Intervention de Charlotte Parmentier-Lecocq

Séance en hémicycle du lundi 22 juin 2020 à 16h00
Santé au travail — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharlotte Parmentier-Lecocq :

L'heure est venue désormais de mettre au centre de nos débats la santé au travail, qui est souvent le parent pauvre des politiques publiques. C'est dans ce but que les députés des groupes La République en marche, Mouvement démocrate et apparentés et Agir ensemble proposent la présente résolution.

Les enjeux relevant du champ de la santé au travail sont immenses. À l'heure où notre monde est en constante évolution et connaît de nombreux bouleversements, et où les technologies modifient en profondeur le travail, de nouveaux risques apparaissent. La pression exercée par un environnement de plus en plus concurrentiel dans les entreprises, couplée aux exigences des consommateurs ou des usagers, intensifie les risques psychosociaux. Enfin, la population active vieillit et, malgré de réelles améliorations dans les conditions de travail, de nombreux travailleurs sont affectés par l'usure professionnelle, qui fragilise leurs possibilités de garder leur emploi, particulièrement en fin de carrière.

Or le fait d'avoir une activité professionnelle préserve mieux la santé que les situations de chômage et nous croyons profondément en l'émancipation sociale par le travail. Cependant, pour être véritablement vecteur d'émancipation, le travail doit préserver la santé physique et mentale de chacun, qu'il soit ouvrier, fonctionnaire, cadre, chef d'entreprise, intérimaire, indépendant ou agriculteur. C'est là une conviction que nous partageons largement sur l'ensemble de ces bancs, comme le prouvent les récents travaux parlementaires menés tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat. Elle est, me semble-t-il, également partagée par le Gouvernement, qui, ces dernières années, a commandé plusieurs rapports – j'ai moi-même eu l'honneur, madame la ministre du travail, de répondre à votre demande et à celle du Premier ministre en la matière. Ces travaux ont un point commun : ils rappellent que les enjeux humains que recouvre la santé au travail sont majeurs et démontrent que les réponses que nous y apportons sont insuffisantes.

J'évoquerai, à cet égard, un seul chiffre : seulement 4 % des financements de la santé au travail sont dédiés à la prévention, le reste l'étant à la réparation. Nous devons corriger cette tendance. La crise sanitaire que nous traversons a, elle aussi, mis en lumière ces constats maintes fois répétés. Alors que nous ignorons encore les évolutions futures de cette crise et que les incertitudes quant aux éventuels nouveaux risques sont fortes, nous devons agir.

Cette proposition de résolution est un préalable à l'élaboration d'une proposition de loi que nous souhaitons présenter à l'Assemblée nationale d'ici à la fin de l'année. Ce texte, nous souhaitons le bâtir en articulation étroite avec les négociations rouvertes par les partenaires sociaux le 15 juin dernier. Nous voulons aussi y associer largement les partenaires issus de tous les bancs de cette assemblée, ainsi que les premiers concernés : les acteurs de terrain.

Cette proposition de loi aura trois grandes ambitions. La première est de faire de la santé au travail une priorité des politiques publiques et de faire de l'entreprise un véritable terrain de prévention. Nous souhaitons que les entreprises soient encouragées à diffuser les messages de santé publique et à mettre en oeuvre des actions bénéfiques pour la santé de leurs collaborateurs. Comme Alphonse Karr, nous avons la conviction que « pour bien travailler, il faut se bien porter ».

La deuxième ambition est de doter la France d'un système de santé au travail plus efficace. Nous souhaitons ainsi décloisonner santé au travail et santé publique, et garantir que le médecin du travail soit véritablement intégré au parcours de soins. Nous préconisons en outre la création d'un diplôme d'infirmier en pratiques avancées dans le champ de la santé au travail afin de répondre à la pénurie de médecins. La santé au travail peut compter sur les compétences et l'engagement des professionnels. Nous souhaitons ainsi poursuivre le déploiement des équipes pluridisciplinaires et favoriser l'essor encadré de la télémédecine.

La troisième ambition est de mieux prévenir l'usure professionnelle, en établissant un lien étroit entre l'exposition aux risques et les parcours professionnels. Nous appelons à ce que le travail soit véritablement accessible aux plus vulnérables d'entre nous, notamment aux personnes en situation de handicap ou atteintes de pathologies chroniques. Nul ne doit être écarté du monde du travail parce qu'il a subi un cancer ou un accident grave. Le travail doit s'adapter et offrir des perspectives à chacun d'entre nous.

Nous croyons en l'entreprise tournée vers la performance globale, équilibrant les enjeux humains, économiques et environnementaux – une entreprise porteuse de sens et d'avenir. C'est pourquoi nous proposons cette résolution et appelons à faire de la France l'un des pays les plus performants en matière de santé au travail.

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