Intervention de Alexis Corbière

Séance en hémicycle du mercredi 28 mars 2018 à 21h30
Régime d'ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexis Corbière :

Ne vous inquiétez pas, ce qui suit est pour vous.

En région Rhône-Alpes-Auvergne, le numéro deux du conseil régional – un élu Les Républicains – a pourtant tenu à assister à une cérémonie de lever de drapeau dans l'une des écoles Espérance Banlieue. Certains élus locaux ont, quant à eux, décidé d'apporter des financements publics à ces établissements. La région Île-de-France, dirigée par Mme Pécresse, l'a fait à hauteur de plus de 30 000 euros. La région Auvergne-Rhône-Alpes, dirigée par M. Wauquiez, l'a fait à hauteur de 250 000 euros d'argent public. Et, comme un symbole de l'abandon du public au profit d'un privé douteux, le maire Les Républicains de la commune de Pierre-Bénite a permis l'installation d'une école Espérance Banlieue dans les bâtiments de l'ancien conseil municipal de la jeunesse.

Tous ces faits prouvent concrètement l'affection que portent certains de nos collègues au développement des écoles privées hors contrat. Nous nous désolidarisons totalement de ces actes. Force est de constater qu'en 2018, à l'heure où il est à la mode de se réclamer de la lutte contre l'obscurantisme et pour la laïcité, valeurs que nous partageons tous verbalement, des deniers publics vont encore, directement ou non, à l'instruction privée hors contrat, qu'elle soit confessionnelle ou non.

Ce texte qui nous vient du Sénat aurait pu être l'occasion d'interdire tout financement, direct ou indirect, des écoles privées hors contrat : il n'en est rien. C'est pourquoi nous avons évidemment présenté des amendements visant cette interdiction. Ce texte aurait pu être l'occasion de revenir sur le régime d'ouverture de ces établissements : il n'en est rien. Soyons concrets : si ce texte est adopté, il suffira toujours, demain, de déposer une simple déclaration. Il ne sera pas nécessaire d'obtenir une autorisation, comme cela a été demandé par de nombreux groupes, notamment le groupe communiste du Sénat. Ce texte aurait pu être l'occasion d'interdire toute discrimination fondée sur le sexe pour l'inscription d'un enfant dans une école privée : il n'en est rien. Là encore, nous souhaitons que le texte soit amendé pour garantir l'égalité de toutes et tous.

Ce texte aurait pu être aussi l'occasion de discuter des moyens réels mis à la disposition du contrôle des établissements privés et des enseignements qui y sont dispensés : il n'en est rien. Je veux, du reste, alerter sur l'inadéquation entre le nombre d'inspecteurs chargés du contrôle des écoles et le besoin qu'il y a de s'assurer de l'égal accès à l'instruction de tous nos enfants, tel que le stipule l'article 13 du préambule de la Constitution de 1946.

Un rapport édité l'an dernier par l'académie de Versailles – vous le connaissez, monsieur le ministre – , fait état d'une situation alarmante : sur la centaine d'établissements privés hors contrat recensés sur ce territoire, seule une trentaine a été contrôlée ces trois dernières années, et ces contrôles, peu nombreux mais déjà très inquiétants, montrent que les élèves de ces écoles ne maîtrisent pas le socle commun des connaissances et que certains enseignements fondamentaux sont peu et mal enseignés. Je reprends le cas des écoles Espérance Banlieue : dans l'établissement de Montfermeil en Seine-Saint-Denis, le taux de réussite au brevet n'est que de 60 %, contre 83 % dans le reste du département.

Enfin, ce texte aurait pu être l'occasion d'un vrai durcissement des sanctions à l'encontre des établissements qui ne respectent pas les valeurs républicaines : il n'en est rien. Beaucoup ici se réclament de la lutte contre les fake news. L'objet de ce texte porté par la majorité aurait pu être l'occasion de lutter contre les fake schools. Ce n'est pas le cas.

Deux piliers de l'enseignement se rejoignent pourtant ici : le droit à l'instruction, d'une part, qui permet à chacun de se construire un esprit critique et d'acquérir les bases de la connaissance, et le droit à l'information, d'autre part. Ce n'est pas le cas. Ces deux piliers sont complémentaires : voilà pourquoi nous luttons à la fois pour le renforcement de l'école publique et pour un Conseil de déontologie du journalisme, par exemple. Ni fake news, ni fake schools, voilà qui permettrait l'émancipation de notre société et des individus qui la composent.

Chers collègues, pour conclure, je souhaite revenir sur le concordat qui subsiste en Alsace-Moselle.

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