Intervention de Danièle Obono

Séance en hémicycle du lundi 10 janvier 2022 à 16h00
Activité professionnelle indépendante — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

…car ils ont su maintenir les liens sociaux, notamment dans les petites communes, en restant ouverts même s'ils ne disposaient pas toujours de moyens de protection et en proposant des produits de première nécessité ainsi que, surtout, des contacts. Nous tenions à leur adresser, ainsi qu'à l'ensemble des travailleurs et travailleuses essentiels qui nous ont aidés et continuent à le faire pendant la crise, tous nos remerciements.

Le groupe La France insoumise soutient l'objectif affiché de l'article 1er de ce texte, la séparation entre le patrimoine personnel et le patrimoine professionnel pour les entrepreneurs et entrepreneuses individuels, l'idée étant qu'en cas de faillite, les banques ne pourront pas récupérer leur dû sur le patrimoine personnel des indépendants et indépendantes. Cependant la rédaction actuelle laisse présager que cette protection sera, tout comme la promesse de leur indemnisation chômage, un magnifique tonneau percé. En effet, si l'entrepreneur ou l'entrepreneuse individuel peut renoncer à cette séparation auprès d'un créancier pour un engagement précis, comment se prémunir contre le risque de chantage, par exemple de la part des banques ? C'est pourquoi nous proposons de supprimer la possibilité de renoncer à la séparation des patrimoines.

En dehors de cette mesure, nous regrettons que ce projet de loi ne soit pas plus substantiel. Il y aurait en effet tant à dire et à faire sur le statut des indépendants. À l'heure où la fonction publique est détricotée et où le code du travail protège de moins en moins les salariés du privé, le statut d'indépendant ou d'indépendante est souvent plébiscité par les néolibéraux justement parce qu'il est fort peu protecteur. Toute une rhétorique accompagne ce glissement vers moins de droits sociaux : il faudrait ainsi valoriser la prise de risque, l'envie d'entreprendre, la flexibilité ou encore la mobilité.

Cependant, rappelons-le : même dans les secteurs d'innovation et de recherche, les meilleurs résultats s'obtiennent quand les travailleurs et travailleuses n'ont pas peur du lendemain. Dès lors, pourquoi maintenir des millions d'indépendants et indépendantes dans cette peur ? Nous l'avons justement observé à l'occasion de la crise du covid-19 : sans l'assurance chômage qui a fonctionné à plein régime, des millions de travailleurs et travailleuses salariés auraient brutalement basculé dans la pauvreté.

Les indépendants et indépendantes, de leur côté, ont, pour beaucoup, subi de plein fouet la crise sanitaire justement parce qu'ils disposaient de très peu de droits sociaux tout en étant trop souvent les oubliés des dispositifs d'aide. L'INSEE estime que 100 000 indépendants et indépendantes ont perdu leur statut durant l'année 2020. Les PGE, les prêts garantis par l'État, sont difficiles à rembourser pour certains, les loyers ayant continué de s'accumuler.

Nos propositions d'amendement apportent des réponses aux problèmes concrets qui se posent. Le report du début du remboursement des PGE de deux ans, ajouté à la création d'une caisse de défaisance qui prendrait en charge les dettes insoutenables des PME et des indépendants et indépendantes, permettraient ainsi de desserrer l'étau financier. De même, la création d'un pôle public bancaire, que nous appelons également de nos vœux, permettrait de financer l'escompte des PME à taux zéro. Plus largement, pour prévenir les faillites, nous proposerons la mise en place d'un service public d'accompagnement des PME en difficulté.

Aujourd'hui encore, que ce soit dans les domaines de l'événementiel, du sport, de la culture, de l'agriculture ou des transports, les indépendants et indépendantes sont les plus durement touchés par la situation actuelle, conséquence logique de la précarité de leur statut. Une étude de l'INSEE de ce mois de janvier montre ainsi que les inégalités sont beaucoup plus marquées entre indépendants qu'entre salariés, 18 % des premiers étant sous le seuil de pauvreté contre 5 % des seconds. Les raisons en sont évidentes, à commencer par une protection sociale minimale, que ce soit en cas de perte d'activité ou bien en cas de maladie ou d'invalidité : 45 % des indépendants déclarent avoir dû reporter des soins pour des motifs financiers. Pour répondre à ce problème, nous pensons qu'il faut faciliter l'accès à l'allocation des travailleurs indépendants : nous défendrons un amendement pour que le délai minimal entre deux demandes ne soit plus fixé à cinq ans comme le prévoit le texte.

En résumé, nos propositions visent à ce que les revenus de ces travailleurs et travailleuses s'améliorent. Et nous regrettons, une fois de plus, que le Gouvernement ne fasse rien contre leur pauvreté. Notre groupe La France insoumise souhaite qu'à l'avenir, ces professions, qui ont une place fondamentale dans le tissu social et économique – cela a été souligné –, soient vraiment considérées comme un fer de lance de ce point de vue et soient beaucoup plus protégées socialement.

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