CMA France attend des éléments supplémentaires pour se prononcer sur cette réforme de l'enseignement professionnel qui n'est pas aboutie. C'est donc à titre personnel que j'interviendrai. Je précise que je préside, outre la CMA de Normandie, l'Union nationale des entreprises de coiffure (Unec) et que je gère un centre de formation d'apprentis (CFA) et un lycée professionnel privé sous contrat d'association avec l'éducation nationale. J'ai donc une certaine expertise s'agissant de l'apprentissage comme des lycées professionnels.
Nous sommes très attentifs à la réforme des lycées professionnels. Il existe en effet deux voies d'accès à la filière professionnelle : or, que ce soit à travers l'apprentissage ou à travers le lycée professionnel, chaque jeune a des choix à faire, avec sa maturité propre et son envie d'apprendre. L'orientation est au centre de nos débats car, comme vous le savez, l'emploi est au cœur de nos préoccupations. Le recrutement est devenu difficile pour toutes les entreprises, quelle que soit leur nature, y compris pour les entreprises artisanales et les très petites entreprises.
L'une des grandes pistes de réflexion porte sur l'immersion dans les entreprises. Il est question d'augmenter le volume des stages, pourquoi pas ? Cela pose néanmoins la question du financement. Le Gouvernement a mis l'apprentissage en lumière et lui a consacré de fortes sommes : nous en sommes les premiers ravis car celui-ci fait partie de notre ADN. Toutefois, nous ne voulons pas que les lycées professionnels entrent en concurrence avec les CFA. Ces établissements reposent sur deux modèles différents qui supposent des accès différents. L'apprentissage implique un rapport fort à l'entreprise puisque le jeune signe un contrat par lequel il devient salarié. Du côté des lycées professionnels, les périodes de stages renvoient à un accompagnement d'une autre nature. Lorsque le responsable d'une entreprise décide de prendre un jeune en formation, même pour la période limitée du stage, c'est qu'il a parfaitement conscience qu'il doit accompagner le jeune, avec toute la bienveillance possible, vers son métier de demain.
Ces métiers de la voie professionnelle, dits manuels, requièrent une technicité particulière et réclament un temps d'adaptation, ce qui manque parfois dans le cadre du lycée professionnel par rapport à l'apprentissage.
Toutefois, le lycée professionnel est une filière importante qui doit mener les jeunes vers un niveau scolaire supérieur, ce qui est moins le cas de l'apprentissage, la montée en compétences et les attentes étant différentes dans les deux cas. C'est pourquoi il faut accompagner la réforme de cette voie scolaire qui permet d'accéder au brevet de technicien supérieur (BTS) par exemple, voire au-delà.
Mme Gérardin a ainsi évoqué l'accès aux langues : la filière apprentissage est davantage consacrée à l'acquisition d'un métier, tandis que le lycée professionnel offre une plus grande ouverture au monde. N'oublions pas que ces jeunes seront ensuite de futurs chefs d'entreprise, managers ou salariés qui bénéficieront ainsi d'une approche de l'entreprise différente de celle d'un jeune de 15 ou 16 ans.
En ce qui concerne la réforme de la voie professionnelle, notre préoccupation est la suivante : il ne faudrait pas opposer deux voies distinctes et annihiler ce qui a déjà été réalisé de fort belle manière par le Gouvernement en matière d'apprentissage, qui rayonne désormais comme il se doit dans notre pays. C'est pourquoi, s'agissant de la réforme du lycée professionnel, nous attendons, je le répète, de connaître l'aboutissement de la réflexion.
Enfin, l'orientation est pour nous le sujet crucial : comment, en tant que professionnels, pouvons-nous intégrer les lycées professionnels, notamment dès la classe de seconde qui correspond à une période de détermination, afin d'accompagner, notamment en discutant avec eux, et d'orienter ces jeunes qui choisissent une dimension professionnelle ?