Intervention de Pascal Brindeau

Séance en hémicycle du vendredi 5 novembre 2021 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Gestion des finances publiques ; transformation et fonction publiques ; crédits non répartis ; régimes sociaux et de retraite ; remboursements et dégrèvements ; gestion du patrimoine immobilier de l'État ; pensions

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Brindeau :

Alors que la dette publique de notre pays s'élève aujourd'hui à 115,3 % du PIB selon les derniers chiffres de la loi de finances rectificative présentée cette semaine, l'examen de ces missions, en cette fin de législature, nous amène à l'heure du bilan.

Pour l'exercice 2022, les crédits de la mission "Gestion des finances publiques et des ressources humaines" restent stables à 10 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2021. Ils permettent, certes, de financer de nouveaux besoins concrets concernant les marchandises aux frontières, à savoir la sécurisation du Brexit et la mise en œuvre, dans les points de passage frontaliers, des nouveaux règlements européens.

Toutefois, étant donné qu'il s'agit de la principale mission du pôle économique et financier de l'État, qui regroupe l'essentiel des effectifs des ministères économiques et financiers, nous regrettons qu'elle ne prévoie aucune réduction des dépenses publiques. Les efforts que vous faites sur des chantiers stratégiques tels que les systèmes d'information et la lisibilité de la gestion financière opérationnelle conduiront à la disparition, dans cette mission, de 1 392 équivalents temps plein (ETP) en 2022, chiffre dont vous vous réjouissez dans le document budgétaire, mais qui paraît bien maigre au regard des effectifs totaux de la fonction publique d'État. La réduction du nombre de fonctionnaires est une promesse abandonnée du candidat Macron de 2017. Cette baisse n'est pas un totem, mais elle ne doit pas non plus être un tabou dans les administrations centrales non régaliennes.

D'après le dernier rapport annuel sur l'état de la fonction publique, publié le 22 octobre 2021, la masse salariale des administrations publiques, hors contributions aux régimes de retraite, représente 14,8 % des dépenses publiques. Sur les 5,61 millions de personnes travaillant dans les trois versants de la fonction publique 3 818 400 sont fonctionnaires, 1 124 700 sont contractuels, 309 200 sont militaires et 358 900 sont des agents relevant des autres catégories. C'est 40 % de plus qu'en 1980, alors que, sur la même période, la population n'a crû que de 18 %.

Le paradoxe réside dans le fait que le nombre de fonctionnaires diminue alors que le nombre de postes augmente, car ces postes sont occupés par des contractuels. Le Président de la République avait annoncé une réduction de 120 000 du nombre d'agents publics sur la durée du quinquennat, soit 24 000 par an, au moyen notamment du non-remplacement des départs à la retraite : qu'en est-il aujourd'hui ? Ces suppressions devaient générer une économie de plus de 3 milliards d'euros par an au terme du quinquennat, mais c'est l'inverse qui s'est produit : les dépenses de personnel de l'État sont passées de 189 à 195,4 milliards d'euros, soit une hausse de plus de 3,4 % ! Comment expliquez-vous que le nouveau projet de loi de finances rectificative puisse augmenter le plafond des emplois de l'État pour 2021 de 885 équivalents temps plein et celui de ses opérateurs de 226 ETP ?

L'action sur les emplois publics dans les administrations centrales et autres organismes n'est pas la seule façon de réduire la dépense publique, mais elle en est une, avec la chasse aux gaspillages et aux fraudes, dont la fraude sociale. Tout cela doit s'intégrer dans une volonté de repenser le périmètre d'action de l'État, ce que vous ne faites pas.

Pour ce qui est, enfin de la mission "Remboursements et dégrèvements" , nous souhaitons appeler votre attention sur la hausse de 4 à 22,9 milliards d'euros poussée par la suppression progressive de la taxe d'habitation. Au total, le dégrèvement de la TH au bloc communal aura coûté à l'État 14,5 milliards d'euros en 2020 et 10,6 milliards en 2019. Philippe Laurent dans une tribune publiée en 2019 dans le journal Les Échos, avait déjà donné l'alerte quant au risque d'augmentation de la taxe foncière. D'ailleurs, les crédits de la mission sont ici en hausse, précisément en raison d'une augmentation de 7,43 % de la taxe foncière. C'est un fait – nous le constatons aujourd'hui – que les communes, notamment urbaines, sont plus perdantes depuis la suppression de la TH, qui constituait pour elles une ressource significative et dynamique, qui représentait dans certains cas jusqu'à 5 % de leur budget. Nous vous avions prévenu que les maires iraient chercher ces ressources sur la taxe foncière, seule taxe encore à la disposition des budgets municipaux.

En début de quinquennat, vous avez renommé cette mission, puis l'intitulé du ministère, pour parler de « transformation publique ». Malgré certaines tentatives, dont la loi du même nom, cet objectif de transformation n'est pas atteint, et encore moins ressenti sur le terrain. La meilleure des transformations serait une vraie décentralisation – en témoigne le rôle calamiteux des ARS, les agences régionales de santé, pendant la crise sanitaire.

Pour toutes ces raisons, le groupe UDI-I a décidé de s'abstenir sur ces crédits.

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