Intervention de Valérie Six

Séance en hémicycle du jeudi 21 octobre 2021 à 9h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Six :

En ce qui concerne les soins palliatifs, nous avons pris note du plan national présenté par le ministre de la santé au mois de septembre dernier. Néanmoins, nous regrettons qu'aucune mesure pour le développement des soins palliatifs ne figure dans ce PLFSS comme s'y était engagé le rapporteur général. Rappelons que plusieurs départements restent dépourvus d'unités de soins palliatifs.

S'agissant des réformes relatives aux soins de suite et de réadaptation et à la psychiatrie, aucune simulation n'est prête et aucun décret n'est aujourd'hui publié. Elles s'apparentent donc à un grand saut dans le vide, entachant considérablement l'acceptabilité de ces réformes. Les professionnels concernés ne savent pas à quoi s'attendre.

Concernant les dispositions de la loi issue de la proposition de notre collègue Stéphanie Rist, visant à limiter le recours à l'intérim dans les services hospitaliers, beaucoup d'hôpitaux attirent notre attention sur la possible fermeture de services entiers. Veillons à ce que le remède ne soit pas pire que le mal. Si nous partageons l'objectif de lutter contre la surenchère à laquelle les hôpitaux sont obligés de se livrer, nous considérons qu'il faudrait peut-être leur donner davantage de temps en suspendant cette disposition ou en trouvant une alternative.

Fidèles à la démarche constructive qui nous caractérise, nous saluons les quelques bonnes mesures de ce texte. Je pense en particulier au remboursement de la contraception féminine jusqu'à l'âge de 25 ans, au remboursement de la consultation chez le psychologue par l'assurance maladie, à l'instauration d'un tarif plancher pour les aides à domicile et à l'adoption d'un amendement en commission visant à supprimer la part salariale de la surcotisation sur la prime de feu pour les sapeurs-pompiers.

Pour ce qui est de l'élargissement de la revalorisation salariale du Ségur de la santé, nous y sommes évidemment très favorables, mais regrettons que d'autres personnels en restent exclus. La crise a révélé l'écart considérable entre l'engagement des professionnels et la faiblesse de leur rémunération. Cette situation est à l'origine d'une grande frustration chez les professionnels exclus et entraîne des départs et des difficultés de recrutement dans les établissements qui ne sont pas éligibles à la revalorisation. Comment justifier que deux professionnels effectuant le même travail ne soient pas traités de la même manière pour la simple raison que l'un est employé dans un établissement qui dépend d'une collectivité et l'autre dans un établissement de l'État ? Il faut dépasser les questions de statut et octroyer la revalorisation salariale du Ségur à tous les professionnels.

Beaucoup d'établissements ont également appelé notre attention sur les effets indésirables de cette revalorisation salariale – je pense en particulier à l'impact sur la réduction dite Fillon ou sur la taxe sur les salaires. Nous vous invitons à agir dès ce PLFSS, car il ne faudrait pas que ce que donne le Gouvernement d'une main, il le reprenne de l'autre.

Favoriser les soins à domicile, c'est également sauvegarder le modèle de SOS Médecins. Ces médecins interviennent tous les jours, même durant le week-end et les jours fériés, pour assurer une offre de soins à des personnes qui ne peuvent se déplacer. Ils sont une part de la solution à l'engorgement des hôpitaux et aux problèmes d'accès aux soins des personnes éloignées de tout cabinet médical dans les zones sous-denses. Tâchons de valoriser ces métiers car, sans eux, nous éloignons encore davantage le patient du médecin.

Le rôle des grossistes-répartiteurs est également fondamental. La crise sanitaire a d'ailleurs révélé au grand jour l'importance de ces hommes et de ces femmes dans la chaîne du médicament. C'est pourtant une activité sous tension, depuis des années et, si nous voulons conserver ces savoir-faire, une répartition efficace et les 15 000 emplois du secteur, il faut nous donner les moyens de soutenir ces professionnels.

Des mesures ont été intégrées à ce PLFSS mais, alors qu'il était question d'une modulation particulière de la taxe sur les produits issus du froid, celle-ci ne semble pas figurer dans le texte. Comment comptez-vous procéder, monsieur le ministre ?

Je regrette aussi que nos amendements visant à renforcer le droit à l'oubli en matière d'assurance emprunteur aient été déclarés une fois encore irrecevables. Aujourd'hui, les personnes atteintes d'une pathologie cancéreuse ou chronique doivent attendre dix ans pour reprendre le cours de leur vie et se projeter dans l'avenir. Nous souhaitions ramener ce délai à cinq ans.

Sur l'autonomie, vous abondez enfin la cinquième branche, récemment créée et qui, depuis sa création, n'avait connu aucun financement nouveau. Ce sont ainsi 400 millions d'euros qui vont notamment permettre de financer le tarif plancher des aides à domicile et le recrutement de 10 000 postes supplémentaires de soignants dans les EHPAD d'ici cinq ans. Nous sommes bien loin des 80 000 postes supplémentaires préconisés par le rapport Libault. À ce rythme-là, nous n'atteindrons les 80 000 postes qu'en 2066 ! En suivant cette trajectoire, comment parviendrons-nous à relever le défi démographique qui nous attend ?

Pour relever ce défi, il nous faudra d'ailleurs compter sur un taux de natalité soutenu, alors qu'il ne fait que diminuer d'année en année. La politique familiale n'est clairement pas votre priorité, puisque vous transférez une part des recettes de la branche famille pour financer les branches maladie et vieillesse ! Nous présenterons un amendement visant à corriger cette trajectoire.

Notre groupe considère que nous devons accompagner les familles par une politique familiale ambitieuse. Rien n'est prévu dans ce PLFSS pour faciliter la vie des parents, alors que le taux de natalité est en chute libre depuis 2015 : alors que 800 000 bébés sont nés en 2015, on n'en comptait plus que 753 000 en 2019 et 736 000 en 2020. Ces chiffres doivent nous alerter !

Les jeunes parents n'ont pas tous accès à une maternité proche de leur domicile, ils peinent à trouver une place en crèche et doivent supporter le coût important des soins que demande le nourrisson, parce que les allocations familiales sont conditionnées aux ressources du ménage. La politique familiale n'est pourtant pas une politique de minima sociaux : elle s'adresse à tous les Français, elle invite chacun à fonder une famille et l'accompagne dans cette démarche.

L'ensemble de notre système de protection sociale est basé sur un taux de natalité supérieur à deux enfants par femmes. Dans un système de solidarité nationale où les bien portants cotisent pour les personnes malades, où les jeunes cotisent pour les aînés, où les actifs cotisent pour les personnes sans emploi et les retraités, comment pouvez-vous vous satisfaire d'un pays sans naissances et donc sans actifs ?

En réalité, notre modèle social est actuellement financé par l'endettement. Comment peut-on imaginer de voir reposer la soutenabilité de ce modèle sur l'espoir de taux d'intérêt faibles et sur les générations futures ? Pouvons-nous continuer de la sorte ? Notre groupe considère qu'il ne s'agit pas d'une gestion responsable des comptes publics et qu'il est temps d'engager des réformes structurelles pour la pérennité de notre modèle social.

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