Intervention de Antoine Savignat

Séance en hémicycle du mercredi 3 juin 2020 à 15h00
Diverses dispositions liées à la crise sanitaire à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du royaume-uni de l'union européenne — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAntoine Savignat :

Dans cette situation, le fonctionnement des institutions était mis entre parenthèses. Pour remporter la victoire, le Gouvernement était habilité à légiférer par ordonnances et à prendre, pour faire la loi, des décisions indispensables dans l'urgence. Mais, en temps de guerre, seul l'ordre clair et précis, qui fixe un cap, rassure et poursuit un but cohérent, est un ordre valable : or, de cela, nous n'avons rien vu. Le tâtonnement a succédé à l'imprécision, personne n'ayant été en mesure de prévoir ce que serait le lendemain. Nous sortons de cette situation petit à petit, laborieusement mais, nous l'espérons, sûrement. Nous devrions donc pouvoir à nouveau fonctionner normalement, les institutions vont retrouver la plénitude de leur rôle et les directives redevenir lisibles et compréhensibles. Mais hélas, nous ne connaîtrons pas cette situation, puisque, en lieu et place de ce retour à la normale, on nous présente un texte fourre-tout, « gloubi-boulga » – les qualificatifs n'ont pas manqué – , sans cohérence, extrêmement dense et particulièrement illisible.

En somme, pour sortir d'une crise, on nous présente un petit bricolage, sans mesures pérennes, sans cap et sans objectif, histoire de dire qu'on a fait quelque chose. On mélange la véritable urgence, celle qui, comme je le disais à l'instant, consiste à sauver les emplois et l'économie, et a donc toute sa place dans le texte, avec la sortie du Brexit – qui, à dire de ministre, a été placé là car on ne savait pas où le mettre – ou l'application de normes européennes.

Bien pire : on tente de camoufler l'explosion de notre système judiciaire et on reporte l'entrée en vigueur de réformes, comme celle relative au divorce, qui nous avaient pourtant été présentées comme de nature à alléger la charge de travail des juridictions. En cette période de surcharge des tribunaux, c'est une solution dont on devrait se féliciter : pourtant, ces réformes sont reportées sans, bien évidemment, que nous en soit donnée la véritable cause – elle réside en fait dans notre incapacité à appliquer l'ensemble de ces réformes, faute de moyens.

Pire encore : les engagements pris lors de l'adoption de la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice s'agissant de l'extension des chambres criminelles au niveau départemental ne sont pas respectés. Et sauf si, à l'issue d'un marchandage, nous parvenons à une solution plus satisfaisante, je maintiendrai qu'une chambre criminelle départementale, c'est déjà une de trop. On ne fait pas d'expérience en matière de justice, car on doit à tous, dans tous les territoires, la même justice ; pas plus que l'on n'interfère dans le travail des procureurs en les invitant à revoir les poursuites qu'ils avaient choisi d'engager, voire, en matière conventionnelle, à procéder à des classements sans suite. C'est un message inacceptable dans un État qui, à l'avenir, à force de tels messages, ne sera plus un État de droit – …

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