Intervention de étienne Crépon

Réunion du jeudi 15 juillet 2021 à 9h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

étienne Crépon, président du Centre scientifique et technique du bâtiment :

. – A l'origine, le CSTB a été créé pour accompagner l'innovation et être l'évaluateur français des produits innovants. Cette démarche d'évaluation existe dans quasiment tous les grands pays développés parce qu'un produit doit disposer, pour accéder au marché, d'une attestation juridiquement non obligatoire mais rassurant l'ensemble des acteurs. En France, cette mission est dévolue au CSTB, qui est très mobilisé sur l'évaluation des produits innovants notamment liés aux filières biosourcées ou naturelles. Nous avons effectivement travaillé sur l'utilisation de la terre crue ou cuite mais également sur l'utilisation de produits tels que le lin, le chanvre ou la laine. Ces dernières années, nous avons constaté que l'innovation est de plus en plus le fait d'acteurs ne possédant pas la structuration de recherche et développement propre aux grands groupes industriels. Par conséquent, nous réfléchissons actuellement aux moyens d'accompagner ces acteurs dès l'amont pour les aider à passer du concept au produit répondant aux attentes du marché, dans le strict respect des principes déontologiques. Les personnes du CSTB qui accompagneront l'acteur ne seront en aucune manière impliquées dans l'évaluation du produit.

C'est également dans cette logique que nous avons mis en place un incubateur d'entreprises, le CSTB Lab, qui accueille un certain nombre de start‑up développant des produits et concepts innovants. Le CSTB Lab accueille notamment une société qui propose de réutiliser à l'intérieur des bâtiments les boues de dragage jusqu'à présent relarguées au large en mer et qui devront être traitées sur terre à l'horizon 2024. En revanche, le CSTB n'est pas chargé de la normalisation au sein du secteur de la construction. Cette responsabilité appartient à l'Afnor.

Nous travaillons depuis plusieurs années sur le sujet de l'économie circulaire, pour lequel nous constatons clairement depuis 18 à 24 mois une montée de l'intérêt de la part de l'ensemble des acteurs de la filière de la construction. Ce thème fait l'objet d'un domaine d'action stratégique de recherche du CSTB, qui se décline en plusieurs sous‑thèmes dont le premier porte sur le gisement de matières premières secondaires que représente le parc existant, que ces matières soient réinsérées dans d'autres constructions ou dans des produits. Le deuxième sous‑thème traite de la capacité du secteur du bâtiment à incorporer des matières premières secondaires, qu'elles proviennent du secteur du bâtiment ou d'autres secteurs. Enfin, le troisième axe de travail consiste à étudier comment optimiser la conception des bâtiments pour faciliter leur seconde vie ou leur déconstruction.

Les travaux du premier sous‑thème sont menés avec l'Ademe dans un cadre territorialisé, les produits de déconstruction n'ayant pas vocation à parcourir de longues distances vers leur site de réemploi. Les travaux du deuxième axe portent sur les produits de construction dans le cadre de nos activités d'évaluation et de certification. Nous travaillons notamment avec la filière industrielle pour voir comment incorporer des matières premières secondaires aux produits de construction et quel en sera l'impact sur la performance du produit sur le plan sanitaire ou en termes de durabilité. Nous commençons par ailleurs à mener des travaux sur la réutilisation, en l'état ou après un très léger travail, des produits issus de déconstruction, notamment pour voir comment leur salubrité est analysée. En Europe, le secteur du bâtiment se caractérise par le fait que les objets qu'il produit ont vocation à durer cinquante ans, voire plus de cent ans. Par conséquent, lorsque nous déconstruisons un bâtiment aujourd'hui, nous récupérons des produits de construction qui relèvent des standards et des normes d'il y a cinquante à cent ans. Or les règles sanitaires sont beaucoup plus drastiques aujourd'hui. Dès lors, un travail doit être mené sur l'évaluation de la performance sanitaire des matériaux de construction réemployés afin de s'assurer qu'ils respectent les règles sanitaires s'appliquant aux constructions neuves.

Nous travaillons sur l'utilisation de la maquette numérique pour optimiser les projets de déconstruction. À ce jour, numériser un bâtiment coûte un peu moins de 50 centimes du mètre carré, soit quelques milliers d'euros pour un bâtiment de 10 000 mètres carrés soit 140 logements. Par conséquent, nous travaillons, notamment avec des établissements publics fonciers, pour voir comment la numérisation permet d'optimiser, lors d'une déconstruction, l'identification des matériaux pouvant être réemployés, ceux pouvant être recyclés et ceux devant être placés en décharge. Ces travaux devraient aboutir dans le courant de l'année 2021. Au‑delà de l'utilisation du BIM pour la déconstruction, nous sommes très mobilisés sur l'utilisation de maquettes numériques, notamment pour simuler la performance d'un quartier avant sa réalisation, ou pour renforcer la capacité de concertation menée par la collectivité ou l'aménageur avec les riverains. Nous intervenons également sur l'utilisation de la maquette numérique à l'échelle du bâtiment, en accompagnant l'ensemble de la filière dans l'appropriation de ce nouvel outil. Dans ce domaine, le CSTB a été mandaté par l'État pour développer et gérer la plateforme Kroqi, mise à disposition des acteurs pour leur permettre de se saisir des outils numériques sans coût d'entrée. Dans le domaine de la recherche, nos travaux portent sur l'utilisation de la maquette numérique pour optimiser l'exploitation‑maintenance des bâtiments et des outils de Lean Data pour exploiter les données générées par un bâtiment afin d'en améliorer la performance.

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