Intervention de Stéphane Travert

Séance en hémicycle du lundi 28 mai 2018 à 16h00
Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire — Article 14

Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation :

Avant d'en venir aux amendements, je voudrais vous exposer comment le Gouvernement envisage cette partie du projet de loi sur les produits phytosanitaires.

Je tiens d'abord à vous saluer pour la qualité des échanges qui ont eu lieu sur cet article, comme depuis le début de l'examen de ce projet de loi. Il ne s'est pas agi de montrer du doigt qui ce soit. Les désaccords peuvent être surmontés : nous devons trouver ensemble la meilleure trajectoire et les meilleurs compromis afin d'avancer ensemble, pour nos agriculteurs. Nous devons aussi prendre le temps d'expliquer notre action, et de tracer ensemble des perspectives positives.

Conformément à la volonté du Président de la République, nous travaillons avec les professionnels et la société civile à rendre l'agriculture française moins dépendante des pesticides. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation ne travaille pas seul sur ce sujet, mais en lien avec Nicolas Hulot et le ministère de la transition écologique et solidaire, avec Agnès Buzyn et le ministère de la santé et des solidarités, ainsi qu'avec Frédérique Vidal et le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. Nous avons en effet besoin, dans ce domaine, de croiser les regards, de combiner l'approche économique, l'approche environnementale et l'approche sanitaire – sans oublier la recherche et l'innovation, qui sont absolument nécessaires. C'est ainsi que nous devons développer l'agronomie, en assurant la continuité de nos actions.

Comme vous le savez, nous avons présenté le 25 avril dernier la feuille de route du Gouvernement sur les produits phytosanitaires. Je la tiens à la disposition des parlementaires qui n'en auraient pas pris connaissance. Cette feuille de route avait été annoncée par le Premier ministre dans son discours de clôture des États généraux de l'alimentation le 21 décembre dernier.

Elle présente quatre engagements précis, quatre priorités claires. D'abord, diminuer rapidement l'utilisation des substances les plus préoccupantes pour la santé et l'environnement. Ensuite, mieux connaître les impacts pour mieux informer et protéger la population et les professionnels – ce qui aboutit bien sûr à préserver l'environnement. La troisième priorité est d'amplifier la recherche-développement d'alternatives et la mise en oeuvre de ces solutions par les agriculteurs, qui sont les premiers concernés. Enfin, la quatrième consiste à renforcer le plan Écophyto 2, améliorer sa gouvernance et son fonctionnement.

Pour faire tout cela, nous avons besoin de mobiliser les filières et les agriculteurs : c'est une condition sine qua non pour avancer en bon ordre, pour que les choses changent. Nous devons avancer sur ce sujet avec confiance et avec détermination. C'est pour cela que le Président de la République a fixé des objectifs ambitieux, comme la sortie du glyphosate en trois ans alors même que l'Europe a autorisé à nouveau l'utilisation de ce produit pour cinq ans. Sur ce point, la France est devant : elle montre le chemin. C'est ce qui lui permet d'être écoutée au niveau européen. Fixer une date au-delà de laquelle il ne sera plus possible d'utiliser ce produit, cela permet de mobiliser dès maintenant la recherche, l'innovation, pour trouver des solutions durables. C'est ainsi que nous respecterons cette feuille de route.

S'il a décidé que nous devrons sortir du glyphosate en trois ans, le Président de la République a aussi précisé qu'il n'y aurait pas d'interdiction sans solution. J'y reviendrai tout à l'heure, quand nous aurons ce débat, car c'est un élément de réflexion important.

Pour faire évoluer les pratiques, nous avons besoin d'outils. Certains sont de niveau législatif : c'est d'eux qu'il sera question dans les articles à venir. Je salue à ce propos la commission pour ses travaux qui ont permis d'enrichir le texte sur plusieurs points. L'un d'eux est l'encadrement des pratiques commerciales, pour éviter les incitations aux achats de précaution. Un autre est la séparation de la vente et du conseil, pour que les agriculteurs aient un vrai conseil, sans intérêt sur la vente de produits phytosanitaires – je sais qu'il y a sur ce point un débat : nous le mènerons de manière sereine. Il y a également la formation continue, grâce au certificat d'économie de produits phytopharmaceutiques et au certificat de formation des utilisateurs professionnels dit « certiphyto », mais aussi le rôle de l'APCA – assemblée permanente des chambres d'agriculture – et de l'enseignement agricole dans la réduction des produits phytosanitaires.

Voilà, mesdames et messieurs les députés, ce sur quoi vous avez travaillé en commission. Voilà les avancées que vous avez permises en ce qui concerne l'article 14 – sans parler, bien évidemment, du développement du biocontrôle, évoqué à l'article 14 quinquies.

Nous avons besoin aussi d'instruments pour renforcer la protection de nos populations, de nos concitoyens, de nous-mêmes – mais aussi de l'environnement. C'est pourquoi je présenterai un amendement visant à permettre à l'autorité administrative de prendre des mesures pour la protection des riverains.

D'autres mesures prévues par la feuille de route ne relèvent pas nécessairement du domaine de la loi : je pense, par exemple, à la révision des arrêtés visant à protéger les abeilles et les points d'eau.

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