Intervention de Jennyfer Leclerc

Réunion du lundi 6 mai 2019 à 13h45
Commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la république, quatorze ans après la loi du 11 février

Jennyfer Leclerc :

Je suis AESH-M depuis février 2016. Je l'ai d'abord été en collège, avec une quotité de 29 heures la première année et de 36 heures l'année suivante, avant de revenir à 29 heures et de finir à 12 heures à cette rentrée. Il est facile d'imaginer que cela n'est pas évident au quotidien. On a le sentiment d'une très faible reconnaissance, au regard du nombre d'enfants qui se retrouvent sans accompagnement à la rentrée scolaire. On se demande pourquoi on ne nous donne pas de travail alors que la demande est énorme.

Je suis donc actuellement à l'école Sonia-Delaunay. En école primaire, la quotité horaire maximale étant 24 heures, tout avait été mis en oeuvre pour que j'aie ces 24 heures, puisqu'il y avait un besoin pour deux enfants du même niveau scolaire, à raison de 12 heures pour chacun. Avant les vacances d'été, le directeur avait fait en sorte que ces deux élèves se retrouvent dans la même classe afin de prévoir un adulte référent pour les deux et d'obtenir un « 24 heures », mais il n'a pas été entendu, puisqu'à la rentrée, 12 heures ont été attribuées à une autre personne.

Au-delà de mon cas personnel, le sentiment d'une très faible reconnaissance est unanimement partagé. Nous ne sommes pas considérés comme exerçant un métier mais une mission, alors que c'est une profession à part entière. Pour l'exercer, j'ai obtenu un diplôme d'accompagnement éducatif de la petite enfance. Cette situation est difficile à vivre.

Nous avons des difficultés de communication avec l'administration, mais je me garderai de la juger. Peut-être ne sont-ils pas suffisamment proches du terrain pour être en mesure de répondre à toutes nos demandes, ne serait-ce que l'envoi des bulletins de salaire. Quand nous travaillons à temps partiel, nous ne recevons pas nos bulletins de salaire en temps et en heure, ce qui nous prive du droit au complément ASSEDIC. Quand on ne touche que 400 euros par mois, sans complément ASSEDIC, on ne peut pas manger. Un effort doit être fait à ce sujet. On en revient au manque de considération à l'égard de notre métier et de notre place autour des enfants.

Il serait bien que nous ayons une formation diplômante. Certains AESH n'ont jamais reçu de formation. Ce n'était pas mon cas : j'étais diplômée avant d'exercer et j'ai reçu des heures de formation depuis, mais des collègues n'ont jamais eu de formation. Nous souhaitons la création d'un diplôme ou, pour ceux qui exercent depuis un certain temps, une validation des acquis de l'expérience (VAE) et nos acquis sur le terrain. Encadrer des handicaps différents n'est pas à la portée de tout le monde. Même pour deux enfants ayant le même handicap, la prise en charge est totalement différente. Nous aimerions que cela soit mieux considéré.

L'attribution des heures est une autre difficulté. Nous passons l'été sans savoir si nous travaillerons en septembre, ni pour quelle quotité d'heures, ni où. On ne vit pas. Mes enfants ne partent pas en vacances parce qu'il faut mettre des sous de côté, et je ne suis pas la seule dans cette situation. La plupart d'entre nous ont choisi ce métier par conviction. Avec mon diplôme, je pourrais faire d'autres métiers qui rapporteraient davantage, mais j'ai besoin de me rendre utile pour ces enfants, afin qu'ils soient reconnus et qu'ils soient dans une réelle inclusion. Je ne veux pas abandonner mon métier parce que je ne suis pas rémunérée comme il faut, mais beaucoup d'AESH en arrivent là. Elles disent qu'elles abandonnent leur vocation parce qu'elles ne peuvent plus en vivre. Savoir avant l'été où l'on va être et pour combien d'heures serait pour nous un minimum.

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