Intervention de Gabriel Serville

Séance en hémicycle du vendredi 3 novembre 2017 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - projet de loi de finances pour 2018 — Administration générale et territoriale de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGabriel Serville :

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, chers collègues, les crédits de la mission administration générale et territoriale de l'État que nous examinons aujourd'hui s'inscrivent dans la pure continuité de la RGPP lancée par le Président Sarkozy, ainsi que du Plan de modernisation de l'action publique et du Plan préfecture nouvelle génération mis en oeuvre depuis 2015 et qui ont vu l'État se désengager inéluctablement des territoires.

C'est pourquoi, si les crédits sont à peu près préservés, il est prévu de supprimer 1 300 équivalents temps plein dans les services qui assurent la présence de l'État dans les territoires, gage assurément d'une nouvelle dégradation non seulement des conditions de travail des agents mais également des services rendus aux collectivités locales sur les questions d'ingénierie ainsi qu'aux citoyens. Car, en supprimant des emplois dans les préfectures et les sous-préfectures, on fragilise avant tout les missions assurées par les services de l'État, qui ont trop souvent l'habitude d'être transférées à nos collectivités, évidemment sans compensation ou presque.

Dans ces conditions, nous voyons difficilement comment réussir à convaincre les citoyens que l'État irrigue l'ensemble des territoires, sans faire d'impasse ni créer de territoires oubliés de la République. Pour ce qui est du cas particulier de la Guyane que je représente sur ces bancs, les crédits de la mission sont en baisse de près d'1 million d'euros, aussi bien en crédits de paiement qu'en autorisations d'engagement.

J'invite mes collègues ici présents à aller faire un tour à la préfecture de Cayenne et à la sous-préfecture de Saint-Laurent-du-Maroni, afin de constater par eux-mêmes l'engorgement des services et la surcharge de travail des agents, qui doivent faire face à l'explosion de la démographie locale, avec toujours moins de moyens financiers et humains.

Chers collègues, je suis intimement persuadé que vous partageriez, tous autant que vous êtes, ma totale incompréhension des orientations budgétaires que le Gouvernement assigne à cette mission en particulier. Je rappelle que la Guyane comprend une préfecture et une sous-préfecture au service d'un territoire aussi étendu que le Portugal, ce qui fait d'elle la championne toutes catégories en termes d'éloignement des services publics.

Cette remarque me conduit naturellement à la seconde difficulté posée par ce budget : la dématérialisation de la délivrance de titres et de la propagande électorale. Que les choses soient claires. Je crois absolument en l'outil numérique comme moyen de lutter contre les fractures territoriales et comme véritable levier pour rapprocher les citoyens isolés des services publics. Toutefois, comme il est trop souvent de coutume, ne mettrions-nous pas la charrue avant les boeufs, en faisant l'impasse sur la fracture numérique qui subsiste dans notre pays, puisque plus de 3 millions de foyers restent toujours dépourvus de connexion internet, ce qui fait d'eux des citoyens de seconde classe ?

Conséquemment, cette fracture numérique pourrait prendre des allures de double peine, car, en plus de ne pas avoir accès à internet, ces millions de citoyens se retrouveront encore plus à la marge de certains services publics, la téléprocédure devenant un vecteur d'exclusion.

Disons les choses telles qu'elles sont : de nombreux citoyens ne sont pas prêts pour le tout numérique, raison pour laquelle, d'ailleurs, la majorité précédente avait finalement renoncé à la dématérialisation de la propagande électorale pour les élections européennes. Dans ces conditions, le Gouvernement prend, me semble-t-il, un grand risque. Il aura à endosser sa part de responsabilité dans la montée de l'abstention qui atteint déjà des niveaux inédits dans notre pays. Je rappelle qu'elle a été de 68 % aux dernières élections en Guyane.

Vous l'aurez compris, madame la ministre, les députés de la Gauche démocrate et républicaine s'orientent vers un vote défavorable sur les crédits de cette mission qui, malheureusement, font les frais de la politique d'austérité que le Gouvernement s'obstine à imposer aux Français et que nous ne cesserons de déplorer.

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