Intervention de Danièle Obono

Séance en hémicycle du vendredi 7 janvier 2022 à 15h00
Accueil des migrants au sein de l'union européenne et réforme du règlement dublin iii

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

En 2019, sur les 272 millions de migrants et migrantes internationaux, 2,7 millions ont immigré vers l'Union européenne, soit à peine 1 %. L'essentiel des migrations a lieu au sein des pays d'origine ou vers les pays limitrophes. Ce sont donc principalement les pays pauvres et en voie de développement, comme on dit, qui accueillent les migrants et les migrantes.

Les États européens, quant à eux, font trop souvent preuve d'une hostilité démesurée vis-à-vis des migrants et des migrantes – hostilité qui n'a d'égal que les prédations qu'ils commettent fréquemment dans leurs pays d'origine. Cette attitude politique a des conséquences.

Selon diverses estimations, depuis 1993, au moins 50 000 personnes ont trouvé la mort en cherchant à traverser les frontières extérieures de l'Union européenne, principalement en Méditerranée. Et depuis 1999, plus de 300 personnes sont mortes à Calais et dans sa région en tentant de franchir la frontière britannique externalisée en France.

Il y a urgence à la fois à redéfinir les termes du débat public sur les migrations, qui est trop souvent monopolisé par les discours xénophobes, et à refonder notre politique d'accueil.

« Indigne », « injuste », « irrationnel » : voilà les épithètes par lesquelles les associations qualifient le futur règlement de Dublin III réformé, censé constituer la réponse européenne à cette crise de l'accueil. Le pacte européen sur l'immigration et l'asile présenté par la Commission européenne affiche la volonté de renforcer l'imperméabilité des frontières européennes, d'accentuer la solidarité entre les États membres en matière d'accueil et de faciliter les expulsions.

Plusieurs dimensions de cet agenda sont très problématiques et apparaissent très insuffisantes pour assurer un accueil digne à ces personnes qui, dans leur grande majorité, arrivent pour trouver refuge. Les raisons de leur migration sont multiples et diverses, mais tout le monde s'accorde aujourd'hui à penser qu'elles ne se déplacent pas de gaieté de cœur et que leurs parcours ont été très violents et traumatisants. Nous ne sommes collectivement pas à la hauteur.

L'harmonisation du traitement des demandes d'asile entre les États européens pose problème car, jusqu'à présent, ce type de démarche s'est toujours opéré par le bas, au détriment des droits des personnes concernées.

La création d'un mécanisme de solidarité, censé désengorger les dispositifs d'accueil des États d'entrée dans l'Union européenne, demeure lettre morte, étant donné que, depuis sa création, aucun pays n'a respecté ses engagements en matière de relocalisation.

La multiplication des hotspots aux frontières de l'UE et des centres d'accueil chargés d'examiner les demandes d'asile selon une nouvelle procédure accélérée est une pratique contraire au droit et à toutes les conventions internationales. Mais cela facilite les expulsions, alors on n'hésite pas !

Le projet de révision de la directive « retour », la multiplication des accords de réadmission et le chantage aux visas Schengen consacrent, de notre point de vue, une attitude odieuse. Elle s'est incarnée encore dernièrement par le chantage aux visas imposé aux pays du Maghreb par la France d'Emmanuel Macron.

Quant au renforcement de la lutte contre l'immigration illégale et les déplacements des personnes demandeuses d'asile sur le territoire européen, il entraîne la multiplication de frontières et de murs érigés contre des personnes qui n'ont même plus la possibilité de demander l'asile.

Bref, les politiques menées aux niveaux européen et français sont un affront à la dignité humaine des personnes qui viennent chercher refuge sur nos sols, ainsi qu'à notre propre droit et nos propres principes. À la France insoumise, nous sommes partisans d'un accueil digne en France et en Europe. Celui-ci est possible : il n'y a pas d'invasion ; il n'y a pas de submersion. Il y a un choix politique qui est fait depuis des décennies : celui de refuser l'accueil pour des raisons politiciennes. Je le répète, nous nous inscrivons en faux vis-à-vis de cette politique et nous prononçons pour un accueil digne aux niveaux français et européen.

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