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...sance. Quel sens aurait la reconnaissance d'un préjudice sans la mise en œuvre de sa réparation ? Reconnaître et réparer, ce n'est ni effacer ni se rouler dans la repentance. C'est réaffirmer que nous voulons vivre ensemble, c'est mesurer le chemin parcouru à pas trop lents ; c'est aussi dire, par-delà nos frontières, que l'homosexualité n'a rien à faire dans un code pénal et que lutter contre sa répression est un combat universel.
« c'est bien, en dernière analyse, de culture et de liberté qu'il s'agit. C'est dire que ce débat est politique par excellence. » Justes et vrais en 1981, les mots de Gisèle Halimi le demeurent en 2024. Les historiens nous disent souvent que la répression de l'homosexualité en France reste très méconnue du grand public, que les recherches sont insuffisantes et seront longues à conduire. Je vois là un argument qui conforte cette proposition de loi. Ils mettent sous nos yeux une autre évidence : l'histoire des homosexuels en France s'écrit d'abord et surtout au moyen des archives policières et judiciaires. Ce n'est évidemment pas un hasard ; c'est s...
...ublics et la police ont fait un usage massif des délits de vagabondage, d'outrage public et d'attentat à la pudeur afin de pourchasser et de condamner des milliers d'homosexuels. Celles et ceux qui auraient souhaité un travail de reconnaissance remontant au-delà de 1942 ont donc historiquement raison. En cela, la loi du 6 août 1942 ne constitue pas, à proprement parler, un tournant en matière de répression des homosexuels. Le gouvernement Daladier avait même planché sur des mesures de répression qui sont restées lettre morte en raison de la guerre. Il n'en demeure pas moins que c'est bien la loi de 1942 qui a codifié la pénalisation, institutionnalisé une pratique et officialisé une politique. Elle est le point de départ incontestable d'une sorte d'homophobie d'État.
...un jour, je pourrais vivre heureux – comme on ne choisit pas d'être hétérosexuel, on ne choisit pas d'être homosexuel. Mais avant cette date, combien de vies brisées ? Le 6 août 1942, le régime de Vichy modifie l'article 334 du code pénal pour introduire une distinction discriminatoire entre les hétérosexuels et les homosexuels. Cette modification législative sert alors de base juridique pour la répression policière et judiciaire des personnes homosexuelles ; elle donne lieu à la constitution de fichiers de police, à des condamnations judiciaires et à des dénonciations aux forces d'occupation ennemies. Les condamnations sont publiées dans les journaux, entraînant un véritable opprobre social et s'accompagnant de licenciements abusifs, de vies sociales ruinées, de déshonneur pour les familles voire ...
... le Canada, l'Allemagne, l'Irlande, la Nouvelle-Zélande, l'Espagne et le Royaume-Uni avaient déjà adopté des mesures de réparation en faveur des homosexuels. La réparation peut prendre plusieurs formes : excuses de l'État à la communauté LGBTQ pour les fautes commises dans le passé et promesse de faire mieux à l'avenir – M. le ministre le rappelait à l'instant –, commémoration des victimes de la répression étatique des citoyens homosexuels, une grâce accordée à toute personne condamnée en vertu de lois criminalisant l'orientation de sexe ou de genre, compensation financière pour les salaires ou les pensions perdus en raison d'un séjour en prison ou dans un établissement psychiatrique pour cause d'infraction homosexuelle, comme c'est le cas en Espagne depuis 2009 et en Allemagne depuis 2016. La pro...
...t apparentés se félicite que le groupe Socialiste, écologiste et républicain du Sénat ait pris l'initiative de cette proposition de loi portant réparation des personnes condamnées pour homosexualité entre 1942 et 1982. Je salue à cet égard la présence dans les tribunes du sénateur Hussein Bourgi. Ce texte présente un intérêt symbolique majeur et essentiel : celui de reconnaître officiellement la répression judiciaire dont ont été victimes les personnes homosexuelles. La France a été pionnière en dépénalisant l'homosexualité en 1791, au lendemain de la Révolution française, devenant ainsi l'un des pays les plus progressistes en la matière. En août 1942, le régime de Vichy rétablissait une discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et battait en brèche cette avancée essentielle en instaurant ...
...a légitimé la persécution et l'arrestation de dizaines de milliers d'hommes. Quelques centaines d'entre eux furent déportés depuis la France vers les camps de rééducation et de concentration. Néanmoins, il y a bien une continuité juridique entre le régime de Vichy et les lois en vigueur sous la IV
La criminalisation de l'homosexualité, due à Vichy et maintenue à la Libération, compte au nombre des heures sombres de notre histoire. Nous parlons d'années de discriminations : des actions qui constituent des fautes dont l'État et la République sont responsables. Permettez-moi de rappeler d'emblée que s'il est possible, en France, de parler au passé pour évoquer cette répression légale et judiciaire orchestrée par l'État, il existe encore de trop nombreux pays où cette répression est la norme. À tout hasard, je pourrais citer le Qatar, que notre pays et notre assemblée ont accueilli il y a peu avec tous les honneurs de la République.
...portant de parler de l'actualité, j'en reviens au passé et au texte que nous examinons ce soir. Il va dans le bon sens de l'histoire, ce qui n'est pas toujours le cas – l'histoire peut aussi avoir un mauvais sens. Après l'amnistie de 1981, après la dépénalisation de l'homosexualité en 1982 grâce au combat de Robert Badinter et Gisèle Halimi, il reconnaît la responsabilité de notre pays dans cette répression pénale. On se demande toujours quelle peut être et quelle doit être la place du Parlement dans la politique mémorielle. À propos de cette loi qui veut dire ce qu'a été le passé, les citoyens qui nous écoutent pourraient, à juste titre, se demander : pour quoi faire ? La réponse a une portée qui va au-delà du symbole : il me paraît essentiel que l'État ne détourne plus le regard de ses propres fa...
dont les vies et les désirs furent brisés et meurtris. Voici, enfin, une loi pour réparer l'injustice d'une homophobie institutionnelle, structurelle et assumée – une véritable homophobie d'État –, d'une haine qui a traversé le XIX
Il faut également s'atteler à assurer une réparation collective, laquelle passe par la recherche sur la répression, les fiches roses des préfectures et les discriminations, ainsi que par la création de lieux de mémoire et par le soutien apporté au travail de recueil des archives LGBT. Notre histoire est complexe. De la discrimination à l'indifférence, nous sommes passés par la dépénalisation. Nous n'oublions pas nos tortionnaires, nos morts du sida – que certains, sur ces bancs, voulaient enfermer dans des «...
Enfin, l'adoption – à une très large majorité, je l'espère – de cette proposition de loi ne doit pas nous faire perdre de vue la nécessité de faire vivre cette mémoire. Nous savons, en particulier, la difficulté à connaître précisément l'ampleur de la répression judiciaire. Aussi faudra-t-il, notamment par une véritable politique de mémoire, encourager et financer les programmes de recherche sur le sujet.
Cet amendement tend à tirer les conséquences de la complexité de la pratique judiciaire en matière de répression des personnes homosexuelles entre 1942 et 1982. Les historiens nous enseignent que cette répression s'est appuyée sur des dispositions discriminatoires fondées sur l'orientation sexuelle – à l'instar de la fixation à 21 ans de la majorité sexuelle pour les actes homosexuels, ou de l'outrage public à la pudeur aggravé issu de l'amendement Mirguet. Cependant, cette répression fut aussi le fruit d...
Cela a été dit, cette proposition de loi est également très importante pour la recherche. On a évoqué le nombre de 10 000 personnes victimes de l'article 331, alinéa 2 du code pénal – c'est l'évaluation actuelle des chercheurs. Sandra Regol et moi, nous souhaitions, avec d'autres collègues, élargir le champ d'application du texte, car les victimes de la répression homophobe entre 1942 et 1982 pourraient être en réalité 110 000, voire plus. Dans la mesure où elle manque de fonds pour le confirmer, nous demandons que l'État s'engage à financer beaucoup plus activement la recherche relative à la culture et à la lutte pour les droits des personnes LGBT.