Intervention de Jean-Marc Jancovici

Réunion du mercredi 2 novembre 2022 à 15h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Jean-Marc Jancovici, Professeur à Mines Paris :

Je me méfie beaucoup du fait que je vois midi à ma porte, comme beaucoup de personnes. Les sondages sur les Français et l'énergie montrent que ce qui compte beaucoup est le prix et que d'autres éléments sont perçus comme beaucoup moins importants.

Je constate quand même que les systèmes énergétiques vivent sur un pas de temps qui n'est pas celui de la démocratie. Le principal problème des débats sur l'énergie est qu'ils portent toujours sur des pas de temps d'un ordre de grandeur inférieur à ce qu'il faudrait regarder. Nous nous intéressons à ce que nous allons faire dans les années à venir alors qu'il faudrait que nous disposions d'un plan un peu construit sur les décennies à venir et que nous n'y revenions pas régulièrement.

Il faut parvenir à créer un consensus dans la population — car seul ce consensus transcende les alternances électorales — sur la façon dont il faut s'organiser et ne pas trop dévier, en espérant que le coup d'essai soit un coup de maître. Lorsque nous sommes dans une course contre la montre à la fois avec le changement climatique et l'épuisement de ce qui a fait la civilisation moderne, nous n'aurons pas le droit à cinquante essais-erreurs. Nous payerons d'ailleurs le prix d'une partie des essais - erreurs faites dans le passé.

Je ne suis pas en mesure d'expliquer très exactement ce qu'il s'est passé durant les vingt dernières années. Je continue à chercher, à essayer de me construire une histoire et je ne suis pas au bout de ma quête.

Il y a eu des épisodes isolés que nous sommes capables de reproduire. Par exemple, il ne fait absolument aucun doute dans mon esprit que l'objectif de 50 % de nucléaire et la fermeture de Fessenheim ont été décidés car François Hollande souhaitait conclure un accord avec Les Verts. La situation était similaire concernant Lionel Jospin et Superphénix.

Cependant, il m'est très difficile d'expliquer certains autres éléments. Par exemple, je ne peux pas expliquer pourquoi le pétrole est si absent du débat public en France. Le pic de production du pétrole n'intéresse personne. Encore aujourd'hui, quand vous expliquez que nous sommes déjà entrés en décrue subie d'approvisionnement pétrolier, les gens sont extrêmement surpris. Nous avons un peu commencé à parler du gaz en raison des menaces de Vladimir Poutine. Il existe donc une focalisation sur l'électricité dans le débat public qui ne vous aura pas échappé, notamment sur un antagonisme entre nucléaire et énergies renouvelables électriques qui fait les choux gras de la presse.

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