Intervention de Nicole Belloubet

Séance en hémicycle du mardi 15 janvier 2019 à 9h30
Questions orales sans débat — Mise en oeuvre d'un pouvoir judiciaire

Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice :

Ces dernières années, notre législation a évolué dans le sens d'une plus grande indépendance des magistrats, notamment de ceux du parquet, pour ce qui concerne tant l'exercice leurs fonctions que les conditions de leur nomination.

La loi du 25 juillet 2013 interdit les instructions individuelles. Seule subsiste, à l'article 30 du code de procédure pénale, la possibilité pour le garde des sceaux d'adresser aux magistrats du ministère public des instructions générales de politique pénale, disposition ayant pour unique but d'assurer l'égalité des citoyens devant la loi sur tout le territoire de la République. Vous voyez donc qu'au titre de cette loi, le Gouvernement ne peut transmettre aucune instruction individuelle à aucun parquet.

Pour ce qui est du statut des magistrats du parquet, la réforme constitutionnelle de 2008 a confié la présidence du Conseil supérieur de la magistrature – CSM – , initialement dévolue au Président de la République, au premier président de la Cour de cassation et au procureur général près cette même cour. Le projet de loi constitutionnelle adopté par les deux assemblées en 2016, mais qui n'a jamais été proposé au Congrès, proposait de modifier les modalités de nomination des magistrats du parquet, en prévoyant un avis conforme du CSM. Il proposait aussi de faire de ce dernier le conseil de discipline de ces magistrats.

Le projet de révision constitutionnelle qui a été présenté au Parlement au printemps dernier, et dont l'examen a débuté à l'Assemblée nationale, reprend ces dispositions, qui renforcent l'indépendance des membres du parquet.

Cependant, conformément à l'article 20 de la Constitution, « le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation ». À ce titre, il doit orienter la politique pénale par des instructions générales qui ne remettent nullement en cause l'indépendance des magistrats du parquet. Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs confirmé, dans une décision récente du 8 décembre 2017, que ces dispositions assuraient une conciliation équilibrée entre le principe d'indépendance de l'autorité judiciaire et les prérogatives que le Gouvernement tient de l'article 20. Reflet de cette spécificité, l'article 5 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 relative au statut des magistrats place les magistrats du parquet sous l'autorité du garde des sceaux.

Cette autorité, qui s'exerce donc via des instructions de politique pénale générale, ne remet pas en cause leur indépendance. En effet, les magistrats du parquet disposent seuls du pouvoir de déclencher l'opportunité des poursuites, et leur parole à l'audience est libre.

Cette organisation ne remet donc pas en cause le principe de la séparation des pouvoirs à la française. Vous voyez, monsieur le député, que l'indépendance des magistrats, notamment de ceux du parquet, est assurée.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.