Intervention de Barbara Pompili

Séance en hémicycle du lundi 28 mai 2018 à 16h00
Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire — Après l'article 14 ter

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Pompili :

Cet amendement me tient particulièrement à coeur, car il avait été voté dans le cadre du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité lorsque j'étais secrétaire d'État chargée de la biodiversité. Il vise à nous doter enfin de vrais outils pour que nous ne perdions pas toute notre biodiversité agricole, notamment en matière de fruits et légumes.

Les chiffres ont été rappelés, notamment par la FAO, l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture : nous avons perdu 75 à 80 % des variétés traditionnellement utilisées par les paysans. Certaines ne sont pas encore définitivement perdues, mais, si nous continuons à nous en tenir uniquement au nombre très réduit de variétés actuellement inscrites au catalogue officiel – cela est dû à des raisons liées à la standardisation, à la taille, au goût et autres – nous allons perdre tout ce qui fait notre richesse depuis de années.

Aujourd'hui, il existe une directive européenne sur les variétés de conservation. On pourrait donc penser que tout va bien et que le travail est fait. Reste que, comme tout le droit européen – ce qui justifie mes fortes divergences avec le ministère sur l'appréciation de ce droit – , la directive est limitée aux semences cultivées en vue d'une exploitation commerciale.

C'est sur les semences cultivées en vue d'une exploitation non commerciale que porte l'amendement. La directive ne permet de conserver qu'un très petit nombre de variétés anciennes et locales. Seules onze variétés sont inscrites en France dans cette catégorie : neuf variétés de pommes de terre, une de navets et une de maïs. C'est dérisoire ! Au niveau européen, on n'en trouve que soixante et onze, soit une moyenne de deux variétés et demie par État membre.

Nous ne pouvons pas continuer à perdre notre biodiversité. Aujourd'hui, des jardiniers amateurs accomplissent un travail extraordinaire, parce qu'il échappe aux contraintes de l'exploitation commerciale et à l'obligation de la rentabilité. Ils ont recueilli des collections plus ou moins vastes qui sont notre mémoire, mais une mémoire entretenue dans le vivant, qui ne ressemble en rien à une banque.

La loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages leur a donné la possibilité de pratiquer des échanges à titre non onéreux. Il est essentiel que nous leur accordions la possibilité de le faire également à titre onéreux. Cela signifie simplement qu'ils pourront échanger des petits sachets de graines – jamais à des agriculteurs, car c'est interdit – afin qu'ils puissent rentrer dans leurs frais.

Une telle mesure concerne principalement des associations, dont on connaît la difficulté qu'elles ont à se financer. Aidons-les à le faire et à poursuivre un travail d'intérêt public crucial au moment où, dans notre pays comme ailleurs, nous sommes en train de perdre la biodiversité.

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