S'agissant d'Israël, sachez que nous venons de contribuer à un accord entre le Liban et Israël sur la frontière maritime, qui permet de libérer des ressources gazières du côté libanais. Nos relations avec l'État d'Israël sont très bonnes. Les États-Unis ont piloté diplomatiquement avec la France cette négociation mais nous avons un rôle à jouer puisque nous avons nous-mêmes signé un accord cette semaine pour permettre une mise en œuvre positive de cet accord entre Israël et le Liban. Nous sommes investisseurs en Israël ; nous y avons des usines de batteries depuis que nous avons racheté Saft et nous y investissons également dans le solaire.
Avons-nous eu un souci en Iran ? Oui, vous le savez. Nous avons renoncé au projet en Iran parce que les sanctions américaines s'appliquaient et que l'Union européenne n'avait pas les moyens de s'y opposer. En 1995, lors des précédents projets en Iran, elle s'y était opposée ; en 2017-2018, elle ne s'y est pas opposée. Nous avons donc renoncé au projet iranien. C'est le seul cas que je connaisse.
Aujourd'hui, 82 pays sont sous sanctions extraterritoriales américaines ; ils étaient 10 il y a dix ans. C'est donc effectivement devenu une question à prendre en compte pour des sociétés internationales qui doivent respecter toutes ces règles, parce que nous avons aussi des intérêts aux États-Unis. C'est un sujet de contraintes, mais c'est la réalité de notre monde.
J'ai répondu sur l'Iran, Israël et les États-Unis. Je pense avoir répondu sur Wagner. J'en viens aux questions de monsieur Ruffin, qui m'ont rappelé un point auquel je n'ai pas répondu.
On m'a dit que j'avais affirmé que si nous partions d'Ouganda, une autre société réaliserait le projet. C'est bien le cas puisque, sur le projet ougandais, notre groupe n'est pas seul impliqué. Nous avons pour partenaire la China national offshore oil corporation (CNOOC), une société d'État chinoise, qui possède des parts à peu près équivalentes aux nôtres. Nous nous sommes battus pendant deux ans pour garder le contrôle de ce projet parce que cette société voulait devenir l'opérateur à notre place.
TotalEnergies peut partir. En vous écoutant, c'est ce que nous devons faire. Mais sachez que le projet se réalisera de toute manière, parce que l'Ouganda le veut et parce que la Tanzanie le veut. L'Ouganda et la Tanzanie sont respectivement les 159ème et 160ème pays les plus pauvres. Sommes-nous prêts à leur demander de laisser leurs ressources dans la terre et à leur apporter des milliards en compensation ? Leur avons-nous fait cette proposition ou, puisque j'ai été accusé de néocolonialisme, ne nous comportons-nous pas en néocolonialistes en leur demandant de pas exploiter leurs ressources naturelles ?
Pour ma part, je n'ai pas entendu les autorités européennes proposer aux autorités ougandaises et tanzaniennes de laisser ce pétrole et de compenser la totalité des revenus que ces pays pourraient en tirer. Nous-mêmes avons décidé qu'une part importante des revenus que nous en tirerions serait réinvestie dans l'énergie renouvelable de ces pays afin de déployer notre propre modèle dans ces pays où nous extrayons des ressources, pour leur bénéfice et celui de leurs populations.
Vous me dites, Monsieur Ruffin, qu'il y a des policiers. Je vais tout de même dire la vérité sur ce qui s'est passé. Un certain nombre de parlementaires européens nous ont demandé de pouvoir se rendre en Ouganda. Nous les avons aidés. Ils se sont déplacés totalement librement aux mois de juillet et d'août en Ouganda. Cela ne me pose pas de problème. Nous avons ouvert les portes du projet. De nombreux journalistes y sont allés, je l'avais proposé au mois de mai. Si vous voulez y aller, allez-y, et vous me direz si vous voyez 100 000 personnes menottées et menacées. Si cela est vrai, je suis prêt à arrêter, mais ce n'est pas vrai.
Sur le dossier ougandais, que nous assumons et qui n'est pas un sujet simple, je vous ai donné les chiffres. Nous ferons tout ce que nous devons faire, au mieux dans l'intérêt de ces populations. C'est un sujet complexe ; ces projets terrestres sont plus compliqués et nous rencontrerons les mêmes problématiques lorsque nous voudrons construire des centrales solaires. Exactement les mêmes parce qu'une centrale solaire, c'est une emprise au sol ! Ce problème d'occupation de l'espace commence à apparaître dans tous les pays.
Voilà ce que je pense, mais peut-être allez-vous réussir à me convaincre ? Dans ce cas, je devrais alors vendre mes parts à la société d'État chinoise, car ce projet est lancé, et nos amis chinois ont un droit de préemption. C'est la règle qui s'applique entre sociétés conjointes, et je bénéficie du même droit de préemption s'ils s'en vont.
Je regrette profondément que l'on en arrive aujourd'hui à ces affrontements parce que je crois profondément à la bonne volonté de nos équipes sur le terrain, qui font ce qu'il faut. Je signale au passage que, sur ce dossier, nous avons invité des ONG, qui ont fourni des rapports d'audit que nous avons rendus publics. Nous avons répondu à chacune des recommandations qui ont été formulées, nous les avons mises en œuvre de façon à nous améliorer. Je ne dis pas que nous sommes parfaits. En réalité, ce dossier ouvre deux débats. Le premier, que je comprends, est de savoir s'il faut produire de nouveaux gisements pétroliers ; je vous ai expliqué les raisons pour lesquelles, dans les prochaines années, il faut le faire. Le gisement ougandais sera épuisé dans quinze ans. Nous ne serons pas en 2050. Donc, nous pensons qu'il faut continuer à exploiter ce gisement pétrolier tout en continuant à investir davantage dans les énergies décarbonnées parce qu'il faut assurer l'énergie d'aujourd'hui.
Le second est que TotalEnergies a un contrat avec ces États et, dans notre entreprise, nous respectons les contrats que nous passons avec tous les États qui nous font confiance.