Publié le 3 novembre 2022 par : M. Olivier Faure, M. Mickaël Bouloux, M. Baptiste, M. Philippe Brun, Mme Pires Beaune, les membres du groupe Socialistes et apparentés.
I. – Il est institué une contribution additionnelle sur les revenus distribués mentionnés aux articles 108 à 117 bis et 120 à 123 bis du code général des impôts, lorsque le montant total de ces revenus distribués par une société ou un groupe au sens des articles 223 A à 223 U du même code, au titre d’un exercice, dépasse un milliard d’euros.
II. – Cette contribution additionnelle prend la forme d’une majoration du taux prévu au premier alinéa de l’article 117 quater dudit code de :
a) 3 points pour la fraction de revenus distribués supérieure ou égale au seuil défini au I ;
b) 2 points supplémentaires pour chaque palier supplémentaire d’un milliard d’euros de revenus distribués, applicable à la fraction afférente de revenus distribués.
Cette majoration est due par les redevables au prorata des revenus distribués dont ils ont bénéficié, rapporté à l’ensemble des revenus distribués par la société ou le groupe, au titre de l’exercice considéré. La société ou le groupe communique aux redevables les taux applicables aux revenus distribués dont ils ont bénéficié ainsi que les montants d’imposition qui en résultent.
III. – Les exercices concernés sont les exercices 2022 et 2023. L’exercice 2024 est également concerné si le montant total des revenus distribués à ce titre est supérieur de 20 % au montant total des revenus distribués au titre de l’exercice 2023. L’exercice 2025 est également concerné si le montant total des revenus distribués à ce titre est supérieur de 20 % au montant total des revenus distribués au titre de l’exercice 2024.
IV. - La contribution additionnelle est établie, contrôlée et recouvrée comme le prélèvement prévu à l’article 117 quater du même code et sous les mêmes garanties et sanctions. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les mêmes règles applicables.
Cet amendement des députés Socialistes et apparentés vise à créer une taxe exceptionnelle sur les super-dividendes distribués par les très grandes entreprises qui ont profité de la succession de crises.
En effet, selon le rapport du gestionnaire d’actifs Janus Henderson publié fin août, les grandes entreprises françaises ont continué de verser au cours du deuxième trimestre des dividendes à des niveaux records. Jamais un second trimestre n’avait vu autant de dividendes versés en France : 44,3 milliards d’euros. Cela fait suite au versement d’environ 33,4 milliards d’euros de dividendes au premier semestre. Sur l’année, le montant total des dividendes versées pourrait avoisiner les 130 milliards.
Parmi les grandes entreprises françaises concernées : BNP Paribas, Sanofi, Axa, LVMH, ou Total. Les entreprises françaises étaient déjà les plus distributrices de dividendes en 2021, les versements avaient déjà doublé par rapport à 2020.
Ainsi Total, par exemple, qui ne déclare pas de bénéfices en France en 2021, trouve malgré cela le moyen de verser 2,62 milliards d’euros de dividende au titre d’un seul trimestre. Rapporté aux 550 000 actionnaires, cela signifie un montant moyen versé par actionnaire de 4 764 €, pour un seul trimestre ! En parallèle, ce sont 7 milliards d’euros de rachats d’action qui sont prévus sur 2022. En outre, le groupe prévoit des dividendes et rachat d’action dans le même ordre de grandeur en 2023.
Dans la mesure où l’approche par les bénéfices semble ne pas convenir à tous, nous souhaitons par le présent amendement proposer cette approche par les dividendes, qui permettra de limiter les inégalités et stimuler l’investissement, comme ont pu le montrer Adrien Matray (Princeton) et Charles Boissel (HEC) : https ://www.alternatives-economiques.fr/taxer-dividendes-augmente-linvestissement/00103909
La contribution ici proposée est progressive. Le premier milliard de dividendes (et rachats d’actions) distribués par une société (ou un groupe) reste taxé à la flat tax. Au delà, le taux est augmenté : d’un point pour le second milliard, de deux points pour le milliard suivant, de trois points pour le milliard d’après, et ainsi de suite. Ce mécanisme est appliqué aux dividendes de 2022, et à ceux de 2023. Ces taux majorés sont répercutés sur les redevables, sur leur base taxable au pro-rata des dividendes et rachats d’actions touchés par rapport à l’ensemble.
Afin d’éviter un report de distribution de dividendes qui viserait à contourner la contribution, il est également prévu un mécanisme de cliquet qui ferait entrer en vigueur la taxe sur 2024 ou 2025, si l’évolution des dividendes distribués est trop forte par rapport aux exercices précédents.
A titre d’illustration, appliquée à Total, la contribution rapporterait environ 1,4 milliard d’euros en 2022.
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