Je ne partage pas complètement votre inquiétude. La France est l'unique pays au monde disposant d'une filière allant de l'extraction de l'uranium au stockage des déchets. Certains éléments de cette construction, dans les développements et les solutions apportées, peuvent être relativement récents. Pour exemple, l'ANDRA déposera une demande d'autorisation de construction pour le projet Cigéo d'ici début 2023. Sur ce sujet particulier et important, la France est un leader. Dans d'autres pays, ce sujet n'a pas été abordé suffisamment en amont ou se trouve bloqué. Sur l'aval, les contraintes administratives sont fortes, mais sans doute nécessaires. Le travail avec l'ASN est permanent, mais long. Pour Cigéo, l'instruction par l'ASN durera probablement cinq ans, temps nécessaire pour s'assurer du niveau des concepts techniques et des soutiens scientifiques.
Je ne dirai pas que nous sommes à la traîne. Je crois surtout qu'une constance politique dans les orientations est nécessaire. Si l'on change de direction au milieu d'un temps long, il est plus difficile pour la filière de s'organiser. Des directives fortes et stabilisées donneraient aux concitoyens une vision raisonnable de ce que sera l'énergie nucléaire en France.
Si l'on redéveloppe le nucléaire à la hauteur de l'annonce formulée à Belfort par le Président de la République, près de 30 000 personnes seraient nécessaires dans la décennie à venir. Des compétences sont à reconstruire. Il faudra donc attirer des jeunes et redynamiser les formations, ce qui est complexe. Encore une fois, la recherche et la formation sont importantes et doivent bénéficier d'une pérennité d'action qui n'a peut-être pas été complètement conservée les dernières années.