Madame Brulebois, les orientations de l'Ademe ne sont pas laissées à l'appréciation de son président-directeur général. Elles font l'objet d'engagements du Gouvernement, du Parlement, de moyens budgétaires et d'un contrat d'objectifs et de performance (COP) arrivant à échéance à la fin de l'année 2023. Le COP définit la feuille de route du président, lequel est missionné pour atteindre les objectifs fixés par le Gouvernement grâce aux moyens mis à disposition par le Parlement. La situation est claire.
Avant sa révision, le COP fera l'objet d'un bilan, au début de 2023. Certaines thématiques devront être approfondies. Outre la mise en œuvre des différents fonds – le fonds Chaleur renouvelable, le fonds Économie circulaire et celui pour la décarbonation de l'industrie –, l'Agence doit relever le défi de l'adaptation. Les choses vont beaucoup plus vite que nous aurions pu le penser et il faudra être encore plus présent aux côtés des territoires pour définir des stratégies résilientes et d'adaptation à brève échéance.
Le développement des énergies renouvelables pose la question de la souveraineté économique qui n'est pas au cœur des missions de l'Ademe. Il serait toutefois dommage de continuer à alimenter la demande en panneaux chinois et de ne pas participer à la structuration d'une filière, sinon française, du moins européenne. L'Ademe devra mobiliser ses ressources et son expertise en ce sens. Le soutien apporté aux productions nationales dans le cadre du fonds Chaleur annule l'effet des importations, permettant d'atteindre l'équilibre, mais nous devons pouvoir faire encore mieux.
Madame Masson, je veux exprimer ma hâte, si le Parlement en décide, de commencer à travailler. Il y a urgence à agir. L'Agence doit venir en aide aux collectivités et aux entreprises qui veulent investir dans la transition énergétique. Les entreprises qui voient leurs factures exploser attendent un soutien rapide pour établir des diagnostics et financer des investissements. Il y va de la survie d'une partie de notre tissu industriel et de l'attractivité industrielle de la France.
Le nucléaire renvoie au rôle d'expertise de l'Ademe puisqu'il ne fait pas partie de ses missions – mais il fait évidemment partie de son paysage. Le choix de relancer des EPR doit être pris en considération dans ses analyses. Le rapport produit par l'Ademe sous le titre « Transition(s) 2050 » révèle différentes voies pour parvenir à la neutralité carbone. Le rôle de l'Ademe est de baliser les choix afin d'éclairer nos institutions démocratiques. Nous avons le double rôle de mise en œuvre concrète de solutions et d'expertise indépendante et non biaisée. L'examen des différents scénarios de « Transition(s) 2050 » montre que le choix porte sur les risques que l'on accepte de prendre. Je m'attacherai à préserver la capacité d'expertise de l'Agence, qu'incarne notamment un conseil scientifique de qualité, pluraliste et ouvert.
Monsieur Carrière, l'Ademe ayant à atteindre les objectifs fixés par le Gouvernement grâce aux moyens votés par le Parlement, elle doit accélérer le développement des énergies renouvelables. Le principal outil dont elle dispose est le fonds Chaleur renouvelable – la chaleur représente 40 % de notre consommation énergétique finale. L'Agence doit utiliser les moyens qui lui sont confiés le plus efficacement possible dans tous les territoires afin de combler le retard surtout en matière de production d'électricité ; s'agissant de la chaleur, le bilan est plutôt positif.
Une centrale nucléaire est déjà implantée dans le territoire ardennais. De manière unanime et transpartisane, les élus ont souhaité faire participer leur territoire à la relance de l'activité nucléaire, non seulement par conviction de l'utilité de cette énergie dans la transition en cours, mais aussi eu égard aux retombées économiques très bénéfiques de l'implantation de la centrale de Chooz. Dans le nord des Ardennes, elle a créé de nombreux emplois et est devenue un pourvoyeur de richesses pour les collectivités dont elles ne pourraient pas se passer.
Madame Petex-Levet, s'agissant de l'articulation du nucléaire avec les énergies renouvelables, l'Ademe s'insère dans la politique énergétique du pays et doit remplir les missions qu'on lui confie. Le développement du nucléaire ne relève pas de l'Agence. En revanche, elle intervient pour développer la production de chaleur et agit en tant que conseil auprès des collectivités pour la production d'électricité. S'agissant des énergies renouvelables, l'Ademe doit faciliter les choix locaux, favoriser la cohérence territoriale et se mettre encore davantage à disposition des acteurs locaux. La loi « 3DS » a, à juste titre, fait du préfet le délégué territorial de l'Agence. C'est avec lui que les intercommunalités ou les Scot signent les contrats de relance et de transition écologique (Crte) notamment. Que l'Ademe soit aux côtés du préfet pour instruire et apporter son expertise est donc un plus. Ce qui pouvait jusqu'à présent être informel devient opportunément une obligation avec la « loi 3DS ».
L'Ademe doit continuer à éclairer l'avenir grâce à ses experts. Ses projections, notamment celles du rapport « Transitions(s) 2050 », rejoignent les réflexions de RTE et d'autres acteurs. Il est indispensable de préserver l'objectivité scientifique de sa démarche. Je le répète, l'Agence a pour mission de présenter des analyses et de mettre en évidence différentes options entre lesquelles il revient au pouvoir politique de choisir. Après quoi, elle aide à la mise en œuvre.
Madame Babault, il ne s'agit pas de faire une évaluation comptable du COP, même s'il est utile d'examiner les dépenses. Si nous n'utilisons pas les moyens que le Parlement nous confie, il convient de vérifier si les projets sont bien conçus et si le recours à l'appel à projets est bien adapté. Venant d'un territoire pauvre, je sais qu'il est parfois très difficile de mobiliser une ingénierie pour répondre à des appels à projet. Il y a des leçons à tirer de l'analyse comptable, mais elle ne peut suffire. Par chance, nous disposons d'une année pour faire le bilan et dégager les orientations nouvelles. Si vous souhaitiez que le président de l'Ademe revienne devant vous pour évoquer les orientations du futur COP, ce serait non seulement normal mais utile. À titre personnel, j'en serais heureux.
Je confesse mon ignorance de l'outil Planet-score. Toutefois, la démarche intellectuelle de l'Ademe est de sans cesse remettre l'ouvrage sur le métier et de chercher à affiner ses analyses. Les analyses en cycles de vie de l'Ademe font autorité et sont utiles pour éclairer les choix. Si des insuffisances sur le plan scientifique sont relevées, nous aurons à cœur de les corriger, réglementation européenne ou pas.
Monsieur Delautrette, je n'évacue pas l'importante question des effectifs et des financements. L'adéquation entre les objectifs assignés et les moyens confiés, lesquels augmentent de manière importante, sera la priorité de mes premières semaines de travail. L'Ademe a élaboré des systèmes d'information plus efficaces. Conjugué à l'attribution de moyens supplémentaires, cela permettra-t-il d'atteindre les résultats attendus ? Vous me permettrez de réserver mon jugement. Si des moyens supplémentaires devaient être alloués, ce serait à l'Assemblée nationale et au Sénat d'en discuter. Je n'ai pas de raison de penser ni qu'il y a une complète inadéquation entre les objectifs et les moyens ni, à l'inverse, que l'État serait trop généreux. La situation budgétaire du pays exige une juste affectation des moyens. Je ferai valoir cette analyse sur le terrain à la rencontre des différentes directions régionales de métropole et d'outre-mer.
Je suis convaincu qu'il m'est tout à fait possible d'être président à plein temps de l'Ademe et d'assumer mes mandats locaux de maire et de président d'agglomération, sous réserve de procéder à l'ajustement nécessaire pour prévenir les conflits d'intérêts. Je ne pourrais plus et je ne devrais plus avoir à connaître d'aucun dossier carolomacérien ou ardennais. Le Grand Est, précurseur en la matière, se prépare à signer avec l'Ademe une convention de délégation de moyens du fonds Chaleur, en application de la « loi 3DS ». Elle doit être examinée demain en séance plénière au conseil régional, et je peux vous annoncer que, par prudence, je me mettrai en retrait. Je suis persuadé que c'est une chance de rester élu local en devenant président de l'Ademe et de pouvoir faire le lien entre les deux. Cela permettra d'entendre les difficultés dans lesquelles se débattent parfois nos collègues élus locaux. Dans le même temps, une organisation simple doit permettre d'éviter que les décisions du président de l'Ademe ne soient sujettes au moindre soupçon de partialité.
Madame Violland, j'ai subi récemment une courte hospitalisation mais j'ai une santé de fer. Je vous remercie de votre sollicitude. Je serai président de l'Ademe à plein temps et, sur mon temps personnel – un choix de vie d'ailleurs plus pénible pour les gens qui vivent avec moi que pour moi-même –, je continuerai à assumer mes fonctions locales. Je suis convaincu d'être pleinement capable de le faire, sans le moindre préjudice pour les missions qui pourraient m'être confiées par le Gouvernement après accord du Parlement.
Monsieur Thierry, le périmètre de l'Ademe s'est considérablement élargi. Si les moyens augmentent, je suis conscient qu'il s'agit d'un rattrapage permettant de retrouver les effectifs du début des années 2010. Le travail sur l'adéquation des besoins aux moyens que je souhaite mener très rapidement aboutira peut-être à des ajustements complémentaires.
Convenez que dans ma famille politique, je suis relativement libre. Surtout, les missions de l'Ademe ne sont pas sujettes à interprétation personnelle. Il s'agit d'appliquer les politiques de transition écologique de l'État et de soutenir une évaluation indépendante et objective de nature à éclairer les choix. Je crois être capable de mener à bien ces missions indépendamment de mes opinions personnelles, à l'instar de nombre de fonctionnaires. Quand on est au service de l'État, on est au service des politiques publiques qui sont conduites.
Madame Bassire, l'Ademe demeurera aux côtés des territoires d'outre-mer en matière de transition énergétique. Je pourrais étendre le propos aux déchets, domaine dans lequel les systèmes insulaires ont de plus grandes vulnérabilités que le territoire métropolitain. Consciente de cette situation, l'Ademe a réparti 54 personnes dans les différentes délégations régionales outre-mer et y apporte des moyens proportionnellement plus importants qu'en métropole. Les territoires d'outre-mer font ainsi l'objet d'une sorte de discrimination positive.
En vertu d'un partage des rôles, l'Agence nationale de l'habitat (Anah) est heureusement désignée comme l'opérateur de la transition écologique de l'habitat pour les particuliers. Néanmoins, dans la contractualisation avec les territoires, l'Ademe conserve une approche globale exigeante afin de privilégier les rénovations globales qui sont les plus aptes à améliorer l'efficacité énergétique.
Pour le développement de l'hydrogène, l'Agence dispose de moyens incitatifs propres et d'autres au titre du plan France 2030. Pour résoudre le paradoxe de la poule et de l'œuf – quand produire si l'on n'a pas d'usage ? Comment produire tout en développant les usages sur des périmètres bien définis ou dans le cadre de grands projets d'infrastructures ? –, nous souhaitons soutenir la constitution d'écosystèmes. Je ne reviens pas sur les avantages de l'hydrogène pour la stabilisation de notre mix énergétique.
Quant à l'association des citoyens, je ne sais pas si elle est une réalité, mais je ne vois pas pourquoi on ne pourrait impliquer massivement des associations citoyennes dans le fonctionnement d'un organisme aussi important que l'Ademe dont les missions doivent emporter l'adhésion de tous.