Publié le 6 janvier 2023 par : M. Isaac-Sibille, Mme Bergantz, M. Falorni, Mme Josso, Mme Maud Petit, M. Turquois, M. Philippe Vigier.
I. – Le chapitre V du titre Ier du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique est ainsi rétabli :
« Chapitre V
« Mise à disposition temporaire de professionnels de santé auprès des établissements de santé
« Art. L. 6115‑1. – Les établissements de santé et les laboratoires de biologie médicale ne peuvent avoir recours, dans le cadre des contrats de mise à disposition qu’ils concluent avec des entreprises de travail temporaire établies en France ou à l’étranger, à des médecins, des chirurgiens-dentistes, des pharmaciens ou des sages-femmes ou des professionnels de santé relevant du livre III de la quatrième partie qu’à la condition que ceux-ci aient exercé leur activité dans un cadre autre qu’un contrat de mission conclu avec une de ces entreprises de travail temporaire pendant une durée minimale appréciée dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Il appartient aux entreprises de travail temporaire mentionnées au premier alinéa de vérifier le respect de la condition fixée au même premier alinéa et d’en attester auprès des établissements de santé et des laboratoires de biologie médicale au plus tard lors de la signature du contrat de mise à disposition. Les modalités d’application du présent alinéa sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« Ce décret prévoit les sanctions applicables en cas de manquement constaté à l’interdiction prévue au présent article. »
II. – La section 5 bis du chapitre III du titre Ier du livre III du code de l’action sociale et des familles est complétée par un article L. 313‑23‑4 ainsi rédigé :
« Art. L. 313‑23‑4. – Les établissements et services relevant des 6° et 7° du I de l’article L. 312‑1 ne peuvent avoir recours, dans le cadre des contrats de mise à disposition qu’ils concluent avec des entreprises de travail temporaire, à des médecins, des infirmiers, des aides-soignants ou des accompagnants éducatifs et sociaux qu’à la condition que ceux-ci aient exercé leur activité dans un cadre autre qu’un contrat de mission conclu avec une entreprise de travail temporaire pendant une durée minimale, appréciée dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Il appartient aux entreprises de travail temporaire de vérifier le respect de la condition fixée au premier alinéa du présent article et d’en attester auprès des établissements et services médico-sociaux au plus tard lors de la signature du contrat de mise à disposition. Les modalités d’application du présent alinéa sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« Ce décret prévoit les sanctions applicables en cas de manquement constaté à l’interdiction prévue au présent article. »
III. – Les I et II s’appliquent aux contrats de mise à disposition conclus en application de l’article L. 1251‑42 du code du travail à compter du 1er janvier 2023.
Le présent amendement est issu de l’article 42 projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023 déclaré inconstitutionnel par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 20 décembre 2023.
Le recours à l’intérim médical, paramédical et sage‑femme n’a fait que croître au cours des dernières années, malgré une volonté politique forte de mieux le réguler (taux de recours de près de 20 % au travail temporaire pour le personnel médical selon une étude de la DGFIP datant d’octobre 2021, incluant l’intérim médical strict et les contrats de gré à gré de courte durée).
L’intérim médical fait l’objet, depuis 2006 notamment, d’un encadrement législatif et réglementaire permettant de lutter contre le mercenariat intérimaire, et de préserver autant que possible les équilibres entre les ressources fixes des établissements de santé et les ressources ponctuelles, mobilisables en cas de tensions sur les RH ou de tension sur l’activité.
En complément des mesures de la loi du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, que nous réaffirmons comme essentielles dans cet environnement et que nous continuons de porter, nous proposons par ailleurs de sécuriser les cadres d’exercice des jeunes diplômés, particulièrement sensibles aux conditions de tutorat lors de leur première prise de poste et à la sécurisation de leur transition professionnelle.
Outre son impact financier majeur dans les budgets des établissements (pour l’hôpital public ce coût annuel est passé de 500 millions d’euros en 2013 à 1 424 millions d’euros en 2018), le recours à l’intérim engendre une déstabilisation des services et des équipes, particulièrement forte dans des territoires marqués par la fragilité de la démographie en professionnels de santé.
Dans un contexte d’absentéisme pesant sur les organisations des établissements de santé, l’intérim est utilisé pour compenser le besoin de professionnels auprès des patients. Les jeunes diplômés notamment paramédicaux, particulièrement sensibles aux conditions de tutorat lors de leur première prise de poste et à la sécurisation de leur transition professionnelle, sont exposés lors d’un exercice en intérim à des situations à risque non négligeables et par ailleurs génératrices de stress professionnel. Or la construction et l’entretien d’une dynamique d’équipe solide est particulièrement importante en établissement de santé, structures dans lesquelles s’organisent des prises en charge complexes et à risque, nécessitant la stabilisation des effectifs. D’ailleurs, la loi du 26 avril 2021 précitée, dite « loi Rist » a renforcé la place des services comme échelon de référence en matière d’organisation, de pertinence, de qualité et de sécurité des soins, d’encadrement de proximité des équipes médicales et paramédicales, d’encadrement des internes et des étudiants en santé ainsi qu’en matière de qualité de vie au travail.
Dans ces conditions, et alors qu’il importe de refonder et stabiliser les collectifs de travail, il est proposé de renforcer la régulation de l’intérim en début de parcours professionnel, pour les personnels médicaux et pour les personnels paramédicaux. Cette évolution, qui vise à garantir la qualité, la sécurité et la continuité des soins, mais aussi à remettre l’éthique au coeur du système de santé, a ainsi vocation à s’appliquer à un ensemble large de professionnels de santé.
Cette mesure conduit à conditionner l’emploi des professionnels de santé en qualité d’intérimaires par les établissements de santé à une condition préalable d’exercice dans un cadre autre qu’un contrat de mission conclu avec une entreprise de travail temporaire pendant une durée minimale. Cette durée sera fixée par décret en Conseil d’État.
Les professionnels de santé seront concertés, dans le cadre de la conférence des parties prenantes, afin de trouver le bon équilibre et de déterminer les modalités et durées d’exercice idoines qui sécuriseront les pratiques et renforceront l’installation stable et durable des professionnels, notamment en établissement de santé.
Le décret en Conseil d’État prévoira également que le fait de recourir aux services d’un salarié qui méconnaît ces dispositions sera puni, pour les entreprises de travail temporaire, de l’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe et que la récidive sera réprimée conformément aux articles 132‑11 et 132‑15 du code pénal.
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