Publié le 18 juillet 2022 par : M. Dunoyer.
Le ministre chargé de l’économie est autorisé à accorder la garantie de l’État aux emprunts contractés par la société d’économie mixte néo-calédonienne d’énergie sous la forme, soit de prêts auprès d’établissements de crédit et de sociétés de financement mentionnés à l’article L. 511‑1 du code monétaire et financier ou d’établissements de crédit et autres organismes financiers ayant leur siège social dans un État qui n’est ni membre de l’Union européenne ni partie à l’accord sur l’Espace économique européen, soit d’émission de titres de créances. Ces emprunts sont affectés à l’équilibre de trésorerie de la société en cas du non versement de la compensation financière prévue, en cas de stabilisation des tarifs publics, par l’article 29 de la délibération du congrès de la Nouvelle-Calédonie n° 195 du 5 mars 2012 relative au système électrique de la Nouvelle-Calédonie.
Cette garantie est accordée dans la limite d’un montant total de 50 millions d’euros en principal, pour une durée courant jusqu’au 31 décembre 2029 au plus tard. Elle ne peut en aucun cas excéder, pour chacun des emprunts mentionnés au premier alinéa, 80 % de son montant restant dû en principal, intérêts, frais et accessoires.
Elle donne lieu au versement à l’État d’une rémunération qui ne saurait être inférieure aux conditions normales du marché pour la couverture de risques comparables.
Sur l’ensemble des territoires ultramarins, les coûts de production et de distribution d’électricité sont, de fait de l’isolement et de la faible taille du marché, bien plus élevés qu’en métropole. Afin de préserver le pouvoir d’achat des ménages, l’Etat a généralisé, quasiment partout, les tarifs publics d’électricité appliqués dans l’hexagone, en compensant la perte de revenus qui en résulte pour les opérateurs par le produit d’une taxe ad hoc prélevée sur l’ensemble des consommateurs d’électricité, y compris métropolitains ; une part de la contribution au service public de l'électricité (CSPE) est dédiée à cela. Cette politique traduit donc le dernier alinéa de l’art 72-2 de la Constitution : « la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales ».
Toutefois, la Nouvelle-Calédonie est restée exclue du dispositif national de péréquation tarifaire adossé à la CSPE. C’est pourquoi les tarifs publics de l’électricité supportés par les ménages calédoniens sont 80% plus élevés que sur le reste de l’outre-mer (37,27 XPF par kWh, contre 0,174 €). La seule autre exception à ce principe de solidarité nationale est la Polynésie française.
Les tarifs très élevés supportés par les consommateurs calédoniens ne suffisent pourtant pas à couvrir les charges supportées par la société publique ENERCAL, qui joue en Nouvelle-Calédonie un rôle similaire à ceux joués dans les DROM par EDF (production et transport sur l’ensemble de l’archipel) et ENEDIS (distribution sur la moitié des communes). En effet, depuis 2014, le calcul des tarifs prend en compte l’hypothèse qu’une subvention d’équilibre doit être versée par la Nouvelle-Calédonie à ENERCAL afin de compenser une sous-tarification, mais en pratique, la Nouvelle-Calédonie n’a jamais réussi à trouver la ressource budgétaire lui permettant de verser cette subvention d’équilibre. Une dette de 9 milliards de francs CFP s’est ainsi constituée au fil des ans, qu’il était prévu de résorber d’ici fin 2023 grâce à des ajustements plus volontaristes des tarifs : le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a augmenté les tarifs publics de l’électricité de 4% en avril 2022, et a annoncé deux nouvelles hausses à venir, de respectivement 4% en octobre 2022, et 3% en avril 2023.
Toutefois, l’évolution récente des prix internationaux des combustibles a considérablement aggravé la situation : le prix du charbon a été multiplié par 4 au plus fort de la crise, et ne baisse que lentement depuis, sans que l’on puisse espérer revenir à moins du double des prix d’il y a un an.
Il apparait ainsi aujourd’hui que, pour qu’ENERCAL puisse assurer correctement ses missions, en commandant et payant les combustibles et toutes les opérations de maintenance nécessaires, il faut, en sus des augmentations de 4% et 3% déjà annoncées :
- Soit décider une nouvelle hausse tarifaire immédiate de 20%
- Soit accorder à ENERCAL une subvention, ou au moins un prêt, de 6 milliards de francs CFP (soit 50 millions d’euros).
Cette subvention ou ce prêt devrait normalement relever de la Nouvelle-Calédonie, mais celle-ci n’en a absolument pas les moyens.
Il est donc proposé que l’Etat apporte sa garantie à un emprunt que pourrait lever ENERCAL afin de disposer de la trésorerie nécessaire pour assurer ses missions, en évitant une hausse tarifaire qui serait insupportable pour le pouvoir d’achat des ménages.
Ce prêt aura vocation à être remboursé en 7 ans, le temps de procéder à un rééquilibrage du volet financier du système électrique calédonien :
- Par la réalisation d’investissements massifs dans des outils de production plus économiques que les moyens fossiles à leur coût actuel (fermes solaires et éoliennes adossées à des moyens de stockage d’électricité, le tout devant pouvoir bénéficier de la défiscalisation)
- Par des hausses tarifaires plus progressives que les 20% qui seraient nécessaires à court terme en l’absence de prêt.
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