Intervention de Alain David

Réunion du mercredi 18 janvier 2023 à 11h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain David, rapporteur :

L'accord entre la France et le Kosovo, dont il nous est demandé d'autoriser l'approbation, a été signé en juillet 2020. Adopté par le Sénat, le 13 juillet 2021, le projet de loi soumis à notre vote vise, en rendant cet accord effectif, à faciliter l'accès au marché du travail local des personnes à charge des agents des missions officielles de chacun des deux pays. Les personnes concernées, essentiellement des conjoints d'agents, pourront bénéficier d'une autorisation de travailler sans perdre leur statut diplomatique.

Notre commission a déjà adopté, au cours de la XVème législature, plusieurs projets de loi autorisant l'approbation d'accords similaires, avec le Nicaragua, la République dominicaine, la Moldavie, le Bénin, la Serbie, l'Albanie, le Chili ou encore la Bolivie. Depuis 2014, la France a conclu plus de vingt-cinq accords bilatéraux ayant le même objectif.

Cet accord doit être replacé dans le contexte du projet de réforme du ministère de l'Europe et des affaires étrangères intitulé « pour un ministère du XXIème siècle », qui a été lancé en 2015 et poursuivi jusqu'en 2017, avant d'être prolongé dans le cadre de la réforme « Action publique 2022 ». Cette réforme vise à moderniser le cadre d'expatriation des agents, à favoriser l'employabilité des personnes dites à charge, appartenant à leur famille, et à améliorer l'insertion professionnelle et sociale de ces dernières dans leur pays de résidence.

L'objectif initial de faciliter les conditions d'emploi des conjoints d'agents diplomatiques et consulaires dans au moins quatre-vingts pays a d'ores et déjà été atteint, et il a même été dépassé si l'on considère l'ensemble des accords conclus et des notes verbales échangées en incluant les pays membres de l'Espace économique européen et la Suisse.

Si ces accords concernent un nombre limité de nos ressortissants, ils émanent d'une demande des familles. L'impossibilité pour les conjoints d'agents d'exercer un emploi sans renoncer à leur statut diplomatique constituait, en effet, un véritable frein à l'expatriation, auquel le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a souhaité remédier, et ce d'autant plus que le nombre de conjoints d'agents souhaitant travailler n'a cessé d'augmenter ces dernières années. Cette évolution accompagne des changements sociaux majeurs, tels que la progression du taux d'emploi féminin, notamment au sein du corps diplomatique. La promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes s'en trouve favorisée, en cohérence avec les objectifs de la réforme de la diplomatie française.

En l'état actuel du droit, le statut diplomatique des conjoints d'agents peut être un obstacle à l'exercice d'une activité professionnelle. Les conventions de Vienne de 1961 et de 1963, qui régissent les relations diplomatiques et consulaires, n'interdisent pas l'exercice d'une activité professionnelle par les conjoints d'agents, mais impliquent un renoncement partiel aux immunités associées au statut diplomatique. Le cadre juridique national peut aussi freiner l'accès au marché du travail local. Ainsi, en France, le titre de séjour délivré aux agents diplomatiques et consulaires et aux membres de leur famille ne fait pas partie des titres accordant de droit une autorisation de travailler.

L'accord du 7 juillet 2020, issu de négociations lancées à la demande de la partie kosovare, qui est particulièrement désireuse de le voir aboutir en raison du différentiel du coût de la vie – le salaire minimum est compris entre 300 et 350 euros au Kosovo – et des prix de l'immobilier, permettra de pallier ces difficultés. Il ne concernera qu'un nombre limité de personnes – moins d'une dizaine – au Kosovo comme en France.

Il est important de noter que si le Kosovo n'a pas encore intégré dans son droit civil la reconnaissance du mariage homosexuel, pourtant autorisé par l'article 37 de sa Constitution, l'accord stipule explicitement qu'il s'appliquera, pour les agents français au Kosovo, au « conjoint marié ou [au] partenaire lié par un contrat d'union légale en conformité avec les lois de l'État d'envoi ». Cet accord devrait donc s'appliquer sans difficulté aux couples de même sexe. De la même manière, l'absence de reconnaissance du pacte civil de solidarité (PACS) par le Kosovo, qu'il soit entre deux partenaires de même sexe ou non, ne fera pas obstacle à l'application de l'accord aux couples français « pacsés ». Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a d'ailleurs été informé par l'ambassade de France au Kosovo de l'accréditation, le 25 mai 2021, du partenaire de même sexe d'un agent « pacsé », qui avait reçu une carte diplomatique. Je ne peux qu'encourager l'inclusion de dispositions semblables dans les prochains accords de ce type que la France négociera.

Avant de vous inviter, mes chers collègues, à voter sans réserve en faveur de l'approbation de cet accord, je précise que les relations se sont très récemment « décongestionnées », si je puis dire, entre la Serbie, qui conteste l'existence d'un Kosovo libre, et ce pays. À la suite de l'intervention de l'Union européenne et des Nations Unies, les barrages ont été levés dans le Nord du Kosovo. La situation semble donc s'apaiser momentanément.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion