Intervention de Frédérique Vidal

Séance en hémicycle du mardi 13 novembre 2018 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2019 — Mission recherche et enseignement supérieur (état b)

Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation :

Nous avons la chance d'avoir l'INCa, qui centralise tous les financements dédiés à la recherche sur le cancer, ce qui permettra d'ailleurs de garantir le fléchage de l'argent ainsi qu'un suivi de son utilisation, auquel il faut associer parents, familles, parlementaires et autres – c'est une question qu'il nous faudra creuser.

L'INCa regroupe tous les financements spécifiques consacrés à la lutte contre le cancer, hors salaires et financements récurrents de la recherche des laboratoires en général. Sur son budget, 12 % sont spécifiquement fléchés vers les cancers pédiatriques, soit 8 millions d'euros. Pas un seul projet évalué comme un « vrai » projet, conjuguant recherche fondamentale, translationnelle et clinique ainsi qu'un essai, n'est pas financé par l'INCa.

Ajouter 5 millions d'euros à ces 8 millions, c'est apporter des financements à des projets de qualité. Y ajouter 18 millions d'euros, ce serait compliqué. Il faudrait n'en allouer que 5 à l'INCa, passant ainsi à 13 millions pour les projets évalués positivement, comme nous le prévoyons – ce qui est déjà énorme. Le reste serait affecté à la recherche en général. Mais moi, je ne sais pas flécher vers les cancers pédiatriques les sommes dévolues à la « recherche en général » !

Ces 5 millions d'euros que nous proposons, qui sont destinés à la recherche fondamentale – n'oubliez qu'ils vont au programme 172 – paraissent un montant correct et judicieux au regard des projets financés actuellement dans le domaine de la recherche fondamentale.

Le sujet est éminemment interministériel, je l'ai dit, mais essentiellement entre le ministère chargé de la santé et celui de la recherche. Le plan cancer qu'Agnès Buzyn et moi devons préparer pour l'année 2020 doit présenter une vision des financements de la recherche fondamentale en laboratoire, de la recherche translationnelle, de la recherche clinique, mais aussi de la constitution de cohortes. Ce sont ainsi 6 millions d'euros, au travers du programme d'investissements d'avenir, qui sont consacrés au financement des cohortes d'enfants malades. Les cohortes constituées seront interrogées parfois pour des cancers pédiatriques liés à des anomalies génétiques, et parfois pour des maladies génétiques rares qui sont à l'origine de cancers. Je ne considère donc pas ces 6 millions d'euros comme des financements spécifiques aux cancers pédiatriques.

C'est dans le cadre du futur plan cancer que nous devrons travailler toute la chaîne. Je comprends bien que l'estimation faite par les médecins, les hôpitaux, les centres d'oncologie pédiatrique et les familles s'inscrive dans cet ordre de grandeur, mais justement parce qu'il comprend le financement des cohortes et des essais cliniques, l'accompagnement des soins ou encore l'accueil des familles, qui ne relèvent absolument pas du programme 172.

Voilà les raisons de ce choix de 5 millions d'euros récurrents, qui s'accompagne de l'engagement à travailler, dans le cadre du plan cancer, sur les cancers pour lesquels il n'existe pas de thérapie efficace.

En effet, l'efficacité des traitements a augmenté au fur et à mesure que nous avons maîtrisé la chimiothérapie. Tout ce qui peut être traité par la chimiothérapie ou la radiothérapie l'est aujourd'hui : on peut encore améliorer les traitements ou diminuer les séquelles, mais c'est traité. Mais restent 20 % pour lesquels nous ne parvenons pas à augmenter les taux de traitement et de rémission, parce que nous ne comprenons pas ce qui se passe. La chimiothérapie, la radiothérapie ne marchent pas. La solution viendra peut-être des lasers, ou de la chimie… Lorsqu'on atteint un palier dans les traitements thérapeutiques, c'est qu'on a fini de traiter tout ce qu'on sait traiter, tout ce qu'on a compris. Voilà pourquoi il est si important de faire travailler ensemble un maximum de disciplines pour trouver une autre façon de traiter ce qui résiste aujourd'hui à la chimiothérapie et à la radiothérapie.

C'est un combat conjoint auquel il faut associer les familles. C'est un combat dans lequel il faut énormément leur parler. La charge émotionnelle est énorme, mais lorsqu'elles subissent le pire, le plus important pour elles est de savoir qu'elles vont peut-être contribuer à ce que le pire n'arrive pas à d'autres. Il faut réussir à fédérer cette solidarité des familles au sein d'associations, comme cela a été le cas pour les maladies rares : des associations qui avaient été créées autour d'un cas terrible ont travaillé ensemble, se sont structurées et aujourd'hui participent pleinement à la coconstruction du plan maladies rares avec les ministères chargés de la recherche et de la santé.

En résumé, oui, ce sont des financements destinés aux cancers pédiatriques. Oui, nous serons capables de les flécher et de les suivre, parce que l'INCa existe. Oui, il est essentiel de définir le juste calibrage pour le programme 172, mais aussi d'être capables dès l'année prochaine d'aller plus loin dans le cadre du prochain plan cancer. Oui, nous travaillerons avec les familles de patients, les chercheurs, les médecins et bien sûr les parlementaires parce que ce sujet doit tous nous concerner.

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