Intervention de Paula Forteza

Séance en hémicycle du lundi 29 novembre 2021 à 16h00
Lutte contre la pollution plastique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaula Forteza :

La pollution plastique, symbole des dérives de notre société consumériste, est extrêmement préoccupante. Plus de 400 millions de tonnes de plastique ont été produites en 2018, et ce chiffre est appelé à doubler d'ici à 2040. Cela fait froid dans le dos, surtout quand on sait que 81 % des plastiques mis en circulation deviennent des déchets au bout d'une année, comme le souligne le récent rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Au-delà des images désolantes de nos océans remplis de déchets plastiques, nous nous rendons désormais compte que la pollution due notamment aux microplastiques et nanoplastiques est de plus en plus insidieuse, puisqu'elle se répand jusque dans nos corps. Les dangers qu'elle fait courir à la biodiversité et à la santé humaine sont tellement évidents qu'ils devraient nous pousser à agir sans délai et de manière efficace.

Pourtant, la proposition de résolution que vous nous proposez d'adopter relève de la facilité ; en outre, elle intervient à la fin d'une législature qui a manqué d'ambition. Je ne veux pas dire que ce texte n'a pas nécessité de travail, que les sujets abordés ne sont pas importants ou que le consensus qu'il suscite dans cet hémicycle n'a aucune valeur. Mais en le lisant, je ne peux m'empêcher d'entendre dans ma tête Greta Thunberg, s'adressant à nous tous, dirigeants politiques, pour dénoncer le blabla en ce domaine, lors du sommet de la jeunesse pour le climat, organisé par l'ONU en septembre.

Nous débattons d'adopter une résolution qui invite le Gouvernement à « envisager un plan national sur les plastiques », et à faire entendre une voix ambitieuse au niveau international. Mes chers collègues, pourquoi ne pas avoir profité des cinq années de votre mandat pour défendre de véritables réformes, des mesures efficaces, à l'échelle de notre pays ? Nous aurions ainsi pu montrer l'exemple et gagner en crédibilité au niveau international.

Dois-je rappeler que vous avez fixé à 2040 la fin de la mise sur le marché des emballages en plastique à usage unique ? Permettez-moi pourtant de souligner qu'au regard de l'urgence climatique, la Convention citoyenne pour le climat avait demandé qu'il y soit mis fin dès 2023. La différence est de dix-sept longues années ; au passage, je note une belle entorse à la promesse du chef de l'État de soumettre les propositions au vote « sans filtre ». Je n'ose sortir la calculatrice pour estimer combien de milliers de tonnes de déchets plastiques nous aurions ainsi pu nous épargner.

J'ai entendu vos discours sur les interdictions actées ces dernières années. Il est vrai que les sacs plastiques et les cotons-tiges avec un bâtonnet en plastique, notamment, ont disparu des rayons des magasins. C'est un bon début. Mais certaines de ces interdictions avaient été votées pendant la précédente législature. Quant aux pailles en plastique, il était prévu de les interdire à compter de 2020, avant que vous ne décidiez de reporter la réforme d'un an.

Voter des lois est une chose ; veiller à leur application en est une autre. L'ONG No Plastic In My Sea s'est par exemple inquiétée il y a quelques jours des défauts d'application des mesures de la loi AGEC concernant l'utilisation de plastiques à usage unique dans la restauration, notamment les fast-foods. Ainsi, 70 % des restaurateurs refuseraient les contenants réutilisables apportés par leurs clients, notamment par méconnaissance de la législation.

Il est urgent de rompre avec l'écologie de la posture, des discours, que Greta Thunberg dénonce très justement. Nous n'en avons plus le temps ! En tant que parlementaires, nous disposons d'une véritable marge de manœuvre pour, d'une part, modifier les pratiques des industriels, d'autre part, aider nos concitoyens à faire évoluer leurs modes et habitudes de consommation. Pourquoi s'en remettre à un texte dont la portée est uniquement symbolique ? Pourquoi ne pas avoir profité du temps législatif qui vous était imparti pour avancer sur le fond, avec la loi, en proposant de nouvelles réformes plus ambitieuses et volontaristes, ou tout simplement en vous donnant les moyens de faire appliquer les lois déjà votées ?

À force de temporiser, de s'en remettre seulement et toujours au progrès technique, nous voilà au pied du mur, avec des déchets plastiques d'ores et déjà au sein de nos organismes, dès lors contraints d'agir encore plus vite et plus fort.

Le groupe Écologie démocratie solidarité, que j'ai eu l'honneur de coprésider l'année dernière, a toujours été force de proposition sur ces sujets. Vous auriez pu nous soutenir dans ces combats. Vous ne l'avez pas fait. Je le répète donc : notre biodiversité mérite mieux ; notre santé mérite mieux ; nos enfants méritent mieux que des discours et de bonnes intentions !

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