Publié le 19 janvier 2024 par : M. Iordanoff, M. Lucas, Mme Regol.
Supprimer cet article.
L'article 1er introduit une rupture dans notre philosophie pénale, à la fois inutile et incohérente.
C'est tout d'abord une rupture avec notre tradition juridique qui a toujours distingué entre les atteintes volontaires et les atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité physique des personnes. Dès lors que l'intention de tuer ou de blesser n'existe pas, le comportement doit être regardé, sur le plan juridique, comme un acte "involontaire". Refuser cette qualification à certains délits routiers au motif que le fait à l'origine du dommage est volontaire c'est oublier que le droit a sa logique propre et que la terminologie qu'il emploie a une fonction particulière, celle ici en l'occurence de rappeler qu'il n'y a pas de crime ou de délit sans intention de le commettre. Le terme "involontaire" n'est peut-être pas le plus approprié parce qu'il est éloigné du langage ordinaire ; il n'empêche que le glissement opéré dans ce texte pour répondre uniquement à l'émotion publique n'est pas juste sur le plan juridique.
Inutile rupture dans la mesure où notre droit pénal est déjà très bien doté en matière de délinquance routière. Depuis 2003, l’homicide involontaire commis par le conducteur est assimilée à une imprudence aggravée punie de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende et les peines sont alourdies (7 ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende) en cas de circonstance aggravante (violation manifestement délibérée d’une obligation particulière, état d’ivresse ou état alcoolique caractérisé par une concentration d’alcool supérieur aux taux fixés, refus de se soumettre à un éthylotest, prise de stupéfiants, absence de permis, dépassement de la vitesse maximale autorisée supérieure à 50 km/h, délit de fuite) et rehaussées lorsque deux circonstances aggravantes sont réunies (10 ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende). Il en va de même en matière d'atteintes à l'intégrité physique des personnes.
Enfin, ce texte est incohérent parce qu'il délaisse tous les autres homicides dits involontaires dont on sait pourtant qu'ils sont parfois le résultat de violations délibérées d'obligation de sécurité. On songe notamment aux accidents du travail.
Pour toutes ces raisons, je demande la suppression de cet article.
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