Intervention de Ersilia Soudais

Séance en hémicycle du lundi 16 janvier 2023 à 21h30
Évolution de la formation de sage-femme — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaErsilia Soudais :

C'est pourquoi le parcours de formation des sages-femmes, ainsi que leur statut, restent coincés entre professions médicales et paramédicales, ce qui ne correspond pas à leurs compétences réelles. Le métier de sage-femme est une profession médicale, et pour qu'il soit reconnu en tant que tel, une évolution de leur formation s'imposait. En cela, ce texte constitue une avancée. Le changement de nom de leur diplôme d'État, non plus de sage-femme mais de docteur en maïeutique, a une forte portée symbolique. Les sages-femmes ont trop longtemps été placées sous la tutelle des gynécologues obstétriciens alors que, pendant des siècles, elles ont procédé seules aux accouchements.

En vérité, l'article 60 de la loi du 21 juillet 2009 avait déjà créé un article dans le code de la santé publique prévoyant que « la formation initiale des sages-femmes peut être organisée au sein des universités ». En 2012, une circulaire fixait un objectif d'intégration totale de la formation de sage-femme à l'université d'ici à cinq ans, soit en 2017. Échec total, puisque seules onze écoles de sages-femmes ont franchi le pas sur un total de trente-cinq. Ces écoles craignent leur disparition pure et simple car seules vingt-neuf universités disposent d'une UFR de médecine. Certaines écoles pourraient donc être regroupées et disparaître. Il faudrait créer davantage d'UFR de médecine pour remédier à ce déséquilibre, en ne perdant pas de vue que, pour les universités, la question budgétaire est centrale et qu'il est difficile d'occulter les années d'austérité qu'elles ont subies.

Le rapport de l'Igas de juillet 2021 recommande d'« élaborer un plan destiné à finaliser le processus d'universitarisation, sous l'égide d'un comité de suivi national » qui réunirait d'abord les différents acteurs. La date butoir du 1er septembre 2027 proposée dans le texte nous semble bien lointaine.

Cela étant posé, le problème du mal-être des sages-femmes ne saurait de toute façon être résolu par ce texte, dont les avancées sont insuffisantes. Il faut absolument que celles-ci soient accompagnées d'une revalorisation réelle des salaires, les primes ayant tendance à disparaître à la moindre absence pour maladie ou grossesse. Soulignons qu'un quart des sages-femmes n'ont pas touché les primes et revalorisations engagées en 2021. Et quelle absurdité de constater que celles qui aident les femmes à accoucher sont pénalisées quand elles-mêmes accouchent ! L'Igas indiquait par ailleurs en septembre 2021 qu'il fallait revaloriser à hauteur de 600 euros le salaire des nouvelles entrantes dans le métier afin de garantir l'attractivité de celui-ci.

Il importe également que le personnel en salle d'accouchement soit en nombre suffisant et que les moyens alloués à l'hôpital soient dignes de ce nom. Beaucoup de sages-femmes ont le sentiment de mal faire leur travail, de devoir toujours avoir un œil sur le chrono et d'être absorbées par la paperasse au lieu de se tenir aux côtés des femmes qu'elles accompagnent.

La question est simple : dans quelles conditions accepte-t-on que les femmes accouchent et que les enfants naissent ? Plus de la moitié des événements indésirables graves associés à des soins (EIGS) survenus en obstétrique seraient évitables selon un rapport de la Haute Autorité de santé (HAS) publié le 21 novembre 2022. La surcharge de travail et les sous-effectifs sont mis en cause dans les accidents dans la majorité des cas.

À la maternité de Meaux, en Seine-et-Marne, il manque six sages-femmes, soit 25 % des effectifs, lesquels resteraient insuffisants même si les personnels étaient au complet. Cela a conduit la direction à demander à celles qui restent de faire toujours plus d'heures supplémentaires et aux infirmières de les suppléer, sans qu'elles soient formées pour cela. Après tout, l'accouchement est une « affaire de femmes » : ce sont des femmes, où est le problème ?

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