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Intervention de Yves Bréchet

Réunion du mardi 29 novembre 2022 à 20h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Yves Bréchet, ancien Haut-commissaire à l'énergie atomique :

Avant de vous répondre, je voudrais expliquer pourquoi la puissance du réacteur Astrid a été réduite. La réduction pouvait s'envisager comme une volonté de limiter les coûts, afin que le projet soit mieux accepté mais, en réalité, elle était due au fait que la simulation numérique, de neutronique et de thermo-hydraulique, avait permis de vérifier certaines hypothèses, sans qu'un grand réacteur ne soit nécessaire.

Il n'y a que dans les ministères où l'on croit que les études suffisent pour construire un réacteur. La technologie associée au réacteur suppose de bâtir un outil industriel adéquat, en particulier pour le sodium et la forge, car la cuve des réacteurs à neutrons rapides est en acier inox, non en acier noir. Il fallait donc construire un prototype, si l'on voulait aller dans cette direction.

Reposant sur le même principe que Phénix et Superphénix, Astrid comportait des innovations, notamment sur le cœur à vidange négative, les échangeurs ou les calculs de thermo-hydraulique – on ne s'était pas arrêté de réfléchir !

En mettant les choses en perspective, on voit d'abord que la France n'a pas de ressources en uranium. Elle doit les chercher dans d'autres pays, ce qui peut poser des problèmes s'il ne s'agit pas de pays amis comme le Canada ou l'Australie. Cette dépendance pose aussi des questions en matière de souveraineté. Certes, il faut peu d'uranium, mais vous risquez de le payer cher si le marché se tend car d'autres pays envisagent de construire de tels réacteurs.

Ensuite, la France manque de place pour stocker des déchets. Contrairement aux États-Unis, qui disposent de vastes déserts, elle n'a que quelques sites, comme Cigéo, dans la Haute-Marne. L'espace est une ressource rare, qu'il faut utiliser intelligemment. Il est donc dommage de stocker du plutonium, qui pourrait être utilisé comme combustible. Sans compter que si vous ne construisez pas de filière à neutrons rapides, les 300 000 tonnes d'uranium appauvri deviennent des déchets, qui doivent être stockés.

Il faut donc considérer la vision d'ensemble : décider de mettre fin à Astrid parce que l'on a arrêté Phénix et Superphénix ne relève pas d'une analyse approfondie du système. Ce n'est pas parce qu'on a fait deux fois des erreurs qu'il faut en faire une troisième fois !

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