Intervention de Hubert Julien-Laferrière

Séance en hémicycle du mercredi 16 décembre 2020 à 15h00
Stratégie vaccinale contre la covid-19

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHubert Julien-Laferrière :

n'en déplaise à ces victimes de l'effet Dunning-Kruger, ce biais cognitif qui porte le nom des deux psychologues qui ont montré que moins on en sait, plus on croit savoir – phénomène exacerbé par les réseaux sociaux. Je ne dis pas qu'il ne faut pas débattre, bien sûr. Ce débat parlementaire est important, et j'en profite pour saluer les travaux de nombreux collègues, et en particulier ceux de l'OPECST, présidé par Cédric Villani. C'est un débat auquel il faut associer les Français. Nous devons débattre, nous devons même douter : « ce n'est pas le doute qui rend fou, c'est la certitude », nous rappelait Nietzsche, et c'est même le doute qui fait avancer la science.

Mais du doute ne doit pas naître la défiance envers la science, et c'est là que se situe la ligne de crête. Rappelons encore une fois que la vaccination a permis d'éradiquer la variole entièrement, et la polio à 99 % ; qu'elle a fait baisser de 80 % les décès dus à la rougeole ; qu'elle permet chaque année de sauver de la mort 3 millions de personnes exposées à la diphtérie, au tétanos, à la rougeole, à la coqueluche. Une seule chose a eu autant d'impact sur la mortalité dans l'histoire de l'humanité, c'est l'assainissement des eaux.

Le vaccin protège, pour le premier en tout cas, contre les formes graves, mais on ne sait pas, c'est vrai, pour combien de temps ; Alain Fischer le rappelait ce matin sur une grande radio nationale, nous ne sommes pas sûrs qu'il empêche la transmission. Nous aurons donc besoin de davantage de recul, mais regardons ce que le vaccin apporte : la protection des plus fragiles et la perspective d'une immunité collective.

Il nous faut donc convaincre les Français, qui ne comprennent pas toujours les décisions prises ces dernières semaines. Car ce défi sanitaire est aussi un défi démocratique, si essentiel dans notre stratégie vaccinale. Gratuité, universalité, couverture de l'ensemble du territoire : tout cela exige une organisation logistique complexe, et je salue à cet égard les services de l'État, en particulier ceux du ministère de la santé. La question logistique, vous l'avez rappelé, n'est évidemment pas négligeable.

Il faut également associer les Français en faisant preuve de transparence, surtout lorsqu'on a choisi, à juste titre, une stratégie qui repose sur l'absence d'injonction et sur le libre choix. Cela commence bien sûr par les professionnels de santé, qui, en tant qu'acteurs de proximité, sont les mieux placés pour convaincre et qui auront besoin d'être davantage soutenus. Vacciner, c'est un peu comme recevoir en consultation.

Enfin, parce que les virus voyagent sans passeport et sans visa, nous avons besoin d'une solidarité mondiale pour que « bien public mondial » ne soit pas seulement un slogan. Nous avons besoin d'une coordination européenne : elle a fait défaut lors de la première vague, mais elle est cette fois au rendez-vous. Il y a désormais une vraie diplomatie européenne, y compris dans la surveillance du virus, grâce à une veille virologique stricte pour le cas où le virus serait amené à muter encore plus qu'il ne l'a fait au Royaume-Uni. L'Europe doit donc développer ses propres outils scientifiques. C'est une question d'efficacité dans la lutte contre le virus, c'est aussi, bien sûr, une question de souveraineté européenne pour l'avenir.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.