Je ne suis pas favorable au gel des loyers. Les auditions de vendredi dernier ont été riches et nous ont fourni de nombreux arguments contre une telle mesure.
Nous avons retenu un taux nettement inférieur à l'inflation prévue sur l'année qui vient, mais qui est tout de même positif, de manière à faire porter l'effort à la fois sur les bailleurs et sur les locataires de manière proportionnée. Certains estiment que ce n'est pas satisfaisant, mais il faut trouver un équilibre. À cet égard, l'État prend toute sa part, en augmentant les APL afin de protéger les plus faibles. Monsieur Jumel, cette hausse sera opérée par décret, et son incidence sera bien plus positive que ne le laissent penser les auditions. J'invite chacun d'entre vous à lire l'étude d'impact, qui présente des tableaux très clairs à ce sujet. De ce point de vue, il serait regrettable de ne pas revaloriser l'IRL, car le calcul des APL, déjà très complexe, est fondé en grande partie sur l'IRL : lorsque l'IRL augmente, les APL augmentent également – et inversement.
Par ailleurs, un point est souvent passé sous silence : à partir du 25 août 2022, c'est-à-dire dans un mois et demi, conformément à l'article 159 de la loi « climat et résilience », le loyer des logements classés F et G eu égard à leur diagnostic de performance énergétique (DPE) sera gelé en France hexagonale. Cela représente tout de même un quart du parc locatif. Il s'agit d'un gel indirect, mais c'est bel et bien un gel. Du reste, il déplaît à de nombreux propriétaires. On peut comprendre leurs difficultés, mais c'est conforme aux objectifs que nous avons adoptés, et j'assume d'avoir voté cette mesure.
Je me sens tout à fait au clair. Nous sommes dans le fameux « en même temps ». C'est une ligne parfois difficile à tenir, mais mes collègues et moi l'assumons.
En outre, il ressort des auditions que tous les bailleurs ne répercutent pas la hausse pleine de l'IRL sur leurs locataires, tant dans le parc public que dans le parc privé. La Fédération des offices publics de l'habitat a ainsi indiqué que, le 1er janvier prochain, certains bailleurs ne l'appliqueraient vraisemblablement pas. Nous avons introduit cette possibilité dans la loi 3DS – loi relative à la différenciation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.
Vous évoquez les 50 % de logements privés détenus par de gros propriétaires, mais l'autre moitié appartient à de petits propriétaires – je rejoins M. Bazin sur ce point, le terme « petit » n'ayant rien de péjoratif. Les propriétaires n'augmentent pas toujours le loyer. Je l'ai moi-même constaté lorsque j'étais locataire à Bordeaux au cours de mes études.
Après deux années d'augmentation très faible, la hausse des loyers peut être nécessaire pour préserver l'équilibre financier des bailleurs sociaux. Ils nous l'ont dit et cela figure dans l'étude d'impact. Les recettes locatives des offices publics et des entreprises sociales de l'habitat constituent leurs ressources futures nécessaires aux investissements ; cela fait partie de leur modèle économique. Il y a, à mon sens, un équilibre entre, d'un côté, la limitation à 3,5 % de l'augmentation de l'IRL et, de l'autre, l'augmentation de 3,5 % des APL. L'indice de référence a effectivement été refondé en 2008 précisément pour éviter les problèmes posés par la précédente mouture, à savoir des hausses trop fortes ou abruptes des loyers.
En imposant un gel des loyers, on prendrait le risque de susciter leur décrochage par rapport à la réalité économique sous-jacente, ce qui pourrait pénaliser tout un segment de la population. Ce n'est pas tout blanc ou tout noir. Les dispositions du projet de loi se complètent et sont parfaitement raisonnables.
Lors de mes échanges avec les administrations, je leur ai demandé d'où venaient les mesures qui figurent dans le présent texte. Elles ne sortent pas du chapeau. Le Gouvernement a passé commande à tous les ministères et à tous les fonctionnaires : il leur a demandé quelles mesures d'urgence pourraient être prises dans leur périmètre respectif pour que la période inflationniste ne grève pas le pouvoir d'achat. Ce sont donc les fonctionnaires qui ont proposé ces mesures. La DGCCRF nous l'a confirmé lorsque nous l'avons auditionnée vendredi dernier. J'ai tenu à vérifier ce point et je le mentionnerai dans le rapport.