Intervention de Denis Morin

Réunion du mercredi 6 octobre 2021 à 9h30
Commission des affaires sociales

Denis Morin, président de la sixième chambre de la Cour des comptes :

Les questions posées portent essentiellement sur la prévention. Je crois que c'est un véritable sujet et le premier président a rappelé que nous préparons un rapport à la demande de l'Assemblée nationale. Il sera remis à la fin de l'année.

Sans déflorer le sujet, nous objectiverons le fait que nous dépensons autant pour la prévention que les pays voisins. Nous donnons les chiffres et, effectivement, c'est une information qu'il faut aller chercher.

Je rappelle que la prévention comporte quatre points et qu'il est difficile d'avancer sur ces quatre points car nous nous heurtons à des lobbies influents. En parlant du tabac, de l'alcool, de l'alimentation et de l'environnement, nous avons résumé la politique de prévention et de nombreux points relèvent effectivement du pouvoir législatif.

Sur le financement, nous tendons, en France comme dans les pays étrangers, vers un système de tarification à la fois à l'acte sur une partie variable selon les segments de notre système de santé et au forfait, que ce soit en ville, à l'hôpital ou dans le médico‑social et en SSR. Nous mettons ce point en évidence dans le chapitre consacré à la réforme du financement hors médecine-chirurgie-obstétrique.

Je crois que cette convergence est bonne. Il faut effectivement une part de financement à l'activité ou à l'acte en ville et une part de financement au forfait. Vous avez évoqué, monsieur le premier président, l'importance des rémunérations sur objectifs de santé publique, qui permettent de mobiliser les professionnels de santé autour de sujets comme la santé publique et, éventuellement, la coordination entre les acteurs. Il faut aussi probablement des dotations qui veillent à compenser les inégalités de santé, un sujet majeur dans notre pays. En particulier, les dotations populationnelles répondent à cet objet.

Sur le virage ambulatoire, évoqué par Mme Valentin notamment, et le maintien à domicile des personnes âgées, je pense que la tarification est un élément de réponse important. Je rappelle que nous avons travaillé sur le virage ambulatoire en 2017 et montré dans le RALFSS que, quel que soit le secteur concerné, la prise en charge à domicile génère systématiquement des économies sur tous les postes des dépenses de santé. C'est un élément important qui montre que nous pouvons faire des économies tout en améliorant la qualité de la prise en charge. Maintenir les personnes âgées à domicile est un élément qui favorise la qualité de la prise en charge, tout comme le fait de permettre un retour rapide de l'hôpital après un séjour bref. Nous voyons que ces éléments sont en même temps des éléments de qualité de prise en charge et de meilleure allocation des ressources.

Mme Sanquer a posé une question sur la réforme du cadre organique des lois de financement. Nous maintenons l'idée que l'obligation de collectifs serait judicieuse. L'an dernier, quatre collectifs ont porté sur le budget de l'État, mais aucun sur le budget de la sécurité sociale. Des éléments d'information seraient pourtant probablement utiles au débat démocratique, du point de vue de la Cour en tout cas. Nous proposons de poser le principe que, lorsque les conditions initiales de l'équilibre sont lourdement perturbées, il est obligatoire de déposer un collectif comme c'est le cas pour l'État.

De même, j'insiste sur le fait que la reprise de dette par la CADES, notamment quand elle porte sur des déficits futurs, devrait être monopole des LFSS, avec obligation de déposer une trajectoire de retour à l'équilibre qui donne la cohérence entre le montant de la reprise de dette et l'évolution future des déficits. Sinon nous avons une discordance, et c'est exactement la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui.

L'ORDAM est un instrument de régulation et de responsabilité mais un ORDAM sans levier de régulation au niveau régional introduit une discordance ingérable dans la durée. Nous ne pouvons pas avoir une négociation conventionnelle nationale sans aucune adaptation territoriale et une responsabilisation à travers l'ORDAM. C'est juste impossible.

Sur la question de confier la coresponsabilité des acteurs régionaux de santé à l'État et aux collectivités régionales, la santé reste pour l'instant une grande politique de l'État. Il existe effectivement des financements de collectivités territoriales sur tel ou tel point – pas seulement des régions d'ailleurs mais souvent des communes – mais ce sont des financements d'un point particulier. L'essentiel de la politique est une politique nationale. Il n'est pas interdit de réfléchir à des évolutions, dont j'avais eu l'occasion de parler lors d'auditions antérieures.

Sur l'innovation en santé, je rappelle, comme vous l'avez dit monsieur le premier président, que la crise permet incontestablement le développement du numérique en santé. Les acteurs semblent y être davantage prêts qu'avant la crise et c'est un élément positif sur lequel il faut capitaliser.

Sur le transfert du recouvrement de l'AGIRC-ARRCO vers l'URSSAF, nous avons noté dans le PLFSS que cette disposition, bonne dans son principe, était reportée d'une année du fait de difficultés de mise en œuvre. Je suis évidemment favorable à ce report compte tenu de ces problèmes.

Nous avons travaillé sur la DSN dans le RALFSS voici trois ans et nous avions mis en évidence les éléments que vous soulevez dans votre question, monsieur Belhaddad, de l'insuffisante capacité à tirer toutes les potentialités de cet instrument important.

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