Publié le 17 juin 2023 par : M. Iordanoff, M. Lucas, Mme Regol.
Compléter l'alinéa 316 par les deux phrases suivantes :
« Dans chaque tribunal judiciaire, est institué un comité opérationnel départemental de lutte contre la délinquance environnementale, présidé par le procureur de la République et composé des services chargés de la constatation des infractions aux atteintes à l’environnement. Le procureur de la République y expose sa politique pénale et communique ses instructions au titre de sa mission de direction de la police judiciaire. »
Cet amendement a pour objet de garantir le principe de séparation des pouvoirs en rendant à l’article 40 alinéa 2 du code de procédure pénale son effet utile. Il est proposé, en ce sens, de créer un cadre privilégié d’échanges d’informations des services verbalisateurs à destination des parquets, au sein de comités présidés par le procureur de la République et composés exclusivement d’agents assermentés en charge de la constatation des atteintes à l’environnement, d’où seraient donc exclues les autorités administratives (préfets et exécutifs locaux).
En dépit de la mise en place des pôles régionalisés spécialisés en matière d’atteintes à l’environnement en 2021, le contentieux pénal de l’environnement ne représente qu’une infirme part de l’activité des juridictions pénales (moins de 1% des affaires traitées. Cet échec de la réponse pénale s’explique en grande partie par l’absence de signalement des atteintes à l’environnement aux parquets. Outre le manque de moyens dédiés à la recherche des infractions (une quinzaine d’inspecteurs de l’environnement par département seulement) et à leur poursuite (du fait du manque de magistrats spécialisés), les dysfonctionnements proviennent d’un défaut d’information de l’autorité judiciaire par les services verbalisateurs placés sous l’autorité des préfectures, notoirement sensibles aux intérêts économiques locaux.
Dans le meilleur des cas – parce qu’il existe aussi des doctrines de l’inaction (cf. note de service de la direction de l’OFB du 20 avril 2023 sur la conduite à tenir dans le cadre de la constatation de la constatation du flagrant délit d’épandage des pesticides dangereux pour les pollinisateurs sur les cultures en fleur), les services de l’Etat privilégient la mise en mouvement de procédures administratives peu contraignantes sans en informer l’autorité judiciaire. Le phénomène est aussi ancien que parfaitement documenté (P. Lascoumes, L’éco-pouvoir, 1994 ; Rapport de la Cour des comptes du 9 juin 2023). Les parquets ne sont donc tout simplement pas saisis, ce dont témoigne avec éloquence l’affaire du Lubrizol. Cette rétention d’information conduit à déplacer le principe d’opportunité des poursuites au sein des administrations en lieu et place des parquets sur le plan environnemental, contrevenant ainsi frontalement à l’article 40 alinéa 2 du code de procédure pénale et par là-même au principe de séparation des pouvoirs entre le judiciaire et l’exécutif (Mission conjointe CGEDD / IGJ « Une Justice pour l’environnement », 2019).
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