Intervention de Jacques Percebois

Réunion du mercredi 9 novembre 2022 à 14h05
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Jacques Percebois :

D'un point de vue personnel, je pense que l'on n'aurait pas dû fermer Fessenheim. Je crois que tout le monde convient désormais que c'était une erreur, qui soulève soit des regrets, soit des remords, c'est selon.

Vous avez évoqué, monsieur Dubois, des cas dans lesquels certains opérateurs profitent indûment de l'Arenh.

À l'origine, l'Arenh était une mesure de réciprocité. L'ouverture à la concurrence avait permis à EDF de prendre des parts de marché dans de nombreux pays étrangers, notamment limitrophes, à commencer par l'Allemagne et l'Italie. Or aucun opérateur ne pouvait entrer sur le marché français, parce que l'opérateur historique, EDF, y bénéficiait d'un avantage comparatif. Il fallait donc trouver un moyen pour que les concurrents puissent gagner des parts de marché. D'où la création de l'Arenh, le critère de son bon fonctionnement étant précisément que l'opérateur historique perde des parts de marché, puisqu'il les détenait toutes.

Par ailleurs, la logique de l'Arenh est très claire : il doit profiter au consommateur. D'après la loi, le fournisseur demande des droits Arenh sur le fondement de la consommation prévisible de ses clients et doit répercuter ensuite le tarif sur ceux-ci. Or il arrive que des opérateurs annoncent des volumes de consommation erronés. Ils peuvent se tromper, cela arrive, mais s'ils trichent, c'est une infraction. Il appartient à la CRE d'être vigilante et d'imposer un remboursement, assorti le cas échéant de pénalités.

Nous avons observé un autre type de fraude : un fournisseur demande et obtient des droits Arenh, puis se défait de ses clients et vend ses volumes Arenh sur le marché de gros. Ce n'est évidemment pas conforme à la logique de l'Arenh, qui doit en principe, je le répète, profiter aux consommateurs résidant en France.

Il ne s'agit pas de choisir entre l'État ou le marché. Il faut les deux, toute la question étant de doser. Il existe des monopoles publics intégrés qui sont efficaces. Nous en avions en France, EDF étant souvent cité en exemple. Mais il y avait aussi des monopoles publics inefficaces, notamment au Royaume-Uni, ce qui explique pourquoi les Britanniques ont été à la pointe de la libéralisation. De même, certains États fédérés américains ont souhaité l'ouverture à la concurrence pour contraindre des opérateurs en situation de monopole à gagner en efficacité.

Il faut un système hybride. Je ne suis pas favorable à une sortie du marché européen. Si on le souhaite, il est possible d'instituer un acheteur unique qui soit compatible avec le marché et avec des contrats à long terme. Le problème est ensuite l'équilibre entre les deux.

J'en viens au contentieux sur les concessions hydrauliques. Si l'on avait ouvert le secteur à la concurrence, comme il en était question, de nombreux opérateurs étrangers auraient obtenu des concessions en France. Selon moi, c'est une très bonne chose que l'ouverture à la concurrence n'ait pas eu lieu. En l'espèce, l'État a joué son rôle en préservant l'intérêt national. Qui plus est, l'hydraulique est spécifique : il sert à produire de l'électricité, mais est destiné à de nombreux autres usages.

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