Mes pensées vont d'abord à ses proches et ses collègues, en particulier à celle qui a été séquestrée avec lui et a subi cette scène de violence.
C'est l'occasion de rappeler que l'impôt est indispensable à un État et à ses mécanismes de solidarité, et que nous devons toujours faire en sorte d'assurer le consentement à l'impôt et de protéger au mieux les agents chargés de son recouvrement.
S'agissant du dernier projet de loi de finances rectificative de l'année, j'aimerais tout d'abord souligner que, contrairement à ce que les multiples recours au 49.3 par le Gouvernement peuvent laisser penser, notre assemblée se révèle manifestement tout à fait capable d'aller au bout de l'examen d'un texte budgétaire. Certes, le PLFR n'a pas l'importance politique du projet de loi de finances (PLF) ou du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), mais il n'en reste pas moins un texte budgétaire, qui a pu être modifié par les groupes d'opposition et amélioré grâce à leurs diverses contributions. Les groupes ont ensuite choisi pour certains de voter pour l'adoption du texte, d'autres contre, d'autres encore de s'abstenir. Je constate l'importance que la qualité du débat et sa prise en compte ont revêtue dans ces décisions. Voilà une manière de faire bien plus conforme et constructive – vous en conviendrez – pour notre démocratie, le débat parlementaire et l'intérêt général.
Malheureusement, le contraste avec la méthode employée sur les autres textes budgétaires n'en est que plus choquant : quatre 49.3 en première lecture, un cinquième intervenu à peine quelques heures après le début des débats sur le PLFSS, un sixième probablement à venir lors de la nouvelle lecture du PLF – vu la logique autoritaire du Gouvernement, je l'imagine quasiment inévitable, puisque le Sénat a intelligemment décidé de revenir sur la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Jour après jour, vous continuez d'appliquer des méthodes antidémocratiques, vous interdisant en outre au passage de voir vos propositions améliorées par les oppositions : c'est d'autant plus dommageable que vos projets de lois revêtent de sacrées marges de progrès – et encore, mes propos sont modérés !
Si le PLFR revêt une importance – et donc une capacité de nuisance – moindre, nous regrettons avant tout qu'il n'ait pas été l'occasion de mieux répondre aux besoins essentiels des Français. Alors qu'il faudrait créer en urgence un choc de la demande, c'est-à-dire améliorer les revenus pérennes des salariés grâce à une redistribution de la plus-value, le Gouvernement continue, de projet de loi de finances en projet de loi de finances rectificative, de s'y refuser. Au contraire, en adoptant une nouvelle réforme du chômage en pleine crise, il prend même une décision inique, source d'une double peine pour des travailleurs déjà privés d'emploi, et que l'on prive en outre de revenus pourtant tirés du travail. Ces choix idéologiques majeurs vont de pair avec l'évitement de certains sujets centraux du moment, dont la gravité et l'urgence auraient dû entraîner la prise en compte dans les différents PLFR tout au long de l'année. Je pense par exemple à la dramatique question du logement, mais aussi à celle des transports – j'ai une pensée particulière pour les Franciliens, qui, non contents de devoir composer avec un système de transports publics infernal et totalement saturé, sont, face à cette situation, laissés sans autre issue ni perspective qu'une augmentation des prix. Aucun des collègues qui utilisent les transports en commun ne me contredira.
Pour en venir au texte, il faut lui reconnaître quelques qualités. En effet, certaines des mesures qu'il contient vont dans le bon sens, comme les aides à destination des universités et des armées pour faire face à l'augmentation des prix de l'énergie, ou encore les fonds débloqués pour pallier les conséquences des crises agricoles. D'autres mesures, qui me laissent perplexes en termes de méthode, restent mieux que rien en l'absence de mesures plus adaptées et satisfaisantes à long terme : je pense au chèque énergie ou à la microristourne sur le carburant, auxquels j'aurais préféré un blocage des prix et une véritable taxation des profiteurs de crise.
Enfin, je note que les travaux de l'Assemblée et du Sénat ont permis d'améliorer notablement le texte, que ce soit grâce à l'adoption, en première lecture, d'amendements de la NUPES relatifs à l'augmentation du budget consacré à l'aide alimentaire, à la possibilité pour les communes de revaloriser les revenus de leur personnel soignant et à l'aide aux ménages se chauffant au bois, ou aux apports significatifs du Sénat en matière d'insonorisation aux abords des aéroports, de lutte contre les fuites d'eau ou encore d'amélioration de l'état des ponts et du réseau routier local.
Comme je l'évoquais en introduction, alors qu'on voudrait nous faire penser que le Parlement et ses débats constituent un détail démocratique ou une perte de temps, je souligne l'intérêt du travail collectivement accompli sur ce texte, et formule donc le souhait que ces travaux servent de contre-exemple et mettent le Gouvernement face à la réalité : ce n'est pas l'Assemblée qui fait de l'obstruction, mais l'exécutif qui est excessivement autoritaire.