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Intervention de Jérôme Legavre

Séance en hémicycle du lundi 9 janvier 2023 à 16h00
Réforme de la voie professionnelle

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Legavre :

Madame la ministre déléguée, la fin de l'année 2022 a été marquée par des mobilisations et des grèves massives, au sein des lycées professionnels, contre votre projet de réforme, lequel prévoit notamment de favoriser toujours plus l'apprentissage. Nous connaissons par cœur l'argument ressassé : celui-ci permettrait de lutter contre le chômage des jeunes. Il n'est donc pas inutile de rétablir quelques faits.

Depuis le début du siècle, les lycées professionnels ont perdu 100 000 élèves, tandis que l'apprentissage patronal gagnait 500 000 jeunes. Or, au début des années 2000, on recensait 400 000 chômeurs de moins de 25 ans ; en 2022, ils étaient encore 380 000 : donc 20 000 de moins. Où est donc le bilan tant vanté de l'apprentissage ? Peut-être, tout simplement, votre objectif se situe-t-il ailleurs. À Nîmes, il y a quelques mois, les salariés de Carrefour étaient en grève. Voici ce que déclarait l'une d'entre eux : « Ils emploient des jeunes en apprentissage, formés à la va-vite. C'est très rare qu'ils les gardent. » De fait, le taux de rupture des contrats d'apprentissage est en moyenne de 25 % ; il atteint 30 % dans la restauration. Le taux de précarité des 15-24 ans est quant à lui passé de 17 % à 53 % en quarante ans ! Enfin, les jeunes qui choisissent l'apprentissage ont beaucoup moins de chances d'obtenir un diplôme que ceux qui optent pour la voie scolaire : il y a 26 points d'écart entre les deux chiffres.

Madame la ministre déléguée, l'enseignement professionnel a été institué, après la seconde guerre mondiale, dans le but de soustraire la jeunesse à la tutelle des patrons. Pourtant, au moment où je vous parle, six lycées professionnels sont menacés de fermeture en région parisienne, dix dans le Grand Est. Quand renoncerez-vous à votre projet destructeur, qui n'a en réalité d'autres objectifs, au prix de 35 milliards – une paille ! – d'aides publiques en trois ans, que de fournir aux entreprises une main-d'œuvre gratuite et de faire artificiellement baisser les chiffres du chômage ?

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