Intervention de Nathalie Ortar

Réunion du mercredi 2 novembre 2022 à 15h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Nathalie Ortar, Anthropologue de l'énergie, Directrice de recherche au Ministère de la Transition Écologique au LAET (laboratoire aménagement économie des transports), ENTPE/Université de Lyon :

Je vous renvoie à nouveau à la thèse de Renan Viguié, qui a étudié l'évolution du chauffage au long du XXe siècle, en travaillant notamment auprès des entreprises. Il montre que si le chauffage électrique a peu de succès en France, c'est d'abord parce qu'il nécessite une isolation thermique des bâtiments suffisante pour être efficace. L'usage de l'électricité pour le chauffage est réservé aux logements neufs répondant à des normes d'isolation. Le second facteur explicatif est le coût toujours élevé du chauffage électrique. Par ailleurs, l'absence de poursuite du programme nucléaire a pour cause l'insuffisance de la demande justifiant la création de nouvelles centrales. L'énergie nucléaire est donc poussée par les gouvernements, mais pas totalement, car ils veillent à une répartition du mix énergétique afin d'éviter la dépendance envers une seule énergie. En outre, on observe une tension permanente entre consommation et économies, entre consommation et prix. Des enquêtes menées auprès de citoyens ont montré que le chauffage électrique est généralement associé à de mauvais souvenirs d'enfance, lorsque les intérieurs étaient très mal chauffés. Il conserve mauvaise presse malgré les nouveaux types de chauffages créés.

Ainsi, votre vision d'ensemble du mix énergétique doit englober la perception des usages et des sensations provoquées par ces usages. Le confort est associé à un ensemble de sensations. Si ce confort n'est pas ressenti, l'usage ne suivra pas. Ce constat vaut également pour les choix de nos futures mobilités, comme en matière thermique.

Les historiens ont largement documenté les réticences répétées sur les différents types d'énergies renouvelables, et notamment l'éolien en France. Elles ont été alimentées autant par des campagnes de désinformation puissantes et organisées que par les ambivalences des gouvernements successifs. L'information est abondante, mais celle qui circule est celle diffusée par l'entourage proche, c'est-à-dire la rumeur. Ainsi, le mix énergétique n'a jamais laissé au renouvelable une part au niveau des objectifs annoncés par les gouvernements successifs.

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