des centrales. Je doute tout de même que nous arrivions à faire face aux besoins d'électricité. Il me semble que nous devrions prolonger la durée de vie de nos centrales à soixante ans – les États-Unis ont bien prolongé les leurs à quatre-vingts ans. Le scénario tout EPR est-il celui que nous devrions suivre ? Ne faudrait-il pas plutôt revenir aux réacteurs à eau pressurisée comme le modèle de la Westinghouse Electric Company de troisième génération en parallèle du développement des EPR ?
Enfin, s'agissant de la crise que nous traversons et du prix de l'électricité dans notre pays, avez-vous été sollicité par le Gouvernement pour participer à l'élaboration d'un scénario ibérique, qui nous permettrait de sortir des prix de marché européen spot ? Le cas échéant, à quelle date ? Nous devrions alors calculer un prix de marché intérieur et un prix moyen de production intérieure après avoir fixé un prix maximum pour le gaz en France. Cela ne nous empêcherait pas de réaliser des interconnexions sur un autre prix de marché.