Publié le 29 juin 2023 par : Mme Pouzyreff.
Substituer aux alinéas 9 et 10 les quinze alinéas suivants :
« Art. 58‑1. – I. – Les consultations juridiques rédigées par un juriste d’entreprise au profit de son employeur sont confidentielles.
« II. – Est un juriste d’entreprise au sens du I, le salarié d’une entreprise, titulaire d’un master en droit, ou d’un diplôme équivalent français ou étranger, dont le contrat de travail écrit porte la mention « juriste d’entreprise » et lui confie notamment pour tâche de délivrer des avis juridiques à son employeur.
« III. – Est une consultation juridique au sens du I, tout écrit, quel que soit son support, y compris un document d’analyse préparatoire, portant la mention « confidentiel – consultation juridique juriste d’entreprise » et destiné exclusivement à un service ou à un organe de direction de l’entreprise d’emploi du juriste d’entreprise, ou d’une entreprise du même groupe.
« IV. – Pour bénéficier de la confidentialité prévue au I, les consultations juridiques doivent, d’une part, faire l’objet d’une identification et d’une traçabilité particulières dans les dossiers de l’entreprise, et d’autre part, avoir été rédigées par un juriste d’entreprise justifiant du suivi de formations initiale et continue en déontologie. Les modalités d’identification et de traçabilité ainsi que le référentiel de formations en déontologie sont définis par arrêté du ministre de la justice.
« V. – Par exception au I, les consultations juridiques en matière fiscale ne sont pas couvertes par la confidentialité.
« VI. – Les documents couverts par la confidentialité en application du présent article ne peuvent, dans le cadre d’une procédure ou d’un litige en matière civile, commerciale ou administrative, faire l’objet d’une saisie ou d’une obligation de remise à un tiers, y compris à une autorité administrative française ou étrangère. Dans ce même cadre, ils ne peuvent davantage être opposés à l’entreprise qui emploie le juriste d’entreprise ou aux entreprises du groupe auquel elle appartient.
« Le président de la juridiction qui a ordonné une mesure d’instruction dans le cadre d’un litige civil ou commercial peut être saisi par voie d’assignation, dans un délai de cinq jours suivant la mise en œuvre de ladite mesure, aux fins de contestation de la confidentialité alléguée de certains documents.
« VII. – Le juge des libertés et de la détention qui a autorisé une opération de visite dans le cadre d’une procédure administrative peut être saisi par requête motivée de l’autorité administrative ayant conduit cette opération, dans un délai de cinq jours suivants celle-ci, aux fins de voir :
« 1° contester la confidentialité alléguée de certains documents ;
« 2° ordonner la levée de la confidentialité de certains documents, dans la seule hypothèse où ces documents auraient eu pour finalité d’inciter ou de faciliter la commission des manquements aux règles applicables en matière financière, fiscale ou de concurrence faisant l’objet de la procédure administrative.
« Le juge saisi enjoint à l’entreprise qui emploie le juriste d’entreprise de mettre à sa disposition l’ensemble des documents dont elle allègue la confidentialité. Il peut en prendre connaissance seul ou avec l’assistance d’un expert qu’il désigne.
« Après avoir entendu le requérant et l’entreprise qui emploie le juriste d’entreprise, le juge statue sur la contestation et, le cas échéant, sur la demande de levée de la confidentialité.
« S’il est fait droit aux demandes, les documents sont produits à la procédure en cours dans les conditions qui lui sont applicables. À défaut, ils sont restitués sans délai à l’entreprise qui emploie le juriste d’entreprise.
« En tout état de cause, l’entreprise qui emploie le juriste d’entreprise peut lever la confidentialité des documents.
« VIII. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »
Cet amendements est proposé par l'association française des juristes d'entreprise, l'association nationale des juristes de banque et l'association des directeurs juridiques.
Dans un monde où le droit est une arme de guerre économique, il est temps de mettre nos entreprises et leurs juristes à égalité avec les autres acteurs.
Contrairement à ce qui est prévu dans la législation de nombreux pays, les avis et actes préparatoires rédigés par les juristes d'entreprise ne sont pas confidentiels.
Avec le développement ces dernières années de réglementations demandant aux entreprises de procéder spontanément à des mises en conformité (concurrence, données personnelles, etc), les juristes d'entreprise français sont placés dans une situation qui ne leur permet pas d'informer par écrit les dirigeants des manquements qu'ils constatent.
La confidentialité des consultations des juristes d'entreprise vise aussi à permettre l’amélioration des diagnostics juridiques internes aux entreprises en éliminant le risque d’auto-incrimination que représenterait un avis critique du juriste d’entreprise.
Le Sénat a introduit à l'article 19 le principe de la confidentialité des consultations juridiques des entreprises.
Le présent amendement reprend ce principe et l'encadre de manière précise et opérationnelle. Il ne crée pas une nouvelle profession réglementée du droit.
La confidentialité porte sur le document écrit et ne constitue pas un nouveau secret professionnel attaché à la personne du juriste d'entreprise.
Le juriste d'entreprise devra avoir un niveau de diplôme de Master en droit et suivre une formation initiale et continue en déontologie.
Les matières fiscales et pénales ne sont pas couvertes par la confidentialité proposée par le présent amendement.
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