Intervention de Guillaume Kasbarian

Réunion du mercredi 5 janvier 2022 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Kasbarian :

Cette proposition de loi comporte deux articles. Le premier vise à élargir la possibilité donnée au Gouvernement de réglementer les prix en supprimant le principe de la libre détermination de ces derniers par le jeu de la concurrence ainsi que la nécessité de consulter l'Autorité de la concurrence et le Conseil national de la consommation (CNC), et en autorisant le Gouvernement à bloquer les prix en cas d'urgence sociale, sans aucune limitation législative de durée. Le second article vise à étendre à la métropole la réglementation des prix de vente en vigueur dans les outre-mer.

Vous avez choisi de consacrer la moitié de votre rapport à un réquisitoire dénonçant « une explosion de la pauvreté durant le quinquennat Macron ». En réalité, la majorité a répondu aux attentes des Français en matière de pouvoir d'achat. Pas avec vos solutions, pas par le blocage des prix, mais en favorisant le travail, en baissant de façon inédite la fiscalité – 50 milliards d'euros d'impôts en moins sur cinq ans –, en revalorisant les salaires de nombreuses professions – je pense au Ségur de la santé – et en aidant ceux qui en ont le plus besoin par la revalorisation de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et du minimum vieillesse. Je ne ferai pas la liste de tout ce que nous avons fait en faveur du pouvoir d'achat au cours du quinquennat.

Nous nous opposerons à votre proposition de loi, d'abord parce que la législation permet déjà au Gouvernement de réglementer certains marchés. Il existe des autorités régulatrices de marchés spécifiques, telles que l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) et la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Le Gouvernement dispose aussi d'outils pour agir en cas d'urgence. C'est ainsi qu'il a temporairement régulé le prix de vente des gels hydroalcooliques et des masques, au début de la crise, et mis en place un bouclier tarifaire pour bloquer les tarifs réglementés de vente du gaz naturel.

La législation existe, fonctionne et s'applique en harmonie avec les règles européennes. Mais vous souhaitez aller plus moins en autorisant tout gouvernement à bloquer tous les prix dans tous les secteurs, sans consultation ni limite dans le temps. Vous affirmez que c'est une solution efficace, alors que les économistes ont bien documenté au cours de notre histoire tous les effets pervers d'un blocage prolongé et généralisé des prix à tous secteurs.

Un tel blocage comporte toujours cinq étapes. À la première, l'État bloque les prix sur un marché en inflation et prétend protéger les consommateurs. À la deuxième, nombre de producteurs qui vendent ou produisent à perte arrêtent de produire. À la troisième, la pénurie sur le marché provoque soit des files d'attente à rallonge, soit un rationnement de la consommation. À la quatrième, on assiste au développement d'un marché noir où l'on vend sous le manteau des biens et services à des prix exorbitants. À la cinquième étape, qui finit toujours par arriver, on arrête le contrôle des prix, ce qui entraîne un violent effet de rattrapage.

Sous cette idée en apparence séduisante se cache toujours une perversité qui, in fine, ne répond jamais à la détresse des consommateurs. Je pourrais citer l'exemple du Venezuela, pays qui ne vous est pas inconnu, où le blocage des prix dans un contexte d'inflation s'est traduit par des files d'attente monstrueuses devant les supermarchés, où les rayons étaient quasiment vides. Au marché noir, le litre de lait coûtait 3,90 dollars à Caracas, beaucoup plus cher qu'à côté.

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