Intervention de Gisèle Biémouret

Séance en hémicycle du lundi 26 novembre 2018 à 21h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGisèle Biémouret :

La compensation que vous prévoyez ne sera pas intégrale. Elle fragilisera à court terme notre agriculture, malgré nos alertes et propositions.

Je prendrai un dernier exemple : la suppression du forfait de réorientation des fausses urgences vers la médecine de ville. Là aussi, les sénateurs ont fait preuve de discernement sur la portée de cette mesure – une feinte, en réalité – , qui ne s'avérera pas efficace sans la mobilisation des médecins de ville.

La commission mixte paritaire n'est pas parvenue à un accord. Et pour cause : les points de désaccord n'ont pas permis d'avancer sur un texte de compromis. Nous ne pouvons préjuger d'une issue différente au vu de nos débats de la semaine dernière en commission.

Cette nouvelle lecture a lieu dans un contexte de gronde sociale, face à laquelle vous préférez persister dans des choix qui éloignent les principes de la sécurité sociale d'un accroissement de la justice sociale. Le médiatique mouvement de défiance des « gilets jaunes » ne doit pas occulter la mobilisation des infirmiers la semaine dernière, les différentes mobilisations dans les hôpitaux publics comme la maternité du Blanc et dans les EHPAD, ni le mécontentement exprimé par les retraités – je pense en particulier aux retraités agricoles qui se désespèrent du manque de considération.

Les débats en première lecture n'ont pas permis de dissiper les doutes face aux apparences trompeuses de vos ambitions. Ils n'ont pas non plus permis de nous convaincre que les Français sortiraient gagnants de vos choix. Ce sera malheureusement le contraire pour une majorité d'entre eux, en particulier les plus modestes et ceux appartenant aux classes moyennes.

De manière générale, les grandes orientations contenues dans ce PLFSS ne sont pas satisfaisantes. Dans le prolongement de vos orientations fiscales et économiques, elles font évoluer notre sécurité sociale vers un modèle anglo-saxon totalement dénaturé par rapport à ses valeurs fondatrices. Ce PLFSS persiste à contredire la vision d'un État providence censé assurer la protection des plus modestes et, plus largement, de nos concitoyens en situation de faiblesse.

J'en veux pour preuve le changement de modèle des relations financières entre la sécurité sociale et l'État. Les futurs excédents éventuels des comptes sociaux devront désormais abonder le budget de l'État pour réduire le déficit au lieu de servir l'amélioration de notre système de santé. Vous prévoyez ainsi le siphonnage par l'État des recettes de la sécurité sociale. C'est pourquoi notre groupe a décidé de déposer un amendement visant à supprimer ce transfert et un autre visant à préserver l'autonomie financière de la sécurité sociale.

J'en veux aussi pour preuve votre obstination sur le quasi-gel des prestations familiales et des pensions de retraite et d'invalidité pour les deux prochaines années. Cette mesure va affecter des milliers de nos compatriotes. Dans un contexte de retour à l'équilibre augmentant nos marges de manoeuvre, ce choix obstiné va se traduire par une perte de pouvoir d'achat, puisque l'inflation de 1,7 % en 2019 sera supérieure au taux retenu de 0,3 %.

J'en veux pour preuve, encore, le manque de moyens supplémentaires ou d'initiatives pour répondre à l'urgence sociale et aux difficultés auxquelles sont confrontés les personnels des hôpitaux publics, des EHPAD et des services de psychiatrie.

J'en veux pour preuve, enfin, l'absence de réponse au péril de la désertification médicale. La création de 4 000 postes d'assistants médicaux, dont les contours restent à définir, risque de se transformer en poudre de perlimpinpin.

Parmi les effets indésirables de votre politique, je veux appeler votre attention sur l'impact de vos choix sur la générosité des Français en faveur des associations humanitaires et caritatives. Pour la première fois en quinze ans, les dons sont en baisse en raison de la transformation de l'impôt de solidarité sur la fortune et de la hausse de la CSG. Les retraités donnent en moyenne 90 euros par an ; or, pour beaucoup, cette somme correspond au montant de la hausse actuelle de la CSG. Plus de 82 % des donateurs du Secours populaire français sont des retraités. Le manque à gagner de 150 millions d'euros met en péril les programmes de plusieurs associations, qui se voient durablement affaiblies. Il condamne une partie de votre stratégie de lutte contre la pauvreté et l'exclusion. Votre mesure de correction sur l'augmentation de la CSG ne parviendra pas à rattraper ce manque à gagner vital.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.