Intervention de Franck Von Lennep

Réunion du mercredi 26 mai 2021 à 9h30
Commission des affaires sociales

Franck Von Lennep, directeur de la sécurité sociale :

En ce qui concerne l'ONDAM et la mission du HCAAM, l'ONDAM voté en LFSS 2021 comportait une provision au titre de la crise pour un peu plus de 4 milliards d'euros. Cette provision était destinée au financement de tests, de vaccins et d'autres dépenses de Santé publique France, notamment de masques. Nous savions lorsque cet ONDAM a été construit que cette provision était conventionnelle et aurait vocation à être revue à la hausse s'il devait se produire de nouvelles vagues. Il avait été dit clairement lors de la présentation du PLFSS l'année dernière que cette hypothèse avait été retenue, de la même façon que les hypothèses dans le cadre du projet de loi de finances sur les dépenses de l'État reposaient sur l'absence de nouvelle vague en 2021.

Nous avons enregistré de nouvelles vagues, fin 2020 puis début 2021, et cela conduit à des dépenses supplémentaires, notamment des dépenses en ville pour le financement des tests PCR et des tests antigéniques. Nous savions que les tests seraient nombreux au début de l'année 2021 ; ils le sont encore davantage que prévu et durant une période plus longue que ce que nous imaginions.

Par ailleurs, nous enregistrons des dépenses supplémentaires sur les vaccins, en particulier pour l'achat de vaccins par Santé publique France dans le cadre des marchés négociés par l'Union européenne. Chaque pays n'a pas, individuellement, la main sur le prix de ces vaccins mais nous nous inscrivons dans des marchés européens qui conduisent à acheter ou précommander un nombre de vaccins très élevé pour ne pas prendre de risque ensuite, si certains s'avèrent disponibles plus rapidement que d'autres ou plus efficaces que d'autres. L'enveloppe globale pour les vaccins a donc été revue à la hausse.

Nous avons également engagé des dépenses supplémentaires liées à des surcoûts, en particulier à l'hôpital, et d'autres dépenses liées aux indemnités journalières. En effet, la crise se poursuivant, la troisième vague se traduit par des hausses d'indemnités journalières même si tout cela est actuellement encore très prévisionnel.

Le chiffre retenu et présenté au comité d'alerte de l'ONDAM au mois d'avril est un chiffre proche de 9 milliards d'euros au lieu des 4,3 milliards d'euros votés en LFSS. C'est certainement l'ordre de grandeur qui sera retenu par le comité d'alerte lorsqu'il présentera la semaine prochaine l'avis qu'il doit remettre chaque année avant le 1er juin.

Nous serons probablement entre 9 et 10 milliards d'euros. Nous considérons que c'est un chiffre médian au sein d'une fourchette sur laquelle il reste encore beaucoup d'incertitudes sur ce que seront les surcoûts liés à la crise au second semestre. Combien de tests seront-ils faits ? Quels seront les surcoûts éventuels à l'hôpital ou dans les établissements médicosociaux ? Je pense que le comité d'alerte relèvera l'incertitude attachée à cette prévision.

Tout le monde savait évidemment lors de la discussion sur le PLFSS que nous avions devant nous une très grande incertitude, raison pour laquelle vous avez voté une disposition selon laquelle le Gouvernement n'a pas présenté des mesures de rééquilibrage à la suite de la remise de l'avis du comité d'alerte au mois d'avril. La loi prévoit en effet, en cas de risque sérieux de dépassement en avril, que le Gouvernement doit présenter des mesures de rééquilibrage. Cette disposition a été levée cette année dans le contexte de la crise.

Le HCAAM a remis son avis et finalise actuellement son rapport. C'est un travail très riche que je ne résumerai pas ici mais, parmi les orientations proposées par le HCAAM se trouve celle de renforcer la dimension pluriannuelle de l'ONDAM. Il s'agit d'être capable de construire une trajectoire mieux éclairée par les effets d'offre et d'organisation des soins mais aussi par les effets de demande de prise en charge des pathologies. Il faut que cette trajectoire ne soit pas qu'une trajectoire budgétaire mais soit enrichie par une compréhension de la manière dont se forment les dépenses de santé, de la démographie médicale, des revenus...

Cette proposition est cohérente avec les recommandations de la « commission Arthuis », qui proposait également d'avoir une vision davantage pluriannuelle des dépenses publiques. Elle est aussi cohérente avec les deux propositions de loi organique évoquées lors de la séance d'hier après‑midi et qui visent à renforcer cette dimension pluriannuelle du pilotage des finances publiques.

Ce pilotage pluriannuel de l'ONDAM s'enrichirait dans la proposition du HCAAM d'une proposition qui reste à travailler et à préciser mais qui a retenu l'intérêt des membres du HCAAM. Celle-ci consiste à identifier une provision pluriannuelle au sein de cette trajectoire pluriannuelle afin de s'extraire d'une régulation purement infra-annuelle dès lors que nous resterions dans le cadre de la provision pluriannuelle. Ainsi, si nous dépassons un peu l'ONDAM une année, nous ne serions pas forcément obligés de réguler ex post – nous pensons évidemment au gel des tarifs hospitaliers – mais nous pourrions le réguler de façon pluriannuelle, c'est-à-dire prendre des mesures pour revenir ou rester dans le cadre de cette trajectoire enrichie de la provision. Cela reste à préciser techniquement mais a semblé vraiment intéressant aux membres du HCAAM. Si nous y parvenions, ce serait évidemment une évolution assez forte du pilotage annuel et pluriannuel de l'ONDAM.

Tout cela n'est pas pour cette année. Cela ne peut s'entendre que dans le cadre d'une trajectoire pluriannuelle et, plus largement, dans le cadre d'une trajectoire de pilotage des finances publiques. Nous voyons bien que cela renvoie à une prochaine loi de programmation des finances publiques et aux décisions politiques qui devront être prises lors du prochain quinquennat et de la prochaine législature.

Certaines recommandations pourraient être prises en compte dès cette année. Elles sont davantage techniques mais, en matière de construction de l'ONDAM, la technique a toujours un lien fort avec l'impact sur les acteurs. L'une des orientations portées par le HCAAM, partagée par la « commission Arthuis » et, je crois, par le rapporteur général, consiste à enrichir l'annexe 7 sur l'ONDAM pour disposer d'informations plus précises sur les dépenses des hôpitaux, l'investissement des hôpitaux et l'endettement des établissements publics.

Je crois que tout le monde reconnaît aujourd'hui que le pilotage de l'ONDAM hospitalier à travers les dotations de l'assurance maladie ne permet pas d'avoir une vision claire et exhaustive de ce qu'il se passe à l'hôpital. Ce sont des travaux techniques assez lourds qui concernent des milliers d'établissements et qui nécessitent de compiler et analyser beaucoup de données. Ce sera à introduire progressivement, la première étape ayant lieu dès cette année puis les autres dans les années suivantes. Ils permettront d'enrichir largement les débats au Parlement lors de l'examen du PLFSS.

Par ailleurs, d'autres évolutions sont possibles dans la présentation et la construction de l'ONDAM mais il est encore un peu tôt pour en parler. Les ministres n'ont pas encore pris leur décision et nous travaillons techniquement à savoir ce qui sera possible.

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