Intervention de Mathilde Lignot-Leloup

Réunion du jeudi 21 juin 2018 à 10h30
Commission d'enquête sur l'égal accès aux soins des français sur l'ensemble du territoire et sur l'efficacité des politiques publiques mises en œuvre pour lutter contre la désertification médicale en milieux rural et urbain

Mathilde Lignot-Leloup, directrice de la sécurité sociale :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, la direction de la sécurité sociale travaille, dans le cadre de son domaine de compétence, à la mise en oeuvre du plan d'égal accès aux soins lancé par le Gouvernement en octobre dernier.

Il est clair qu'il n'existe pas de solution miracle pour améliorer la présence médicale dans les territoires où l'offre de soins est insuffisante. C'est en laissant à la disposition des acteurs un panel d'outils qu'il est possible d'agir sur le terrain.

La direction de la sécurité sociale se concentre sur quatre leviers : favoriser l'installation et le maintien des professionnels de santé ; faciliter l'exercice coordonné ; encourager les délégations de compétences ; soutenir le développement de la télémédecine.

Pour favoriser l'installation et le maintien des professionnels de santé, nous nous appuyons sur les contrats incitatifs négociés dans la convention médicale. Une autre piste intéressante consiste à rechercher comment accroître le temps de présence médicale, même s'il n'y a pas d'installation définitive. Dans ce but, nous cherchons à faire monter en charge le dispositif du contrat solidarité territoriale médecin (CSTM) qui permet d'inciter les médecins à assurer des heures de consultation dans ces zones. L'avenant 6 qui vient d'être conclu par l'assurance maladie renforce l'incitation financière : la majoration financière passera de 10 % à 25 % des honoraires. Nous devrons promouvoir ce nouveau dispositif et mieux le faire connaître.

Nous développons également le cumul emploi-retraite : le plafond d'autorisation a été relevé depuis le 1er janvier 2018.

Nous allons en outre favoriser l'exercice mixte dans ces zones en renforçant la présence de remplaçants. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 (LFSS) a permis aux médecins candidats au remplacement ne plus être soumis au délai préalable d'exercice libéral de trente jours. Nous allons poursuivre les travaux dans ce sens.

Le deuxième levier sur lequel nous avons beaucoup travaillé est le soutien à l'exercice coordonné. Les travaux de l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES) ont montré que la présence de maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) et de centres de santé d'exercice regroupé constituait une incitation pour les professionnels à rester dans les territoires ou à venir s'y installer. L'accord conventionnel interprofessionnel (ACI) prévoit un développement de ces dispositifs. Nous souhaitons utiliser le cadre d'innovation organisationnelle établi par l'article 51 de la LFSS pour 2018 afin d'expérimenter sur le territoire des modalités d'incitation aux exercices regroupés ou coordonnés. Un appel à manifestation d'intérêts a été publié en mai dernier pour engager les maisons de santé pluriprofessionnelles à faire évoluer leurs actions. Ces dispositifs peuvent être pilotés au niveau national, mais ils visent surtout à favoriser l'émergence de projets locaux et à les soutenir.

Le troisième levier consiste à encourager les délégations de compétences pour dégager du temps médical et le recentrer sur certaines prises en charge, en particulier dans les zones sous-denses. La DSS a notamment soutenu l'expérimentation ASALEE – Action de santé libérale en équipe – qui repose sur une distribution des tâches entre médecins et infirmiers. L'évaluation effectuée par l'IRDES a montré que l'intervention des infirmières ASALEE dans les territoires sous-denses avait permis aux médecins de dégager au moins 10 % de temps médical. Forts de ces résultats, nous avons prévu d'augmenter le nombre d'infirmiers participant au dispositif : nous déploierons 100 équivalents temps plein supplémentaires, ce qui permettra d'atteindre un total de 400 ETP en 2018. En outre, la LFSS a inscrit ASALEE dans un mécanisme de financement de droit commun.

La LFSS a également défini des priorités pour les protocoles de délégations de compétences : un arrêté publié en début d'année permettra de fluidifier leur élaboration. Nous pourrons certainement aller plus loin. Deux protocoles seront généralisés en matière de soins visuels, qui constituent une priorité dans certains territoires. Ils s'appuieront notamment sur une collaboration entre ophtalmologues et orthoptistes.

Nous disposons donc d'instruments nouveaux ; reste à accélérer leur mise en oeuvre et leur déploiement.

Quatrième levier : le développement de la télémédecine et de la télé-expertise. L'assurance maladie vient de conclure un accord avec les représentants des médecins : à partir du 15 septembre 2018, la téléconsultation rentrera dans le droit commun, conformément aux dispositions de la dernière LFSS, et, en 2019, la télé-expertise sera développée partout en France.

Les délégations de compétences et la télémédecine concernent l'ensemble des territoires, mais présentent un intérêt particulier dans les zones sous-denses où elles permettent de faire face à la pénurie de médecins.

La DSS participe, dans le cadre de ses compétences, au plan d'égal accès aux soins. À mesure que les territoires s'empareront des différents outils mis à leur disposition, nous verrons les dispositifs qui fonctionnent bien, ceux qui fonctionnent moins bien et nous proposerons des adaptations en conséquence.

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