L'énergie n'est pas vraiment un bien comme un autre. Elle est un produit stratégique, indispensable à toute activité humaine. Elle apparaît aussi spontanément comme relevant du service public, à cette nuance près que, si l'électricité a effectivement été longtemps confiée à une entreprise publique en situation de monopole, ce n'est pas le cas pour le pétrole.
On a pensé que les mécanismes du marché permettraient d'orienter les choix de long terme, mais on a décidé de nombreuses exceptions au marché, s'agissant notamment des énergies renouvelables, qui n'étaient pas rentables au prix normal : on les a aidées avec un mécanisme de prix garanti sur longue période, ce qui au demeurant a accéléré leur développement.
L'ouverture à la concurrence supposait de pénaliser un peu l'opérateur historique pour permettre aux nouveaux opérateurs d'entrer sur le marché. Tel était l'objet de l'Arenh. Il était assorti de la condition, pour eux, d'investir, ce qu'ils n'ont pas vraiment fait.
Par ailleurs, les centrales électriques, en particulier nucléaires, sont des investissements à très long terme. Leur durée de vie peut atteindre quarante, cinquante ou soixante ans, voire, comme certaines centrales américaines, quatre-vingts ans. Dans ce cadre, ni les prix du marché ni les prix à terme ne peuvent orienter les choix. La puissance publique doit donc intervenir. Elle le fait dans tous les pays, même les plus libéraux, en aidant les entreprises à financer leurs recherches et à investir.
Comme le marché ne suffit pas, un marché de capacité, que l'on pourrait qualifier de secondaire, a été ouvert. La rémunération du kilowattheure n'étant pas une incitation suffisante pour investir, il s'agit de rémunérer le kilowatt ; l'un rémunère l'énergie, l'autre la puissance. Dans ces conditions, l'État doit reprendre la main : c'est lui qui doit orienter le choix du mix électrique. Le marché a l'avantage de permettre la concurrence, donc d'inciter à l'efficience et à l'innovation, mais s'agissant des choix de long terme, la puissance publique a tout son rôle à jouer. Au demeurant, l'histoire de la production d'énergie le démontre : au sortir de la seconde guerre mondiale, l'État est massivement intervenu, en France et ailleurs. Les nationalisations ont permis de reconstruire les économies, quitte à rétrocéder certains secteurs ultérieurement.
La puissance publique, dans le domaine de l'énergie, assure la sécurité et le respect des principes du service public.