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Ramlati Ali
Question N° 32177 au Ministère des outre-mer


Question soumise le 15 septembre 2020

Mme Ramlati Ali alerte M. le ministre de l'intérieur sur la flambée de violences qui sévit actuellement à Mayotte. En effet, depuis plus d'un mois, le territoire connaît de très vives tensions matérialisées par des actes de violence qui se multiplient quotidiennement, accentuées par une grave crise socio-économique. Le constat est sévère et génère une très forte inquiétude au sein de la population. Pas un jour sans que l'on n'assiste au triste spectacle de voitures dégradées, brûlées, de rackets d'automobilistes et motards, de pillages, d'affrontements de bandes rivales. La rentrée scolaire a elle aussi été mouvementée, due à des manifestations d'élèves en raison de l'absence de bus de ramassage scolaire pour cause d'une grève des chauffeurs. Ajouté à cela, des bandes de jeunes non scolarisés qui se mêlent aux barrages bloquant et agressant des automobilistes. Cette délinquance de jeunes devient de plus en plus violente, certains sont même armés de machettes et sèment le chaos. De plus, la colère des habitants contre les immigrés clandestins s'exacerbe. L'agression de deux agents municipaux de Mamoudzou par des demandeurs d'asile a accentué ces tensions permanentes. En conséquence, Mayotte se trouve dans une situation de « pourrissement » avec des habitants apeurés, exaspérés, qui décident de se protéger eux-mêmes, des écoles fermées et une économie qui se fragilise davantage. Pour pallier cette situation, des propositions ont été faites par les élus, celle notamment de recourir aux militaires pour assister les forces de l'ordre présentes. Lors de la rencontre à l'Élysée en février 2019 dans le cadre du Grand débat national avec les maires d'outre-mer, le Président Emmanuel Macron avait réitéré sa position sur la nécessité de renforcer les moyens de la lutte contre l'immigration clandestine avec, notamment, la possibilité de déployer un « Plan Harpie » à Mayotte, à l'instar de l'« Opération Harpie » en Guyane contre l'orpaillage clandestin. Les différents plans d'action du Gouvernement envers Mayotte depuis le début du quinquennat ont tous mis l'accent sur la nécessité de lutter contre l'insécurité, la délinquance des mineurs et l'immigration clandestine. Des mesures ont été prises à cet effet. Force est de constater que, en dépit des efforts de l'État, cet arsenal mis en place est insuffisant au regard de la situation incendiaire que connaît Mayotte. Et pourtant, les élus et la population n'ont eu de cesse d'interpeller l'État et de se mobiliser pour que cet état insurrectionnel ne se banalise pas. Le désespoir et le sentiment d'abandon est très fort au sein de la population Mahoraise. Elle est exaspérée par cette insuffisance de réaction face à cette violence qui gangrène toute la société et empêche un développement réel. Les Mahorais attendent des résultats concrets et des mesures adéquates afin de rétablir la loi et l'ordre sur le territoire mahorais. La direction territoriale de la police nationale de Mayotte (DTPN), nouveau service déconcentré de l'État en expérimentation dans le territoire, doit être confortée et renforcée par des apports ciblés d'effectifs dans certains domaines. Enfin, l'envoi de militaires en appui des forces de l'ordre paraît la solution la plus adaptée à la situation actuelle. Aussi, elle souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement pour restaurer sans délais la sécurité à Mayotte.

Réponse émise le 8 décembre 2020

A Mayotte, les services de l'Etat et les forces de l'ordre sont pleinement mobilisés pour garantir la stabilité, lutter davantage contre l'immigration clandestine et préserver le tissu économique local. Mayotte fait ainsi l'objet d'une attention particulière, tant dans la prise de mesures d'urgence que dans la mise en œuvre de plans spécifiques successifs. Après le plan Mayotte, sécurité pour tous en 2016 et le Livre bleu outre-mer de 2018, ont été développés un plan de développement de Mayotte en 2018 et le plan civilo-militaire Shikandra en 2019. Le ministère de l'Intérieur y est particulièrement engagé, en collaboration étroite avec le ministère des Outre-mer. Ces derniers mois, la crise sanitaire a accentué les difficultés socio-économiques et fragilisé les efforts réalisés en 2019 et début 2020, notamment dans la lutte contre l'immigration irrégulière. En la matière, les perspectives sont désormais plus favorables. L'Etat consacre à Mayotte des moyens inédits afin de maîtriser l'insécurité. La prévention et la lutte contre les atteintes aux personnes et aux biens sont la priorité des forces de l'ordre. Les forces de sécurité intérieure (FSI) ont réalisé la quasi-totalité des préconisations prévues par ces dispositifs comme le plan « coupeurs de route » ou encore le plan dans les transports scolaires mis sur pied cette rentrée avec près de 250 gendarmes mobilisés. A la fin de l'année 2020, on comptera 352 gendarmes et policiers supplémentaires par rapport à 2015 (hors gendarmes mobiles), ce qui, avec l'augmentation des escadrons de gendarmerie mobile passés à 3 depuis 2019 (209 gendarmes), porte le nombre de FSI sur place à 1 229 (729 police nationale et 500 gendarmerie nationale). Cela représente une augmentation de 60,4% depuis 5 ans, soit le plus gros effort outre-mer en matière d'effectifs. La réorganisation des services opérationnels, amorcée dès 2017, a permis d'adapter les forces de l'ordre à l'évolution de la délinquance : - Côté police, la direction territoriale de la police nationale de Mayotte a été mise en place le 1er janvier 2020 et sera confortée. - Côté gendarmerie, dans le cadre de la sécurité du quotidien, le département bénéficie de renforts d'effectifs depuis 2018, d'un quartier de reconquête républicaine (QRR) créé en février 2019 à la Vigie à Pamandzi avec 10 gendarmes supplémentaires, de créations de 2 brigades territoriales autonomes (BTA) à Koungou et Dembeni, et d'une brigade de prévention de la délinquance juvénile à Mamoudzou. Un important dispositif préventif et de réaction aux troubles à l'ordre public permet, à chaque fois, un retour au calme dans de brefs délais. La capacité de réaction est notamment permise par des escadrons de gendarmerie renforcés de blindés agissant très rapidement au nord comme au sud de l'île. Indispensable à toute politique de sécurité, le travail partenarial se développe. A la fin de l'été 2020, le préfet a reçu les élus et les partenaires concernés afin d'apaiser les situations et d'identifier les solutions de médiation, d'éducation et de sécurité dont ils ont besoin. Il a ainsi proposé aux élus un « pacte de sécurité » avec un contrat d'objectifs afin de poursuivre les efforts de médiation, de financements d'équipements ou de dispositifs sociaux envers la jeunesse. Il s'agit aussi de coordonner la présence de la police et de la gendarmerie dans les quartiers les plus sensibles. Plus largement, l'Etat accompagne les communes dans le développement de la vidéo-protection avec, par exemple, 127 caméras à Koungou et l'incitation à la professionnalisation des polices municipales. Les premières assises de la Sécurité se sont également tenues les 9 et 10 novembre 2020. En outre, le milieu scolaire fait l'objet de la plus grande attention. Pour la rentrée 2020, un dispositif global d'accompagnement des bus et de sécurisation des abords des établissements scolaires a été mis en place en lien avec l'Éducation nationale. Ce renforcement de la sécurisation des établissements scolaires, de leurs abords et des transports publics, conduit à fidéliser les gendarmes mobiles sur cette mission, en établissant des protocoles pour renforcer les liens et l'échange d'information avec les équipes mobiles de sécurité de l'Éducation nationale ainsi que les entreprises de transports scolaires. Sur le long terme, et concernant la stratégie de lutte contre l'immigration clandestine et de maîtrise de nos frontières, un plan gouvernemental ambitieux, terrestre et maritime, lancé en août 2019, a porté ses fruits jusqu'avant le confinement, et sera consolidé en 2021. 27 421 éloignements de migrants clandestins ont été réalisés en 2019, contre 15 007 en 2018. Après l'interruption liée à la Covid-19, la montée en puissance du rythme des expulsions concentre tous les efforts actuels du Gouvernement. Entre août et septembre, 1 667 reconduites ont été effectuées. Depuis début octobre, ce sont désormais 5 départs par semaine. Le centre de rétention administrative (CRA) a retrouvé une pleine capacité de traitement des éloignements, soit 135 places après plusieurs mois à 70 places. La reprise des reconduites vers les Comores, notamment, permet aux forces à Mayotte de procéder, à nouveau, à des interpellations à terre, et d'amorcer davantage de retours. La lutte contre les filières s'est, en outre, poursuivie. Un travail de la préfecture est d'ailleurs engagé auprès des maires afin de sensibiliser les élus et de former les polices municipales et officiers d'Etat civil sur les sujets de la lutte contre la fraude documentaire et les marchands de sommeil ou l'emploi d'étrangers sans titre.

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