Intervention de Marie-Noëlle Battistel

Séance en hémicycle du mercredi 12 mai 2021 à 15h00
Égalité économique et professionnelle — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Noëlle Battistel :

Avant d'entrer dans le détail de la proposition de loi, je regrette, comme je l'ai fait en commission – mais cette fois-ci en présence du Gouvernement –, que nous n'ayons pas été saisis d'un grand projet de loi relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes au cours de ce mandat. Le 25 novembre 2017, le Président de la République avait fait de l'égalité entre les femmes et les hommes une grande cause nationale du quinquennat. En matière économique, cette priorité n'avait trouvé qu'une traduction très marginale dans la loi PACTE, qui réformait pourtant de nombreux secteurs. Lorsque, le 3 décembre 2019, Bruno Le Maire et Marlène Schiappa avaient lancé une consultation publique intitulée « Agir ensemble pour l'égalité femmes-hommes dans l'économie », nous nous attendions à un projet de loi à la hauteur de l'enjeu.

Il n'en fut rien, et c'est désormais à travers une proposition de loi, au périmètre par nature plus limité, déposée par notre collègue Marie-Pierre Rixain, que nous sommes appelés à débattre de la question de l'égalité économique et professionnelle. Nous regrettons qu'au cours de ce quinquennat, les initiatives législatives visant à faire progresser les droits des femmes aient souvent dû être le fait du Parlement. À l'inverse, je salue très sincèrement, au nom du groupe Socialistes et apparentés, le travail de la rapporteure, qui s'est saisie de cette question et a permis une amélioration sensible du texte en commission, grâce à son ouverture d'esprit à l'égard de plusieurs propositions venues de l'opposition. Je pense par exemple à la possibilité donnée aux bénéficiaires de la prestation partagée d'éducation de l'enfant d'accéder aux dispositifs de formation professionnelle en amont de la fin de cette prestation, plutôt qu'à l'issue de celle-ci. Nos amendements, sur ce point, se sont rejoints.

Ainsi, si l'équilibre du texte issu de la commission devait être préservé, notre groupe voterait en faveur de cette proposition de loi.

Cependant, et cela ne surprendra pas Mme la rapporteure, nous pensons qu'on peut renforcer l'ambition de ce texte et accélérer sa mise en œuvre. La composition des jurys de sélection ou de concours dans les universités, les filières dites sélectives ou les procédures d'accès à la fonction publique, doit enfin atteindre la parité. La diversité de la composition de ces instances – qui dépasse la seule question de la représentation de chaque sexe – est une condition essentielle d'une plus juste représentation de notre société, en particulier d'une plus juste place des femmes, au sein des parcours et des métiers concernés.

Il en va de même de la place des femmes au sein des instances dirigeantes des entreprises. Il s'agit d'ailleurs d'un impératif économique : rappelons que les premières études longitudinales réalisées sur la féminisation des instances dirigeantes des entreprises du Fortune 500 – le classement des 500 premières entreprises américaines – montraient déjà que le quartile d'entreprises dont les équipes de direction étaient les plus féminisées affichait, en moyenne, un taux de rendement des capitaux propres supérieur de 35,1 % à celui du quartile regroupant les entreprises les moins féminisées. Nous proposerons donc que l'obligation faite aux entreprises de plus de 1 000 salariés de compter au moins 30 %, puis 40 %, de représentants de chaque sexe parmi les instances dirigeantes, prévue à l'article 7, soit remplacée par une exigence de parité, précédée d'une étape intermédiaire prévoyant une proportion minimale de 40 %. Nous demanderons également l'extension de cette obligation aux entreprises de plus de 250 salariés et une accélération de deux ans du calendrier proposé, car notre objectif est bien d'atteindre la parité réelle, dont nous estimons qu'elle constitue une chance pour l'entreprise.

Nous pensons également qu'en matière de droits des femmes au sein de l'entreprise, certains domaines ont été oubliés dans la proposition de loi, qu'il s'agisse de la lutte contre les discriminations au travail ou de l'accompagnement des personnes victimes de violences conjugales. Nous proposerons ainsi, comme plusieurs de nos collègues, la désignation obligatoire, au sein de la délégation du personnel siégeant au comité social et économique (CSE), d'un référent chargé de lutter contre les discriminations.

Par ailleurs, au vu du retard pris dans la ratification de la convention 190 de l'Organisation internationale du travail (OIT), nous avions déposé, à la demande de plusieurs ONG, dont ActionAid, des amendements visant à mieux protéger les femmes victimes de violences conjugales dans leurs rapports avec leur employeur, à faciliter leurs démarches administratives ou à les aider à obtenir une mobilité professionnelle. Nous proposions également un congé légal pour leur permettre d'effectuer les démarches judiciaires, médicales ou sociales rendues nécessaires par leur situation, ou encore la possibilité de rompre sans préavis un contrat de travail lorsqu'une personne doit s'extraire d'un contexte dangereux. Nous regrettons que ces amendements aient été déclarés irrecevables. Pouvez-vous, madame la ministre déléguée, vous engager à ratifier la convention 190 de l'OIT ?

Pour finir, madame la rapporteure, je connais votre engagement ancien et constant sur ces questions. Je sais que nous pourrons encore faire progresser cette proposition de loi en adoptant les mesures que nous vous proposons.

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