Dans un souci de justice sociale, nous vous proposons de créer un corps de fonctionnaires pour les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) tout en renforçant l'inclusion afin de faire du droit à l'éducation un droit universel et de rendre l'école accessible à tous les élèves.
Les professionnels de la communauté éducative sont unanimes : sans les AESH, les élèves en situation de handicap ne peuvent pas être scolarisés dans de bonnes conditions. Encore faut-il que ces AESH soient formés pour appréhender la multiplicité des handicaps et les spécificités propres à chaque degré d'enseignement afin de proposer aux élèves le parcours pédagogique le plus adapté.
La création d'un corps de fonctionnaires permettra de sortir ces professionnels de la précarité. Ces accompagnants, des femmes pour 92 % d'entre eux, exercent des missions essentielles, mais souffrent d'un manque de reconnaissance que traduit un salaire mensuel de seulement 800 euros en moyenne. Nous souhaitons rendre sa dignité à ce métier en valorisant les compétences que les AESH ont développées afin de leur permettre de construire un parcours professionnel de qualité et émancipateur.
Dix-sept années se sont écoulées depuis la promulgation de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Pourtant, les parents d'enfants en situation de handicap sont encore trop nombreux à témoigner des difficultés qu'ils rencontrent pour scolariser leur enfant du fait d'un manque d'AESH. Les rapports de la Défenseure des droits et de la médiatrice de l'Éducation nationale et de l'enseignement supérieur sont accablants : dans 20 % des cas, ils sont saisis pour cette raison.
Le Gouvernement prend tellement ce sujet à cœur qu'il n'a pas jugé bon de se doter des outils qui lui auraient permis d'analyser objectivement et en toute transparence la situation. Pas moins de 44 % des personnels de direction des établissements interrogés par l'Unsa déclarent qu'il leur manque au moins un AESH. Le Gouvernement s'est précipité pour annoncer la création de 4 000 nouveaux postes à la rentrée mais le problème reste entier car rien ne dit que ces postes seront pourvus. La Défenseure des droits l'a souligné : les difficultés de recrutement découlent du manque d'attractivité de ce métier.
En effet, les AESH remplissent tous les critères de la précarité au travail. Leur rémunération est ridiculement faible, de l'ordre de 800 euros par mois, car seules leurs heures de présence en classe sont prises en compte, au mépris du temps passé à préparer l'accompagnement ou à échanger avec les familles et les enseignants. Depuis la réforme des pôles inclusifs d'accompagnement localisé (Pial), qui servent davantage à gérer la pénurie qu'à améliorer l'accompagnement des enfants ou les conditions de travail des AESH, ces derniers accompagnent de plus en plus d'enfants, jusqu'à dix par semaine. Du fait de la mutualisation des besoins au sein des Pial, les AESH enchaînent les déplacements entre différents établissements, ce qui augmente leurs frais. Les formations qu'ils reçoivent ne suffisent pas pour leur permettre d'accompagner au mieux les élèves dont les handicaps et les niveaux scolaires peuvent être très différents. Ils sont réduits à se former par leurs propres moyens.
Pour toutes ces raisons, nous vous proposons de refondre le statut des AESH, tant au niveau du recrutement, de la formation, de la rémunération que du temps de travail puisque nous souhaitons leur offrir un emploi rémunéré à temps complet pour 24 heures de travail effectif. La création d'un corps de fonctionnaires présente de nombreux avantages. Lui seul permettra de garantir une présence pérenne d'effectifs, à même de répondre au nombre croissant des notifications des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et aux besoins des élèves. En facilitant l'accès à la formation initiale et continue, ce nouveau statut offrira aux AESH les moyens de renforcer leurs compétences. Il leur assurera également une rémunération digne de leur travail, en prenant en compte les heures de préparation et les échanges nécessaires au suivi pédagogique de l'enfant. Leurs compétences ainsi reconnues, les AESH pourront développer un projet professionnel émancipateur et se servir des passerelles qui existent au sein de l'Éducation nationale pour exercer d'autres métiers.
Certains considèrent que la transformation des contrats de travail en CDI, la revalorisation de la rémunération des AESH de 10 % ou le bénéfice des primes REP et REP + (réseau d'éducation prioritaire et réseau d'éducation prioritaire renforcé) seraient des mesures amplement suffisantes. Soyons sérieux ! Leurs primes REP, dont le calcul dépend du nombre d'heures travaillées, sont très inférieures à celles que perçoivent leurs collègues au sein de l'Éducation nationale et la revalorisation de 10 % suit celle qui a été appliquée aux enseignants. C'est mieux que rien mais cela ne permettra pas de résoudre les problèmes. Enfin, la généralisation du CDI n'offrira pas davantage de formations, ne valorisera pas les compétences, n'augmentera pas le salaire et ne rémunérera pas le travail invisible. Le Gouvernement en est sans doute conscient puisque seuls 17 % des AESH sont en CDI. S'il s'agissait là de la recette miracle pour rendre ce métier attractif, nous le saurions.
Par ailleurs, il semblerait que l'on envisage de porter le temps de travail des AESH à 35 heures en demandant aux collectivités de les recruter lors des temps périscolaires. Ne confondons pas temps de travail rémunéré et temps de travail réel ! Surtout, ce n'est pas le même métier et les AESH ne sont pas les couteaux suisses de l'Éducation nationale, sans parler du risque d'épuisement professionnel. Plutôt que de reconnaître les spécificités et la valeur du métier d'AESH en leur accordant un statut, vous usez d'un stratagème qui fera perdre tout son sens à leur métier et multipliera leurs missions. Nous sommes bien loin de l'école inclusive à laquelle nous aspirons.
Nous devons agir pour valoriser les AESH et reconnaître leur rôle indispensable à l'école inclusive. La création d'un corps d'AESH serait une première étape, qui ne nous exonérera pas de revoir, ensuite, l'implication des autres personnels de l'Éducation nationale, les formations, l'accessibilité des locaux et des supports d'enseignement.
Soyons à la hauteur de la promesse d'égalité de la loi de 2005 et de l'école républicaine.