Reprenant une expérimentation conduite dans le département du Nord, la présente proposition de loi issue du Sénat vise à créer une aide d'urgence pour les personnes – hommes ou femmes – victimes de violences conjugales. Je salue et je remercie pour la qualité de leur travail et leur engagement la sénatrice Valérie Létard, qui l'a déposée et qui est présente dans nos tribunes, et Jocelyne Guidez, qui en est la rapporteure au Sénat.
Nous pouvons nous réjouir des nombreux échanges témoignant de la volonté de chacun d'apporter une véritable réponse aux hommes et aux femmes victimes de violences, au moment où ils ou elles franchissent le pas et partent de leur domicile afin de s'émanciper de l'emprise du conjoint. Nos débats – j'en suis sûre – permettront d'enrichir encore ce texte pour aboutir à un dispositif efficace, en complétant les mesures existantes afin de permettre à ces personnes de faire face à l'urgence de la situation.
L'article 1er de la proposition de loi crée une aide d'urgence financée par la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) pouvant être octroyée par les CAF aux victimes de violences conjugales. La première mensualité intervient dans les trois jours suivant le dépôt de la demande. Cet apport financier quasi immédiat vise à soutenir les frais liés au départ du domicile dans une situation urgente et à permettre à la victime de sortir de ce qui est souvent un parcours de violence. Le montant qu'elle percevra sera majoré en fonction du nombre d'enfants à sa charge.
Quitter le domicile est une étape difficile ; de nombreuses victimes repoussent la rupture ou décident de revenir au domicile du couple en raison de la précarité économique. Il est si difficile de retrouver une indépendance financière !
Le dispositif proposé est largement ouvert puisqu'il est attribué sans condition de ressources à toute personne victime de violences conjugales, dès lors qu'une plainte a été déposée, qu'une ordonnance de protection a été délivrée ou que le procureur de la République a été saisi par une personne tierce. Les auditions menées pour préparer la proposition de loi ont révélé l'importance d'ajouter ce dernier critère, qui permet d'octroyer l'aide d'urgence à des personnes qui ne sont pas engagées dans des démarches judiciaires volontaires, mais qui ont été signalées comme étant victimes de violences, par exemple par un professionnel de santé.
L'aide pourra aussi prendre la forme d'un prêt sans intérêt. En fonction de la situation financière et sociale de la victime, les CAF pourront échelonner, voire annuler les différents remboursements. L'évolution du texte par amendement permettra en effet que l'aide financière prenne, dans certains cas, la forme d'une aide non remboursable, mesure que nous approuvons et que nous saluons.
La proposition de loi prévoit un mécanisme mettant à contribution l'auteur des violences à qui revient la responsabilité de prendre en charge l'aide.
Elle a également pour objet de faciliter les démarches des victimes. Nous proposerons des sous-amendements en ce sens. Nous souhaitons en effet réintroduire à l'article 1er la transmission facilitée de la demande aux CAF, qui était inscrite à l'article 2.
La création d'une avance d'urgence est demandée par un grand nombre d'associations représentant les victimes de violences conjugales. La capacité financière est, nous le savons, une pierre angulaire de la reconstruction des victimes. Pour que celles-ci puissent prendre un véritable nouveau départ, l'aide financière doit s'accompagner de droits accessoires, comme l'accompagnement social et professionnel prévu dans le cadre de la prestation du RSA.
La proposition de loi nous paraît parfaitement équilibrée et dépasse les clivages politiques. La situation est urgente ; nous ne pouvons pas retarder l'adoption d'un texte attendu par tous. C'est pourquoi nous vous invitons vivement à la voter à l'unanimité. Soyons à la hauteur des enjeux et répondons à cette situation critique.