Intervention de Jean-Paul Mattei

Séance en hémicycle du mercredi 6 mars 2019 à 15h00
Débat sur les effets des aides fiscales dans le secteur du logement sur l'évolution des prix du foncier et sur la redistributivité du système fiscal

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Mattei :

Je voudrais remercier mon collègue Fabien Lainé qui m'a demandé d'inverser l'ordre de passage : cela m'a permis d'écouter l'ensemble des interventions. Je pense que nous pouvons nous rejoindre sur des chemins communs, notamment au sujet de la fiscalité.

Vous évoquiez, monsieur Peu, des régimes de faveur en matière d'investissement pour l'immobilier. Étant un vieux jeune député, je sais qu'ils datent de 1984, avec les dispositifs Quilès et autres ; et je crois que dire que l'investissement immobilier est une espèce de paradis fiscal, ce n'est pas très sérieux. On voit bien, avec l'impôt sur la fortune immobilière, l'IFI, les taxes foncières et les droits de mutation, que l'immobilier est particulièrement touché par notre fiscalité, alors qu'il contribue à l'aménagement du territoire et apporte des recettes fiscales aux collectivités.

Il serait peut-être intéressant de réfléchir à une réforme de l'imposition des plus-values immobilières, afin de libérer du foncier. Ce serait un élément important.

Le rapport de la Cour des comptes nous alerte sur la pertinence de toutes ces mesures d'aide. Je préfère, pour ma part, tout en appelant évidemment à des correctifs nécessaires, ne pas en prendre une vision purement comptable.

Le Gouvernement s'attache, par ses projets, à renforcer ce que l'on appelle le coeur des villes moyennes. Ce n'est pas moi, étant donné le territoire d'où je viens, qui m'y opposerai. Pour être petite, ma ville n'en est pas moins importante.

Il me paraît ainsi essentiel de ne pas se priver de dispositifs fiscaux qui dirigent l'épargne vers l'économie réelle. J'insiste bien sur l'économie réelle, au sujet de laquelle j'ai eu souvent l'occasion de m'exprimer : il n'y a pas que les start-up. Je considère, pour ma part, que l'économie réelle, c'est l'investissement immobilier, qui est créateur d'emplois et de valeur.

On s'expose toujours, dès lors que l'on pose des critères de seuil ou de zonage, au risque d'exclure des territoires qui auraient besoin d'attirer des investisseurs. Des effets pervers, liés aux modifications fiscales, peuvent survenir : ainsi, il ne faudrait pas que le recentrage du dispositif Pinel dans le périmètre couvert par le dispositif Denormandie, pour les territoires Action coeur de ville ou ceux couverts par des ORT ne détourne les flux d'épargne vers des réhabilitations au détriment des programmes neufs. Nos territoires ont besoin de ces deux éléments.

Je m'accorde avec vous, monsieur Peu, sur la nécessité d'une réflexion sur la TVA à taux réduit pour certains investissements. Mais, à mon avis, tout est compatible : l'investissement des particuliers et celui des institutions, qui doivent procéder parallèlement.

Les chiffres sont parlants : ces aides ont contribué à dynamiser le secteur immobilier, porteur d'emplois. La part de la construction dans le PIB était de 10,8 % en 2017, contre moins de 10 % aujourd'hui pour les ventes de logements neufs, et moins de 7,3 % pour les ventes entre particuliers. L'investissement des ménages fléchit à 2 % au lieu de 5,7 % en 2017. Cela doit susciter notre vigilance.

J'aimerais, monsieur le ministre, vous soumettre l'idée de développer davantage votre dispositif dans les villes moyennes, et appeler votre attention sur les risques que représente l'instabilité fiscale, lorsque ces dispositifs sont supprimés ou fortement modifiés, comme ce fut le cas du Pinel.

Il faut, je le répète, réfléchir à une réforme de la fiscalité sur les plus-values immobilières et les revenus fonciers. Je vous rappelle que ceux-ci supportent à la fois des contributions sociales et l'impôt sur le revenu : ils ne bénéficient pas de la flat tax.

Il convient donc, à moyen terme, de mesurer la pertinence de ces orientations de l'épargne dans le secteur immobilier, parce que c'est un secteur porteur d'emplois, et qui n'est pas délocalisable.

La Cour des comptes préconise, enfin, de renforcer la place des investisseurs institutionnels dans la construction et la location de logements privés. Mais une telle orientation ne saurait, selon moi, remplacer l'incitation à investir dans la pierre que représentent les dispositifs d'aide fiscale destinés aux particuliers. Quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet ?

Voilà mon souhait, monsieur le ministre : j'aimerais que l'on ne se contente pas d'investir dans certaines zones, que l'on ne se contente pas de réhabiliter l'ancien, mais que l'on agisse dans le neuf aussi, que l'on préserve enfin – peut-être en corrigeant des aubaines qui peuvent exister – l'investissement des particuliers.

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