Je ne pense pas pouvoir répondre à tout le monde ; toutefois, des convergences se dégagent sur plusieurs points.
D'abord, une inquiétude sur la mesure et l'évaluation de l'impact. Il existe tout de même un travail de l'Ademe sur lequel s'est fondé le Sénat pour élaborer sa proposition de loi, reprise dans le présent projet de loi. Il s'agit donc d'une démarche au long cours ; elle s'appuie sur des interactions avec l'Ademe, des expérimentations que nous avons lancées sous forme d'appels à projets, la proposition de loi sénatoriale qui a été adoptée à l'unanimité et la demande d'un cadre pour l'agrivoltaïsme, fermement formulée par plusieurs représentants des agriculteurs – chambres d'agriculture, FNSEA, Jeunes Agriculteurs – qui ont vu apparaître des projets qu'ils jugent mal proportionnés et de nature à fragiliser l'accès aux terres ainsi que notre souveraineté alimentaire.
J'en viens aux principes. Alors qu'il n'existe aucun garde-fou, nous voulons instaurer une régulation – c'est notre rôle. Les garde-fous que nous introduisons sont les suivants : la non-artificialisation des sols ; la conservation des fonctions écologiques et du pouvoir agronomique du sol ; le maintien d'une activité agricole significative ; la réversibilité totale des projets ; la capacité du préfet d'imposer la constitution de garanties financières pour permettre cette réversibilité ; l'avis systématique de la CDPENAF, auquel les chambres d'agriculture sont très attachées pour connaître l'ensemble des projets au lieu d'être mises devant le fait accompli – un sentiment que l'on retrouve souvent à propos du déploiement des énergies renouvelables : on n'est pas contre, mais on ne peut être pour un projet qui sort de nulle part sans concertation et dont la seule motivation est l'accès au foncier, sans réflexion concernant la planification, le raccordement ou l'impact sur le voisinage. Le dernier principe obligatoire est l'existence d'un service ajouté réel pour l'agriculteur.
La situation actuelle met tout le monde mal à l'aise, car il n'existe aucun cadre ni définition et les projets émergent sans accompagnement. Le projet de loi a notamment pour objectif de créer un cadre et une orientation afin de concilier activité agricole et production d'électricité photovoltaïque au service des agriculteurs.
Or l'évolution actuelle des technologies le permet dans la viticulture, l'arboriculture et commence à le faire dans le secteur des grandes cultures. Il est important de se nourrir de ces innovations.
Par ailleurs, dans les Pays de la Loire, une chambre d'agriculture a entrepris de recenser les terres classées comme agricoles qui ne sont pas productives – des friches. Cela a permis de dégager 1 000 hectares, ce qui n'est pas rien. Certains délaissés routiers – pas tous – peuvent aussi être concernés. L'enjeu est de mobiliser un foncier dégradé et de faible valeur pour ne pas avoir à utiliser du foncier à forte valeur. Cela répond à la question que les amendements soulèvent lorsqu'ils définissent ce qui peut être fait ou non sur les terres agricoles.
Voilà ce qui orientera l'avis du Gouvernement sur les différents amendements déposés à ce sujet. Nous faisons œuvre utile, puisque nous progressons en partant de rien, avec à l'esprit l'objectif de conciliation de la souveraineté énergétique et alimentaire et la volonté d'aider les agriculteurs par des compléments de revenu et des services additionnels. Nous avons intérêt à encourager les exploitations exemplaires comme celle qui a été citée.
Une petite précision : nous avons une PPE, dans le cadre de laquelle nous n'atteignons pas nos objectifs de production d'énergies renouvelables. S'il y a une chose dont nous sommes tous ici à peu près sûrs, c'est qu'il y a une marche à franchir et qu'elle est plutôt haute : la prochaine PPE ne révisera pas ces objectifs à la baisse. En effet, il nous faut compenser par des énergies bas-carbone les deux tiers de notre consommation d'énergie qui sont d'origine fossile, et nous en sommes très loin. Or, dans les quinze années qui viennent, les énergies renouvelables seront le seul levier pour y parvenir même en soutenant fortement le nucléaire, compte tenu du délai de développement de nouvelles installations nucléaires.